Généralement, la douleur cancéreuse associe une composante algique chronique à une composante aiguë transitoire, qui s’y superpose par séquences prévisibles et régulières ou induites, par exemple, par une mobilisation.
Douleur chronique
La douleur chronique, souvent appelée « basale », est relativement uniforme. Constituant un symptôme presque cardinal en cancérologie, elle est considérée comme chronique lorsqu’elle persiste malgré le traitement antitumoral (si elle dépend de la tumeur) ou depuis plus de trois à six mois (si elle en est indépendante).
Elle impose d’un traitement de fond, administré en continu et renouvelé à des moments précis de façon à anticiper la réapparition de la douleur - qui, en son absence, resurgira inéluctablement - ; une évaluation quantitative de l’intensité de la douleur mesurée grâce à une échelle spécifique (verbale, visuelle, etc.) suivie d’une prescription personnalisée constituent l’essentiel de la stratégie de prise en charge.
Le RCP des opioïdes antalgiques précise que ce traitement de fond correspond à au moins 60 mg/j de morphine orale, 25 µg/h de fentanyl transdermique, 30 mg/j d’oxycodone orale, 8 mg/j d’hydromorphone orale ou une dose équi-analgésique d’un autre opioïde pendant une durée d’au moins 1 semaine.
Accès douloureux paroxystiques
L’accès douloureux paroxystique (ADP) se définit comme l’augmentation subite et transitoire de la douleur basale d’intensité légère à modérée (sous couvert ou non d’un contrôle thérapeutique continu). Une douleur basale continûment sévère ne constitue pas un accès paroxystique : cette situation témoigne de son contrôle insuffisant.
La prévalence des ADP est comprise dans une fourchette allant de 24 % à 95 % des patients, avec une valeur moyenne de 65 %. Leur fréquence et leur durée varient : en moyenne, on compte entre 4 et 7 accès chaque jour, atteignant leur paroxysme algique en environ 3 minutes et durant entre 15 et 30 minutes. Ces pics sont à l’origine d’un handicap lié à la douleur et d’une détresse psychologique importante.
L’ADP peut survenir d’une façon spontanée, sans cause identifiable (accès idiopathiques : 20 % à 60 % des cas selon le type de cancer) mais, souvent (50 % à 60 % des cas), il est induit par des mouvements, par une toux, par la station debout, par un simple toucher ou encore par une distension organique (intestinale, vésicale). Ayant souvent la même localisation que la douleur basale, l’ADP peut toutefois avoir une origine physiologique différente (nociceptive et/ou neuropathique).
De même, L’ADP ne sera pas confondu avec un accès douloureux survenant en fin de dose du traitement continu qui, lui, justifie une adaptation du schéma d’administration de ce dernier (augmentation de la dose ou administration plus fréquente).
Le traitement des ADP ne remplace pas le traitement de fond mais il s’y associe. La survenue de plus de 4 accès par jour impose d’adapter le traitement de fond en en augmentant la dose. Deux types de problèmes peuvent toutefois s’observer :
- Si la posologie de base est suffisante pour traiter les ADP, elle peut être trop importante en phase intercritique (entre les accès) : elle expose alors inutilement le patient aux effets indésirables des opioïdes ;
- Si cette posologie n’est suffisante que pour prévenir la douleur basale, elle sera vraisemblablement insuffisante pour traiter les ADP : la qualité de vie du patient s’en trouvera altérée.
Les ADP ne peuvent donner lieu à une antalgie préventive, puisque leur survenue reste le plus souvent imprévisible : ils sont donc traités à la demande et, dans un tel contexte, il est évident que le médicament aura d’autant plus d’intérêt qu’il agira rapidement après sa prise. Les accès sont traités par voie orale par administration d’un opioïde à libération immédiate actif en environ une demi-heure (morphine : Actiskénan, Oramorph, Sévredol ; oxycodone : Oxynorm) mais, surtout, par voie transmuqueuse car l’action antalgique est obtenue bien plus rapidement. Le recours à la voie intraveineuse (bolus auto-administré par le patient), péridurale ou intrathécale n’est pas évoqué ici.
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