Les chiffres définitifs devraient être communiqués dans les prochains jours par les cabinets d’expertise comptable. Pour autant, en janvier, tout en précisant qu’il était « encore trop tôt pour porter un jugement définitif car bon nombre d’officines clôturent leurs comptes à l’année civile », Fiducial relevait une évolution négative de la rémunération de l’officine en 2018 (« le Quotidien » du 24 janvier).
« Sur l’ensemble de l’année, la baisse est de -0,62 % pour ce qui est de la marge commerciale et de -0,35 % pour la marge brute, déclarait Christian Nouvel, de Fiducial. Sur la marge brute, la perte moyenne en valeur absolue sur notre population est de 4 000 euros par pharmacie. » Ce qui représente une perte d’environ 90 millions d’euros pour l’ensemble du réseau. Un chiffre qui s’approche des estimations avancées par la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). « En considérant l’impact global des mesures qui touchent l’officine, le manque à gagner pour 2018 avoisine les 100 millions d’euros », évalue ainsi son président, Philippe Gaertner.
La marge stabilisée
L’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) dit pour sa part être étonnée « de l’instrumentalisation de l’étude de Fiducial qui fait porter à la réforme de 2018 les pertes de 2017, alors que la modification de la marge n’avait pas encore débuté ». Selon le président de l’USPO, Gilles Bonnefond, « les autres cabinets comptables reconnaissent déjà l’effet de stabilisation de la marge 2018 ». Chiffres de l’étude IQVIA à l’appui, il affirme que la première étape du nouveau mode de rémunération prévu par l’avenant n° 11 qu’il a signé en juillet 2017 avec l’assurance-maladie porte ses fruits. En effet, la marge brute est stabilisée et la réforme a permis à chaque officine de sauvegarder 4,9 % de sa rémunération, explique-t-il à l’occasion des 11e Rencontres de l’USPO qui se sont déroulées fin janvier. Sans l’avenant n° 11, en moyenne, une pharmacie aurait subi une inflexion de son revenu de l’ordre de 5 150 euros, assure le syndicat. À l’échelle du réseau officinal, les scénarios dégagent un différentiel de 113 millions d’euros, selon qu'ils tiennent compte ou non de la réforme. Au total, pour 2018, la baisse de la rémunération est contenue à 15,71 millions d’euros alors que la perte dépassait les 170 millions d’euros en 2017. « Nous sommes sortis de la spirale mais sommes encore dans le négatif », souligne Gilles Bonnefond. Dans un entretien avec « le Quotidien » (notre édition du 28 janvier), le président de l’USPO augure qu’avec l’arrivée des nouveaux honoraires, « la réforme sera encore plus protectrice vis-à-vis des baisses de prix et permettra d’identifier le travail du pharmacien qui était jusque-là invisible ».
Un investissement insuffisant
La FSPF ne conteste pas le niveau de la baisse, même si elle évalue plutôt à environ 25 millions d’euros en 2018 la perte de rémunération réglementée, c’est-à-dire la marge réalisée sur le médicament présenté au remboursement, sans les remises. Non, le problème pour le syndicat est que le compte n’y est pas. « Avec une rémunération réglementée en baisse de plus de 25 millions d’euros en 2018, ces données confirment que les 70 millions d’euros promis par l’assurance-maladie lors de la signature de cet avenant ne sont pas au rendez-vous », insiste Philippe Gaertner. Le président de la FSPF ne remet d’ailleurs pas en cause le fait que la modification de la MDL en vigueur en 2018 apporte bien 70 millions d’euros au réseau. Mais, pour lui, ces résultats montrent que, comme il le craignait, ce montant est largement insuffisant pour compenser les baisses de prix et l’augmentation des charges.
« Pour réussir la première étape de la réforme, l’accord conventionnel avec l’assurance-maladie a prévu 70 millions d’euros en 2018, rétorque Gilles Bonnefond. Comme elle l’a indiqué lors des négociations auxquelles ont participé les deux syndicats, il n’a jamais été question de compenser l’intégralité des baisses de volumes et de prix et d’ajouter 70 millions d’euros en plus. » Quoi qu’il en soit, pour de nombreux observateurs, ce n’est que dans deux ans, au terme de la réforme prévue par l’avenant n° 11, qu’un bilan pourra être tiré.
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