L’ASPIRINE, LA DOYENNE
L’aspirine, de son vrai nom acide acétylsalicylique, a soulagé nombre de générations de malades et pour beaucoup, le « cachet d’aspirine » reste LA solution contre la douleur, voire plus. Certains le considèrent d’ailleurs comme le médicament miracle qui soigne tous les maux. Plus que centenaire, l’aspirine est passée à la postérité et continue de faire partie du quotidien des Français, même si le paracétamol l’a supplanté au cours de la dernière décennie. C’est un des seuls, voire l’unique médicament encore commercialisé de nos jours, à être mentionné dans la première la première édition du dictionnaire VIDAL (1914). On pouvait lire dans la monographie de l’aspirine Vicario (qui ne faisait que quelques lignes) que ce médicament était indiqué pour « toutes les affections rhumatismales »... Avec une « innocuité absolue » !
Pas inoffensif du tout !
Non, l’aspirine n’est pas dépourvue d’effets indésirables et il est important de le rappeler aux patients. La femme enceinte et l’enfant constituent des populations à risque. Au cours de la grossesse, l’aspirine peut être utilisée durant les cinq premiers mois pendant une durée courte. Au-delà de cette limite, les médicaments à base d’aspirine sont contre-indiqués en raison de la toxicité rénale et cardiopulmonaire vis-à-vis du fœtus, se caractérisant notamment par une fermeture prématurée du canal artériel. L’utilisation au cours de l’allaitement est déconseillée. L’autre contre-indication à rappeler, en particulier aux parents dans le cadre d’un achat par anticipation, concerne l’utilisation chez l’enfant. L’aspirine ne doit pas être administrée en cas de varicelle ou d’infections virales (d’allure grippale) en raison du risque de syndrome de Reye ; bien que rare, cette affection est très grave et engage le pronostic vital. Enfin, des précautions sont à envisager chez les patients présentant des antécédents gastro-intestinaux en raison du risque ulcérogène et chez les patients à risque hémorragique.
Un principe actif multifonctions.
Antalgique de palier 1, anti-inflammatoire (non stéroïdien), antipyrétique et antiagrégant plaquettaire ! Son mécanisme d’action repose sur l’inhibition des cyclo-oxygénases, empêchant la formation des prostaglandines (médiateur de l’inflammation). L’acide acétylsalicylique provoque une diminution des taux de thromboxane A2, substance impliquée dans l’agrégation plaquettaire. L’acide acétylsalicylique est hydrolysé en acide salicylique. Il est principalement métabolisé au niveau du foie et excrété par voie urinaire.
Encore des propriétés à découvrir !
Entre les premiers essais de synthèse de l’acétylsalicylique au dix-neuvième siècle et la découverte du mécanisme d’action de cette molécule, plusieurs dizaines d’années se sont écoulées. Aujourd’hui encore, l’aspirine livre de nouveaux secrets et offre de nouveaux espoirs thérapeutiques. Des études ont suggéré l’intérêt thérapeutique de l’aspirine à faible dose en prévention des cancers, notamment du cancer colorectal. L’exploration doit néanmoins se poursuivre et de nouvelles études sont nécessaires pour comprendre le mécanisme d’action de l’aspirine sur les cellules cancéreuses.
PARACÉTAMOL : NE PAS BANALISER
Le paracétamol est un aminophénol aux propriétés analgésique et antipyrétique. Dénommé acétaminophène dans d’autres pays, le paracétamol a pris une place importante dans le traitement de la douleur chez l’adulte comme en pédiatrie, en raison de sa bonne tolérance aux doses usuelles. Si son efficacité est reconnue du grand public, sa toxicité envers le foie est trop souvent méconnue. Plébiscitée pour son efficacité thérapeutique, cette molécule est aussi considérée comme une des causes principales d’accidents iatrogéniques. L’accès facile et l’utilisation fréquente de ce médicament volontaire ou involontaire au sein d’associations médicamenteuses (le paracétamol est présent dans une cinquantaine de spécialités) peuvent expliquer certains accidents médicamenteux, notamment chez les sujets âgés. Il revient donc au pharmacien de souligner la présence de paracétamol dans ces associations.
Une hépatotoxicité à prévenir.
Le paracétamol agit sur les cyclo-oxygénases et empêche la synthèse des prostaglandines au niveau périphérique. Absorbé rapidement au niveau gastrique et intestinal, le métabolisme du paracétamol est principalement hépatique (cytochrome P450) et l’élimination est urinaire. Le glutathion permet de détoxifier les métabolites potentiellement toxiques du paracétamol. La dose maximale est fixée à 4 g par 24 heures, sans dépasser 1 g par prise et en respectant un intervalle d’au moins quatre heures entre chaque prise. L’hépatotoxicité peut être observée à partir de 5 g, et se traduit par des troubles digestifs, neurosensoriels (asthénie) et hépatiques (ictère) vingt-quatre heures après l’ingestion. Le traitement d’un surdosage fait intervenir des donneurs de groupement thiols tels que le N-acétylcystéine. Attention, chez les sujets ayant une carence en glutathion (en cas de jeûne, d’insuffisance hépatique ou de dépendance à l’alcool), le paracétamol présente une toxicité à dose plus faible.
Pour un bon usage du paracétamol.
Le dossier pharmaceutique, qui compile les médicaments de prescriptions et ceux obtenus sans ordonnance, est un moyen pour le pharmacien d’évaluer le risque de surdosage en paracétamol. Les posologies doivent être répétées à chaque vente. La prise de paracétamol (à dose maximale) doit être prudente chez les sujets sous anticoagulants oraux.
L’IBUPROFÈNE, UN ANTI-INFLAMMATOIRE SANS ORDONNANCE
Avec l’aspirine, l’ibuprofène est le seul anti-inflammatoire non stéroïdien à être disponible sans ordonnance. Dérivé de l’acide phénylpropionique, il inhibe la synthèse des prostaglandines. Antalgique, anti-inflammatoire et antipyrétique, son utilisation est contre-indiquée au-delà du cinquième mois de grossesse, en cas d’ulcère gastroduodénal, d’allergie ou d’asthme allergique à l’ibuprofène ou à un autre AINS, d’antécédents hémorragiques ou de lupus érythémateux disséminé, et en cas d’insuffisance hépatique, rénale ou cardiaque. En raison du risque grave de complication infectieuse des lésions cutanées, son utilisation est à éviter chez l’enfant en cas de varicelle. En outre, son utilisation chez les sujets sous anticoagulants oraux nécessite une surveillance particulière. L’association avec d’autres AINS est inutile du fait de la potentialisation des effets secondaires.
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