IL Y A CETTE PATIENTE, qui souffre de graves problèmes de dos, et qui ne peut monter que très difficilement dans sa chambre. Il y a cet homme de 80 ans, qui vit seul et s’est retrouvé hospitalisé suite à une chute dans sa baignoire. Il y a aussi cette jeune maman, avec son enfant handicapé, et cette vieille dame souffrant de la maladie d’Alzheimer. Tous ont en commun une perte d’autonomie, plus ou moins marquée. Mais tous vivent chez eux, dans leur maison, grâce aux services de maintien à domicile.
La volonté de rester chez soi.
Le débat initié en 2011 sur la dépendance aura eu le mérite de poser les problématiques auxquelles sera confrontée notre société dans un avenir proche, et de repenser les politiques de santé pour tenir compte de ces évolutions. Le vieillissement de la population s’accompagne inévitablement d’une progression du nombre de personnes en perte d’autonomie. On estime que cette proportion aura augmenté de 25 % en 2025, c’est-à-dire dans douze ans. Dans ce contexte, le maintien à domicile offre une alternative intéressante, sur le plan économique, financier, social et médical.
Le MAD est surtout un parfait compromis pour les personnes désirant rester chez elles aussi longtemps que possible et dans les meilleures conditions. Mais est-il toujours envisageable ? La maladie et l’âge entraînent une perte d’autonomie et rendent plus difficiles les gestes de la vie quotidienne. Monter dans la baignoire, se relever du lit, se déplacer ou encore prendre ses médicaments sont des actes de la vie courante qui peuvent devenir insurmontables. Pour pallier ces difficultés, d’énormes progrès ont été réalisés ces dernières années. Du lit médicalisé confortable à la téléassistance, en passant par les pompes à perfusion, la technologie s’est mise au service des sujets en perte d’autonomie ou malades. De même, la recherche en domotique contribue largement à améliorer le confort et la sécurité des personnes en situation de dépendance. Toutes les innovations permettent de repousser les limites du maintien à domicile. La télémédecine elle-même, encore balbutiante, est considérée comme une prolongation du maintien à domicile, en particulier dans les zones rurales souffrant de désertification médicale.
Le MAD, une coopération interprofessionnelle.
Outre le matériel médical et de confort, le succès du MAD dépend grandement de l’investissement humain. La coordination entre les professionnels, qu’ils soient aides à domicile, médecins, pharmaciens ou infirmiers, est une clé de ce succès. Cette coopération interprofessionnelle, qui optimise les compétences de chaque corps de métier, permet une prise en charge complète et efficiente de la personne dépendante. À Saulieu, en Côte-d’Or, cette coopération a donné naissance au pôle de santé Auxois-Morvan. Cette structure financée par l’ARS (Agence régionale de santé) a ouvert en septembre 2011.
« Nous vivons dans une zone rurale et l’accompagnement du retour et du maintien à domicile a rapidement été au cœur de nos préoccupations. Des dispositifs existaient déjà pour aider la personne âgée à vivre au quotidien, chez elle. L’objectif du pôle de santé est aujourd’hui de faire connaître toutes ces solutions et de coordonner l’intervention des professionnels concernés par l’aide à domicile », explique Nathalie Bessard, pharmacien à Saulieu et porteuse de ce projet ambitieux et exemplaire. « Au sein de ce pôle de santé, le patient est le personnage central et nous essayons autant que possible de respecter sa volonté, de l’écouter », insiste notre consœur, marquant ainsi la différence avec les établissements hospitaliers ou les EPHAD.
Une démarche jusqu’au boutiste !
Dans ce contexte, le MAD est loin de se restreindre au seul matériel médical, et le rôle du pharmacien bien plus large que celui de simple fournisseur. « Mes confrères ou moi-même intervenons à la demande de la coordinatrice, après accord du patient. Notre travail est d’évaluer au plus juste les besoins, qu’il s’agisse de matériel médical ou de réaménagement des pièces. L’objectif n’est pas de suréquiper la maison, à la manière de certains prestataires dont l’intervention est uniquement à but commercial. Des conseils simples peuvent suffire pour améliorer la sécurité des patients, comme enlever un tapis glissant ou ranger les assiettes dans un meuble bas ». La prévention tient une place importante pour favoriser le maintien à domicile.
La réussite du projet repose sur une constante communication entre les professionnels et la coordinatrice. « Au comptoir, les confidences de certains patients ou de leur entourage, ou certains signaux comme des troubles cognitifs, nous conduisent à proposer l’aide de la coordinatrice du pôle de santé. Nous pouvons ainsi intervenir en amont, avant que la situation ne se dégrade plus ». Les exemples sont nombreux et démontrent à quel point la démarche MAD de la structure de Saulieu est aboutie. L’aspect financier est également une préoccupation du pôle de santé. « Des allocations de prise en charge du MAD non remboursable existent, mais elles sont souvent méconnues », confie la pharmacienne de Saulieu.
Penser collectif.
L’investissement dans l’accompagnement du MAD impose au pharmacien de sortir de son officine, de rencontrer les patients dans leur environnement et d’échanger avec les autres professionnels de santé. « Il faut voir collectif, penser collectif », résume Nathalie Bessard. Le MAD illustre parfaitement cette pluridisciplinarité de plus en plus prônée dans la pratique médicale. Amené à prendre une place toujours plus importante dans l’organisation des soins de demain, le MAD étale dès à présent ses victoires, sur la maladie, sur la dépendance et sur l’individualisme ; des victoires auxquelles les pharmaciens participent et continueront de participer largement.
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