Le contexte
Un âge avancé, l’éloignement de sa famille, le décès récent de l’une de ses filles et, accessoirement, une infection bronchique dont il peine à se remettre expliquent l’humeur dépressive de Monsieur M., qui, pourtant, il y a un an à peine, entretenait encore avec ardeur son potager Ce patient bénéficie depuis un mois et demi d’un traitement par Zoloft, un antidépresseur inhibiteur de la recapture de la sérotonine (IRS) prescrit ici à dose faible (compte tenu de l’âge du patient, et du risque d’hyponatrémie, bien connu avec les IRS). Le généraliste inquiet de voir que Monsieur M. perd du poids (plus de huit kilos en moins de deux mois), a profité du renouvellement de l’ordonnance pour la compléter par :
Le Renutryl, une émulsion buvable, réalisant un complément nutritif associant protides, lipides, glucides, vitamines, sels minéraux.
Le Cétornan, qui a pour principe actif l’oxoglurate d’ornithine, un sel d’acide aminé impliqué dans le métabolisme protéique et dans les mécanismes de prolifération de la muqueuse intestinale, qui ralentit la diminution de la balance azotée chez le sujet âgé.
Votre conseil
Monsieur M., épuisé, déprimé, ne manifeste plus d’intérêt pour l’existence et ne se raccroche en rien à la vie : c’est le phénomène classique de « glissement » observé chez un sujet âgé ne trouvant plus de sens à la vie. Le conseil, auprès de l’accompagnante de vie recrutée par les deux fils de Monsieur M. concerne avant tout la qualité de l’alimentation. Il est souvent difficile de préparer des repas corrects par soi-même pour peu que l’on soit isolé, âgé et peu motivé : des solutions doivent donc être proposées (aide ménagère, portage de repas). La prescription de compléments alimentaire devrait rester transitoire mais il pourra toutefois être intéressant de compléter par la suite les apports nutritifs de Monsieur M. par des préparations nutritives et appétentes (préparations hyperprotidiques aromatisées). Les préparations sous forme de crème (prévenant le risque de « fausse route ») peuvent être administrées à la fin du repas, comme dessert.
Le traitement par Renutryl comme par Cétornan peut être à l’origine de diarrhées transitoires (sauf intolérance au lactose pour le Renutryl ou à l’aspartam pour le Cétornan) : veiller à éviter toute déshydratation du patient. Veiller aussi à préciser à l’accompagnante qu’il est préférable, dans un premier temps, de compléter chacune des boîtes de Renutryl par 125 ml d’eau.
Le contexte
Monsieur G., est traité pour hypertrophie bénigne de la prostate (HBP) et hypertension artérielle. Sa santé reste par ailleurs excellente. Renouvelant son ordonnance, un mois après la consultation, il s’inquiète de la survenue de vertiges, notamment lorsqu’il se lève. De plus, Monsieur G. révèle voir dans ses selles les comprimés du nouveau médicament « entiers ». Qu’en est-il ?
Zoxan, nouvellement prescrit car les troubles mictionnels empiraient, a pour principe actif la doxazosine : ce bloqueur α-1, actif au niveau des muscles de la prostate et du col vésical, expose à des effets indésirables posturaux, avec notamment sensations vertigineuses, étourdissements, œdèmes, asthénie, somnolence. Ceci explique que la doxazosine, comme les produits apparentés (Dysalfa, Josir, Xatral, etc.), soit contre-indiquée en cas d’hypotension ou d’antécédents d’hypotension. Chez le sujet hypertendu, elle expose à un risque de palpitations, de tachycardie, de douleurs thoraciques voire d’angor.
Tadenan, un extrait d’un prunier africain, exerce un effet antiprolifératif sur les fibroblastes participant au développement de l’adénome prostatique. Il est indiqué dans le traitement des troubles mictionnels modérés liés à l’HBP. Si l’association au Zoxan semble superflue, elle n’est pas contre-indiquée. La posologie proposée ici est correcte.
Indiqué dans l’hypertension artérielle, Bêta-Adalate associe l’aténolol, un ß-bloquant, à la nifédipine, un antagoniste calcique.
Le contexte
Victime d’un accident vasculaire cérébral (AVC) de gravité moyenne six semaines auparavant, Monsieur T. bénéficie d’un traitement prophylactique prescrit par un spécialiste hospitalier : la probabilité de récidive de ce type d’accident est importante dès qu’un suivi médical régulier n’est pas instauré. Cette prescription s’ajoute à un traitement antihypertenseur et à un traitement prophylactique de la récidive ulcéreuse.
La simvastatine (Zocor) est un hypocholestérolémiant inhibiteur de l’HMG CoA réductase. Comme toutes les statines, elle exerce une action pléiotropique expliquant son intérêt prophylactique en cardiologie : elle est notamment indiquée dans la prévention des complications cardiovasculaires chez les patients présentant des antécédents d’AVC.
L’Asasantine est une association d’un antiagrégant plaquettaire, le dipyridamole, et d’un inhibiteur de l’activation plaquettaire, l’aspirine (à faible dosage : 25 mg). L’aspirine est administrée à des posologies très inférieures aux posologies anti-inflammatoires. Cette formulation est indiquée dans la prophylaxie secondaire de l’AVC lié à l’athérosclérose (accident datant de moins de 3 mois).
L’esoméprazole (Inexium), un inhibiteur de la pompe à proton est prescrit dans le traitement prophylactique d’entretien d’une œsophagite par reflux.
Le losartan (Cozaar), un inhibiteur de l’angiotensine II (sartan), est indiqué dans le traitement de l’hypertension artérielle essentielle.
Votre conseil
La difficulté sera d’obtenir une observance suffisante de Monsieur T. pour lequel un traitement préventif n’a guère de sens, s’agissant de plus de pathologies dont les signes cliniques restent discrets. Le conseil tient en quatre points simples : surveillance régulière de la tension artérielle, traitée si besoin ; surveillance de l’hygiène de vie (poids, alimentation, activité physique), respect de la prescription, prise en charge des facteurs de risque (d’où, ici, la prescription de Zocor et d’Asasantine). Il faut rappeler que :
Les gélules d’Asasantine sont avalées entières, sans être croquées ;
L’Asasantine contient de l’aspirine : même à faible posologie, il y a un risque hémorragique à ne pas méconnaître (interventions dentaires, coupures de rasoir, automédication avec de l’aspirine ou un AINS, etc.) ;
Le jus de pamplemousse augmente les taux sériques de simvastatine (Zocor) par action inhibitrice des microsomes hépatiques, avec risque de majoration des effets indésirables (sur les muscles notamment : rhabdomyolyse) : vous rappelez à Monsieur T. qu’il doit s’abstenir de consommer cette boisson (mais de toute façon il n’est pas trop amateur de jus de fruits).
L’administration d’Asasantine est contre-indiquée en cas d’ulcère gastro-duodénal en évolution. Inexium est prescrit en préventif : la contre-indication ne s’applique pas, mais Monsieur T. doit demeurer d’autant plus attentif à tout signe d’hémorragie occulte que les manifestations ulcéreuses se développent à son âge sans alarme douloureuse.
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