LA MAUVAISE observance médicamenteuse d’un malade chronique, qui concernerait 50 % des affections selon certaines études, peut avoir des conséquences très lourdes. Aussi, le changement de traitement chez un malade chronique, y compris une simple substitution générique, constitue-t-il un risque de mauvaise observance. En effet, la substitution d’un princeps au générique ou d’un générique à un autre, signifie le remplacement d’un traitement parfois ancien, considéré jusque-là comme efficace et bien toléré. Bien accompagner le patient lors d’une substitution est donc primordial. Il faudra lui faire comprendre l’intérêt du changement, le faire accepter ce changement et le rassurer sur son innocuité.
« On m’a dit de ne surtout pas changer de générique »
Certains médicaments destinés aux maladies chroniques, comme les antiépileptiques, le fentanyl et la lévothyroxine, suscitent encore quelques interrogations. Des recommandations supplémentaires accompagnent ainsi leur substitution (princeps au générique, générique à un autre générique ou générique au princeps).
D’abord, une vigilance accrue est préconisée par l’ANSM lors de la substitution d’un antiépileptique. Ceci fait suite à la démarche d’évaluation de 2007 initiée à la suite des préoccupations dont ont fait part certains soignants et la ligue française contre l’épilepsie. En effet, s’il n’a pas été démontré de relation entre la substitution et le déséquilibre de la pathologie épileptique, le rôle potentiellement favorisant des situations anxiogènes dans la survenue de crise a été pris en compte. L’AFSSAPS a ainsi demandé aux prescripteurs de s’assurer que leur utilisation ne susciterait pas d’anxiété particulière (possibilité de s’opposer à la substitution par la mention NS le cas échéant). De même elle a invité le pharmacien à s’abstenir de substituer en cas de réticences ou de craintes de la part du patient.
Le fentanyl a aussi fait l’objet de mises en garde lors de la substitution (surveillance accrue), du fait de sa marge thérapeutique étroite et des variations interindividuelles qui peuvent survenir chez certains patients (patients âgés, enfants) ou dans certaines situations (patient fébrile) et afin de prévenir tout risque de surdosage ou de sous-dosage.
Enfin, l’ANSM a aussi formulé des recommandations sur la lévothyroxine : il est demandé aux prescripteurs, en cas de substitution, de surveiller l’équilibre thérapeutique chez certains patients à risque (cancer thyroïdien, troubles cardio-vasculaires, femmes enceintes, enfants, sujets âgés) et lorsque l’équilibre thérapeutique a été particulièrement difficile à obtenir.
Le maintien de l’équilibre thérapeutique doit alors être confirmé par une évaluation clinique voire biologique si nécessaire (contrôle de la TSH réalisé entre 6 et 8 semaines après la substitution, et au cas par cas chez la femme enceinte), ceci en raison de la marge thérapeutique étroite et bien que la bioéquivalence entre le princeps et ses génériques ait été démontrée sur la base d’un intervalle d’équivalence resserré (90 à 111 % pour l’aire sous la courbe des concentrations plasmatiques mesurées entre 0 et 48 heures après la prise) à la place des 80 à 125 % habituels.
« Mon grand-père a pris deux fois le même médicament »
Les trois exemples précités démontrent l’intérêt de stabiliser le patient sur une seule marque de générique. De plus, non seulement cette stabilisation améliore la bonne observance mais elle limite aussi le risque d’erreurs. En effet, bien que peu d’erreurs aient été rapportées, le risque d’erreur lors de changements de marque de génériques est réel pour le patient : utilisation de deux génériques contenant le même principe actif avec risque d’augmentation d’effets iatrogènes, de surdosages et de toxicité nécessitant une hospitalisation. Ce risque est en partie dû à la variété des formes et des couleurs des présentations pour une molécule donnée. Au comptoir, lors d’une substitution, il est donc utile de montrer l’ancienne boîte et les comprimés correspondants et de comparer avec la nouvelle boîte et les nouveaux comprimés (la copie des caractères organoleptiques d’un médicament est désormais possible depuis la publication de la loi du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé).
Ansm, Lettres aux professionnels de santé, Substitution des dispositifs transdermiques à base de fentanyl, décembre 2008.
Ansm, Lettres aux professionnels de santé, Recommandations sur la substitution des spécialités à base de lévothyroxine sodique, mai 2010.
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