LES LABORATOIRES pharmaceutiques ont toujours cherché à améliorer la galénique pour obtenir l’adhésion des patients et améliorer l’observance. Notamment en enrobant ou en aromatisant les molécules au goût déplaisant et en mettant au point des comprimés à libération prolongée. Les nouveaux modes d’administration visent, eux, à faire oublier (ou presque) le traitement.
L’essor des patchs.
Les timbres transdermiques sont de plus en plus utilisés, à commencer par les patchs à la nicotine, développés et popularisés dans les années quatre-vingt-dix. La raison de leur succès : ils sont adaptés au degré de la dépendance (7, 14 ou 21 mg/24 heures et 10, 15 ou 25 mg/16 heures) et ils limitent plus efficacement les symptômes du manque que les gommes et les pastilles en libérant la nicotine sans provoquer de pics : Nicopatch (Pierre-Fabre), Nicotinell (Novartis), Nicoretteskin (Johnson & Johnson). Les autres patchs sont moins couramment prescrits mais le plus souvent pour faciliter le traitement (en cas de problèmes de déglutition, de vomissements ou de diarrhées par exemple) et réduire les contraintes, les oublis ou les erreurs. À base de scopolamine contre le mal des transports : Scopoderm/72 heures (Novartis). À la trinitrine dans l’angine de poitrine : Cordipatch/24 heures (UCB Pharma), Diafusor/24 heures (Pierre-Fabre). Comme contraceptif : patch hebdomadaire Evra (Janssen-Cilag) et comme traitement hormonal substitutif à la ménopause : FemSeptcombi (Théramex). Contre les douleurs, à base d’anti-inflammatoire (Flector Tissugel, VoltarènePlast…), d’anesthésique local pour les douleurs neuropathiques périphériques, lidocaïne (Versatis de Grünenthal) ou capsaïcine (Qutenza d’Astellas Pharma), ou encore de dérivé morphinique, le fentanyl par voie systémique (Durogésic/72 heures de Janssen-Cilag…). Sont venus s’ajouter, il y a quelques années, un patch diffusant de la rivastigmine (Exelon/24 heures de Novartis) pour ralentir l’évolution des démences de type Alzheimer et un autre à base de rotigotine (Neupro/24 heures de Schwartz Pharma) pour limiter les symptômes de la maladie de Parkinson.
En fait, il existe plusieurs systèmes de patchs. Dans les patchs à matrice, les plus courants, la substance active est dissoute ou dispersée dans un polymère qui peut aussi servir d’adhésif. Certains modèles, les plus simples, laissent le principe actif, diffuser passivement à travers la peau. D’autres comportent une membrane qui contrôle sa libération et/ou un système multicouche permettant d’atteindre plus rapidement une concentration plasmatique efficace. On peut les couper, ce qui n’est pas le cas des patchs à réservoir. Ces derniers se composent d’une poche et d’une membrane polymérique semi-perméable à travers laquelle est libérée une substance en solution (liquide) ou en suspension (gel). Ils peuvent être facilement proposés sous différents dosages.
1 semaine à 3 ans.
Autre mode d’administration destiné à améliorer l’observance : l’injection hebdomadaire, mensuelle, trimestrielle, semestrielle voire annuelle. Par exemple, des injections intramusculaires de médroxyprogestérone (Depo Provera), réalisées tous les 3 mois par un médecin, une sage-femme ou une infirmière chez des femmes qui ne peuvent ou ne veulent pas s’astreindre à prendre la pilule (sans estrogène) à un rythme régulier et/ou ne peuvent pas utiliser d’autres méthodes contraceptives ; des injections sous-cutanées tous les 6 mois d’un anticorps monoclonal, le dénosumab (Prolia d’Amgen) pour les femmes ménopausées souffrant d’ostéoporose ou à haut risque, ou encore d’un bisphosphonate, l’acide zolédronique 5 mg en perfusion IV pour une durée d’un an (Aclasta de Novartis).
De nombreuses biothérapies, indiquées en cas de polyarthrite rhumatoïde, de spondylarthrite ankylosante, d’arthrite psoriasique, d’arthrite juvénile ou de maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI), sont aussi injectées en sous-cutané par les patients ou en perfusion IV en milieu hospitalier toutes les semaines ou deux semaines, chaque mois ou tous les trois mois : adalimumab (Humira), infliximab (Remicade), étanercept (Enbrel), golimumab (Simponi), ustekinumab (Stelara). Un antipsychotique prescrit en traitement d’entretien chez les schizophrènes, le palipéridone (Xéplion de Janssen-Cilag), est, quant à lui, injecté mensuellement en IM.
Grâce à un implant de la taille d’une allumette délivrant un progestatif inséré sous la peau pendant 3 ans (Nexplanon), l’éventail des moyens de contraception s’est élargi. Celui-ci convient aux femmes pour qui les contraceptifs estroprogestatifs sont contre-indiqués et ayant des difficultés d’observance.
Un antidiabétique en implant ?
Les recherches se poursuivent activement pour mettre au point d’autres traitements sous forme d’implants. Une entreprise française (Rhenovia Pharma) a ainsi mis au point un timbre numérique permettant d’administrer jusqu’à 7 médicaments, simultanément ou de façon séquentielle, grâce à un système électronique « embarqué » actionné à distance. Différentes maladies neurodégénératives (Alzheimer, Parkinson) pourraient bénéficier de cette nouvelle technologie qui doit cependant être encore miniaturisée. Aux États-Unis et au Japon, les recherches portent surtout sur des patchs capteurs, des sortes de « peaux électroniques » capables de mesurer des paramètres vitaux : pression artérielle, température, taux de cholestérol, glycémie… En attendant, un antidiabétique actuellement commercialisé en auto-injection, l’exénatide, pourrait être proposé en mini-pompe insérée sous la peau du ventre si les essais en cours (fin de phase III) se révélaient positifs. Cet implant (ITCA-650) permettrait alors de délivrer la molécule en continu pendant de longues périodes, jusqu’à une année entière, et devrait bouleverser la prise en charge du diabète de type 2.
Des médicaments en injections mensuelles, bimestrielles voire trimestrielles sont également en cours d’essais. Notamment des antirétroviraux dans le traitement du VIH (Conférence sur les rétrovirus et les infections opportunistes, mars 2014) et un anticorps monoclonal dans la migraine sévère (congrès de l’Académie américaine de neurologie, mai 2014). À suivre de près…
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