IL N’EST pas possible d’évoquer les maladies chroniques sans parler d’éducation thérapeutique du patient (ETP). L’objectif est d’aider le patient à s’impliquer dans le suivi de sa maladie, de la comprendre et de comprendre les traitements qui lui sont proposés. Qu’il s’agisse de cancer, d’asthme ou d’infection par le VIH, cette démarche doit amener vers une cohérence de discours entre les professionnels de santé qui encadrent le patient, et doit contribuer à améliorer la qualité de vie de ce dernier.
Dans un article paru en décembre 2009 dans le Bulletin de l’Ordre, Claude Dreux et Fabienne Blanchet soulignaient « le rôle essentiel du pharmacien en tant qu’éducateur, notamment lorsque les symptômes cliniques sont faibles ou nuls, afin que les patients comprennent l’importance d’un suivi au long cours des traitements ». Cette éducation thérapeutique du patient, que les auteurs précités qualifiaient à la fois d’« ardente obligation » et de « chance » pour la profession, a convaincu un certain nombre de confrères. Combien sont-ils et quel est leur profil ?
Identifier les forces vives.
Pour le savoir et réaliser une cartographie des ressources pharmaceutiques autour de l’ETP, une enquête électronique est en cours jusqu’au premier juin. Initiée par le groupe ETP de la société française de pharmacie clinique (SFPC), ce travail est une première étape pour favoriser le partage d’expériences et la mise en place d’outils adaptés à la pratique. « De nombreux pharmaciens participent à des dispositifs d’ETP labellisés par les ARS (agences régionales de santé). L’objectif premier de l’enquête que nous avons mise en place au sein de la SFPC est d’identifier ces forces vives, de comprendre comment ces confrères interviennent dans les dispositifs, avec quels autres professionnels de santé ils travaillent, et dans quels domaines. Les résultats doivent nous permettre de caractériser la multidisciplinarité, fondement de l’ETP », explique Benoît Allenet (1), pharmacien enseignant-chercheur à l’UFR de pharmacie de Grenoble et responsable de l’enquête. Un travail de recensement avait été réalisé en Rhône-Alpes il y a environ six ans, lequel avait ainsi permis de recueillir des données sur les équipes intervenant dans les dispositifs éducatifs, sur les niveaux de compétence des intervenants, et sur l’organisation de chaque profession au sein de ces groupes. « Nous avions alors observé une grande implication des pharmaciens, des hospitaliers ou des officinaux. Après ce premier travail, il nous (NDLR, le groupe ETP) a semblé intéressant d’évaluer cette représentativité des pratiques pharmaceutiques en ETP au niveau national », précise l’enseignant chercheur grenoblois.
Se rapprocher des sociétés savantes.
Les résultats de cette enquête inédite sont attendus pour septembre prochain. Il est trop tôt pour dégager des tendances, mais sans aucun doute, les données recueillies intéresseront les instances représentatives de la profession et les autorités de santé. Elles pourraient d’ailleurs réserver des surprises, notamment sur le rôle du pharmacien dans les dispositifs d’ETP, comme le subodore Benoît Allenet : « J’ai hâte de connaître le nombre de dispositifs dans lesquels les pharmaciens sont pilotes. L’expérience en région Rhône-Alpes montre que le pharmacien est assez souvent à l’initiative de cette démarche ».
L’enquête de la SFPC n’est que la partie émergente de l’iceberg et ce travail préalable de recension, bien au-delà d’un simple inventaire, doit permettre au groupe de travail ETP d’élaborer et d’adapter des outils spécifiques, des méthodes et des plans de formations. Un chantier qui s’étalera sur plusieurs années, comme l’explique Benoît Allenet : « En déterminant où en sont nos confrères, nous serons en mesure de leur proposer des référentiels de formation adaptés à leurs besoins ».
L’autre but est de stimuler les échanges et la création de réseaux, notamment avec les grou-pes ETP des autres sociétés savantes : « Le rapprochement de la SFPC avec les autres sociétés savantes contribuera à met-tre en relation des pharmaciens avec d’autres professions médicales ou paramédicales dans un domaine d’intervention bien précis. La pratique éducative s’inscrit dans une pratique spécialisée nécessitant d’approfondir son expertise, ce qui peut paraître nouveau pour les pharmaciens officinaux ». Les résultats de l’enquête permettront à la SFPC de faire de nouvelles propositions pour renforcer l’engagement des pharmaciens dans l’ETP, comme par exemple l’intégration de la formation de base en ETP (niveau 1 selon les recommandations de la HAS) dans la formation universitaire.
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