UNE DOUCHE FROIDE ! « Alors que la loi hôpital, patient, santé et territoire (HPST), promulguée l’été dernier, avait été perçue comme un tournant fondamental dans l’exercice officinal, l’amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) 2010, destiné à favoriser la création de pharmacies à usage intérieure (PUI) dans le cadre des groupements sanitaires, a été ressentie comme un véritable coup de poignard par toute la profession », explique Gilles Bonnefond, président délégué de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO).
Une mesure d’autant plus « incompréhensible », selon Philippe Gaertner, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), qu’elle a été prise juste avant l’intégration expérimentale des médicaments dans les forfaits de soins de quelques 285 établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Conséquence : « les règles du jeu ont été totalement faussées ». Et le message : complètement brouillé car « L’expérimentation avait pour objectif de démontrer l’intérêt de la fonction de pharmacien référent pour un EHPAD », l’une des huit missions issues de l’article 38 de la loi HPST.
Une coordination nécessaire.
L’expérimentation apparaît donc aujourd’hui d’autant plus décalée que ces huit missions viennent tout juste d’être inscrites dans le code la santé publique (CSP). Des missions étroitement liées à la notion même de coordination des soins et qui « consacrent la place centrale des officinaux dans le parcours de soins », explique encore Gilles Bonnefond. Une place qui paraît essentielle car « il est inconcevable de vouloir couler dans un même moule, des personnes âgées et, par nature, différentes, puisque souffrant de polypathologies », rappelle Philippe Gaertner.
D’où l’intérêt de mettre en place une véritable coordination des soins entre médecin prescripteur et pharmacien référent. Comment dès lors faire la preuve de l’utilité du pharmacien référent, si les médicaments sont intégrés aux forfaits de soins ? « En instaurant des objectifs à la fois qualitatifs et économiques qui permettront de ressortir le poste médicament du budget des EHPAD », estime le président délégué de l’USPO. À défaut, médecins traitants et pharmaciens d’officines risquent fort d’être « écartés des maisons de retraite au profit de professionnels de santé salariés », précise encore Gilles Bonnefond.
Égalité d’accès aux soins.
Une perspective inconcevable pour la FSPF qui craint, pour les patients, une rupture d’égalité d’accès aux soins. « Le coût de certains traitements, tels que les médicaments contre la maladie d’Alzheimer, risque fort d’inciter certains gestionnaires d’EHPAD à sélectionner leurs pensionnaires », dénonce ainsi Philippe Gaertner. Pour preuve : l’enquête réalisée par la FSPF et le rapport de l’IGAS ont clairement mis en évidence une différence de 1,05 euro selon que le patient était pris en charge à son domicile ou dans le cadre d’un EHPAD. D’où l’idée de créer une « liste en sus » des médicaments onéreux n’entrant pas dans le champ du forfait.
Outre ce risque d’inégalité sociale, la FSPF perçoit la forfaitisation du budget médicament comme un risque économique sérieux pour les pharmacies. « L’approvisionnement des maisons de retraites représente un budget d’environ 600 millions d’euros pour quelque 4 000 officines qui y réalisent entre 10 % et 15 % de leur chiffre d’affaires », rappelle ainsi Philippe Gaertner. Un montant non négligeable pour des pharmacies qui génèrent, en moyenne, 1,5 million d’euros de chiffre d’affaires. Surtout à l’heure où l’économie de l’officine est mise à mal.
Une convention type attendue.
Outre le risque de voir cette manne s’envoler, les pharmaciens déplorent également un certain nombre de dysfonctionnements. Des retards de paiement ont ainsi été relevés. Sans oublier les pressions pour faire baisser les prix. Pire ! « Des pratiques douteuses, tel l’abandon de la rémunération due au titre de la fonction de pharmacien référent, ont été répertoriées, déplore Philippe Gaertner, avant d’ajouter, un titulaire s’est même vu proposer de reverser aux bonnes œuvres de l’EHPAD les indemnités qu’il avait perçues ». Autant de pratiques illégales qui devraient disparaître avec la publication de l’arrêté définissant une convention type entre les officines et les EHPAD. Un soulagement désormais proche pour des officinaux qui attendent depuis plus de trois ans, ce texte.
À l’instar du combat qu’ils ont mené lors de la discussion de la loi HPST, les représentants de la profession semblent donc décidés à se battre jusqu’au bout pour inverser une situation qui semble aussi défavorable aux patients qu’aux pharmaciens. Le temps leur est cependant compté. L’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) doit en effet remettre son rapport d’ici à la fin août, et le gouvernement, présenter le sien aux parlementaires avant le 1er octobre 2010 afin que la mesure entre en application le 1er janvier prochain.
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