Décidément, les années se suivent et se ressemblent pour les acteurs de la chaîne du médicament. Les comptes sociaux sont toujours dans le rouge, et ce sont ces acteurs qui vont à nouveau contribuer, pour la plus grande part, aux mesures d’économies décidées par les pouvoirs publics.
En effet, le déficit de la branche maladie du régime général de la Sécurité sociale, qui devrait s’élever à 7,4 milliards d’euros en 2015, pourrait atteindre 10 milliards d’euros en 2016 selon les travaux de la Commission des comptes de la Sécurité sociale, et ceci avant l’application des mesures d’économies prévues par le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2016.
Or le dernier PLFSS, présenté il y a quelques semaines par la ministre de la Santé Marisol Touraine et actuellement en débat au Parlement, table, pour 2016, sur un déficit ramené à 6 milliards d’euros, au prix d’un nouveau plan d’économies drastique de 3,4 milliards d’euros sur l’assurance-maladie, et avec un objectif national de dépenses d’assurance-maladie – ONDAM – de 1,75 % seulement, au lieu de 2,1 % en 2015. Et il est prévu pour cela, dans ce PLFSS, 1,065 milliard d’euros d’économies sur les produits de santé, dont 550 millions sur les prix des médicaments, 435 millions par le développement des génériques, 30 millions par l’usage de médicaments biosimilaires et 50 millions sur les tarifs des dispositifs médicaux.
Ce PLFSS 2016 va donc une nouvelle fois impacter très fortement la chaîne du médicament, et notamment les pharmaciens. « Ces mesures d’économies sont les mêmes que pour 2015, constate Philippe Besset. Les conséquences pour les officines, déjà connues cette année, seront donc rigoureusement identiques en 2016. Et il y a fort à parier que cette situation se renouvellera en 2017. C’est une période extrêmement difficile pour la chaîne du médicament. »
Médicament : la moitié des économies
Autre constat : si l’on observe la répartition des différents postes de l’ONDAM pour 2015, on s’aperçoit que les pouvoirs publics réalisent en fait 50 % des économies sur les dépenses de médicament, alors que celles-ci ne représentent elles-mêmes que 11,30 % des dépenses de l’assurance-maladie. Mieux encore, à l’intérieur de l’ONDAM, la part des dépenses de médicament remboursable est en baisse constante depuis dix ans : 14,05 % en 2006, contre 11,30 %, donc, en 2015. En bref, on fait aujourd’hui supporter la moitié des économies de l’ONDAM sur le poste médicaments, qui représente lui-même une part de dépenses en baisse depuis de nombreuses années.
À noter aussi à propos de l’ONDAM que la part du médicament rétrocédé par l’hôpital en ville (rétrocession hospitalière) a fortement augmenté depuis 2013, en raison essentiellement des nouveaux traitements liés à l’hépatite C. Et que, plus généralement, l’évolution des dépenses de médicaments remboursés, qui s’élève au total à 19,4 milliards d’euros en 2014, a été très marquée par la progression des dépenses de traitement contre l’hépatite C. « Mais on inclut dans les dépenses de médicaments de ville un traitement qui est prescrit et dispensé à l’hôpital », s’insurge Philippe Besset.
L’ONDAM, toutefois, est seulement un objectif de dépenses d’assurance-maladie voté chaque année par le Parlement. Le constat sur la place du médicament dans les dépenses de santé peut aussi être fait en suivant les comptes présentés par la Commission des comptes de la santé (CCS), autrement dit la Consommation de soins et de biens médicaux (CSBM). Ces chiffres répertoriés par l’INSEE suivent la réalisation des objectifs de l’ONDAM et permettent de voir quelle est la contribution de chaque acteur aux dépenses totales de santé. Ils montrent que, si en 2014 la contribution du médicament à la progression des dépenses a en effet été positive (en raison des traitements liés à l’hépatite C), le seul acteur qui a, au contraire, contribué négativement aux dépenses de santé pour les années 2012 et 2013 a été le médicament.
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