Certes, le marché du médicament conseil n’est pas au mieux de sa forme. Selon le GERS, les neuf premiers mois de l’année affichent un recul de 3 % en unités et 5 % en valeur. Comme la plupart des autres marchés de la santé, un bond avait été enregistré entre fin février et fin mars, marquant un comportement d’écureuil prévoyant de la part des Français juste avant d’entrer dans le dur de la crise, avec un pic culminant pour la semaine du 16 au 22 mars, première semaine de confinement : +128 % en unités et + 74 % en chiffre d’affaires (sell out des officines).
« Entre mars et août, les pharmacies ont reçu environ 130 millions de visites. On note un nombre de dispensations de médicaments à prescription médicale facultative (PMF) en baisse importante, ce qui correspond aussi à une forte baisse des prescriptions sur la période, environ 1 million de moins », détaille Christophe de la Fouchardière, président de l’AFIPA. En revanche, les marchés des dispositifs médicaux non remboursés et des compléments alimentaires s’en sortent relativement bien, en particulier dans des catégories comme le stress, le sommeil ou l’immunité. « C’est donc une évolution contrastée », note-t-il, en se réjouissant, d’une part, que « 27 % des patients ont privilégié la visite à la pharmacie plutôt que d’aller chez le médecin » et, d’autre part, d’un net transfert des achats santé et bien-être « des centres commerciaux vers les petites et moyennes pharmacies ».
Quatre pistes pour rebondir
Fort de ces constats, Christophe de la Fouchardière liste quatre pistes pour permettre à l’officine de rebondir après la crise. D’abord faire de la pharmacie un « centre de santé et de bien-être de proximité pour offrir des solutions adaptées à l’ensemble des patients », dont le conseil officinal serait la clé avec l’inscription systématique au dossier pharmaceutique (DP) de tous les médicaments de PMF et de tout complément alimentaire ou dispositif médical que le pharmacien juge pertinent. Il recommande aussi aux pharmaciens de miser sur ces deux catégories de produits (DM et compléments alimentaires), en croissance constante depuis plusieurs années et qui ont su résister à la crise, ainsi que sur les familles de médicaments qui s’en sont le mieux sortis ces derniers mois, tel le sevrage tabagique. Enfin, il estime que le pharmacien doit travailler la fidélisation de la patientèle qui a changé ses habitudes et préféré sa pharmacie de quartier à la grande surface pendant la crise. « La question des produits de santé de premier recours est intrinsèquement liée au pharmacien comme porte d’entrée dans le système de santé. C’est pourquoi nous nous battons, aux côtés des organisations représentatives des pharmaciens, pour faire reconnaître la place essentielle des officines dans le traitement des maux quotidiens et des pathologies bénignes. »
Argument choc
Concrètement, l’AFIPA promeut un parcours de soins officinal comme l’une des portes d’entrée du système de santé. Un parcours basé sur une formation renforcée des pharmaciens sur les molécules et la mise à disposition d’arbres décisionnels pour homogénéiser et sécuriser la réponse d’une pharmacie à l’autre. « Ce parcours devra garantir la liberté pour le pharmacien de choisir le produit ou la marque qu’il souhaite délivrer à son patient et de fixer ses prix sans l’intervention d’une autre partie prenante », précise Christophe de la Fouchardière.
Par ailleurs, l’AFIPA appelle de ses vœux des délistages, affirmant que si le marché de l’automédication est en berne, c’est aussi parce que plusieurs (re)listages ont eu lieu ces dernières années, et parce que le rayon libre accès s’est aussi appauvri. Or, si la France décidait de délister l’équivalent des molécules déjà délistées en Europe, l’économie annuelle pour l’assurance-maladie s’élèverait « à peu près à 1,5 milliard d’euros ». Un argument choc, mais qui a peu de prise sur les décisions de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), à l’origine des relistages et restrictions du libre accès dans un but de sécurisation renforcée autour des médicaments. L’AFIPA souhaite néanmoins aborder ce sujet en concertation « avec les syndicats et les groupements de pharmaciens » pour être « force de proposition ».
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