Les hautes technologies s’intéressent de près à l’observance des traitements et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’une certaine effervescence agite l’offre en matière de piluliers intelligents. Les prestataires viennent de toutes parts, des grands laboratoires pharmaceutiques jusqu’aux start-up inconnues, et les produits proposés ont des formes et des fonctions diverses.
Beaucoup se présentent sous forme de plateaux d’alvéoles, comme le futur Do-Pill de Pharmagest ou le Sivan de Medsecure, d’autres ont fait le choix d’un carrousel, comme la société Ithaq, où chaque dose préparée à l’avance, sort au moment opportun après rotation du panier interne, ou encore d’un boîtier rond dans lequel sont insérées des pochettes contenant chaque dose de médicaments délivrées au moment adéquat à l’image de la e box de Robotik, ou même des boîtiers qui peuvent s’insérer dans une coque de smartphone comme le fait Sanofi qui lui ajoute une application mobile, Get well kit.
Ces exemples concernent des produits commercialisés en France ou sur le point de l’être. Ils évoquent tout l’éventail des piluliers intelligents disponibles, dans l’Hexagone ou à l’étranger. Aux États-Unis par exemple, la société Vitality commercialise les Glowcaps, qui sont des capsules que l’on peut mettre sur les boîtes et tubes de médicaments, et jouent de la musique au moment de la prise : si le patient ne prend pas son médicament, elle envoie un SMS. Certains projets vont encore plus loin. Des laboratoires travaillent sur des capteurs insérés dans les gélules capables d’envoyer un signal une fois dans l’estomac du patient ! Une solution extrême !
L’embarras du choix.
Le patient a, et aura donc, l’embarras du choix et chacun choisira la formule qui lui conviendra le mieux. Mais au-delà de l’ergonomie de la solution, ce qui fait l’efficacité d’un pilulier intelligent, c’est son intelligence, c’est-à-dire sa capacité à alerter le mieux et le plus rapidement possible qui de droit.
Un certain nombre de produits se contentent d’alerter juste le patient, c’est le cas par exemple du Medivib de la société Ithaq, un boîtier arrondi que l’on peut garder sur soi et qui vibre au moment de la prise, fait pour les personnes actives et mobiles qui doivent suivre un traitement précis. D’autres sont plus adaptés à des patients âgés victimes de pathologies plus lourdes auquel cas il est nécessaire de les mettre en lien avec des professionnels de santé et des proches, si malgré les différents signaux sonores et visuels qui s’activent au bon moment, la prise n’a pas été faite. C’est là que le choix de la technologie peut s’avérer décisif.
Certains prestataires ont pris en compte la nécessité d’avoir le système le plus simple et la plus efficace possible afin de ne pas forcer les patients à s’équiper de WiFi par exemple. C’est ainsi que Pharmagest et Medsecure ont fait le choix de se baser sur la couverture GPRS de l’Hexagone, considérée comme la plus complète. « L’information est envoyée à un serveur centralisé », explique Jérôme Lapray, responsable marketing de Pharmagest. « Et cela, quel que soit le type de réseau utilisé, Bouygues, Orange, SFR », ajoute Chantal Hayat, présidente de Medsecure.
Des technologies adaptées notamment aux personnes âgées, soumises à plusieurs traitements et parfois en bute à des difficultés motrices. Robotik, pour sa part, possède une plate forme logicielle, Eurêka, utilisée pour de nombreuses tâches et produits, dont le pilulier intelligent e Box.
En cas de problème détecté, un message d’alerte est envoyé par SMS aux personnes désignées (aidants, infirmière). La distribution peut être réinitialisée à distance après contact avec le patient, en cas d’erreur due à un retard de prise.
Ithaq, de son côté, a prévu la possibilité de recourir à une infrastructure de téléassistance pour son produit Carrousel, conçu notamment pour les patients atteints de pathologies invalidantes (Alzheimer, Parkinson etc…) ou plus simplement un module GSM pour la gestion à distance des alarmes et de la programmation des prises. Les technologies offrent une large gamme de possibilités, entre le WiFi, bluetooth, voire NFC (les puces radio fréquence contenues dans les smartphones notamment) ou la RFID, pour que l’intelligence et la communication des piluliers s’adaptent à la diversité des patients et de leurs situations.
Programmation en ligne.
Ces piluliers intelligents doivent aussi s’adresser aux professionnels de santé qui ont un rôle à jouer en amont, la préparation des piluliers ou en aval, leur sollicitation éventuelle quand une prise de médicaments n’a pas été effectuée. Au premier rang desquels figurent les pharmaciens. La plupart des piluliers intelligents sont conçus pour contenir jusqu’à 28 jours de traitement, au-delà, il faut les réalimenter. « Les pharmaciens préparent déjà les systèmes de piluliers classiques, observe Jérôme Lapray, ils ont les compétences pour manipuler les médicaments, assurent déjà leur déconditionnement pour les EHPAD. » Rien de plus normal donc de penser qu’ils sont et seront des acteurs à part entière dans l’usage quotidien des piluliers intelligents.
Ce n’est pourtant pas le cas, observe Chantal Hayat. « Ce sont les professionnels les mieux placés dans le domaine de l’observance, mais nous constatons en réalité une réticence dès lors que nous abordons avec eux le sujet de la programmation des piluliers qui dans notre solution se fait en ligne sur notre site Internet », explique-t-elle. Cette réticence conduit les prestataires à chercher le soutien d’autres professionnels de santé, comme les infirmiers libéraux, qui selon Chantal Hayat, se montrent intéressés. Et pour l’instant, beaucoup de modèles de piluliers intelligents se vendent en ligne directement auprès des usagers tandis que des enseignes commercialisant des objets connectés lorgnent également vers ce type de produits.
La réticence des pharmaciens pourrait expliquer au moins partiellement pourquoi le marché des piluliers tarde à démarrer en France, contrairement à ce qui se passe dans certains pays Anglo saxons ou au Japon par exemple. Mais cela ne saurait être la seule. Peut-être faut-il aussi considérer les tarifs proposés et le fait que les produits ne sont toujours par remboursés par l’Assurance-maladie. Un pilulier comme le Carrousel est proposé à un peu moins de 200 euros, d’autres sont disponibles sous forme d’abonnement mensuel. Les prestataires cherchent des solutions pour en amoindrir le coût, ainsi Medsecure a-t-il obtenu un agrément « service à la personne », ce qui permet à ses clients d’obtenir un abattement de 50 % sur le montant de l’abonnement. Ce n’est pas par hasard n’ont plus si Ithaq a décidé de travailler avec les conseils généraux pour créer des plates-formes d’assistance, ces collectivités locales ont la possibilité d’affecter des budgets pour les personnes âgées.
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