La bonne observance est un enjeu majeur de la prise en charge des malades atteints de pathologies chroniques. On assiste parfois à des rejets de traitements par les patients pourtant convaincus de la nécessité d’être traités. L’éducation thérapeutique du patient (ETP) peut leur permettre d’acquérir des connaissances pour mieux contrôler leur maladie et améliorer leur qualité de vie.
CERTES, la culture générale sur les médicaments a évolué, mais des croyances erronées ou irrationnelles persistent et, parfois, le patient conteste l’utilité relative de chaque médicament inscrit sur l’ordonnance, ce qui le conduit à faire « son marché » en fonction de ce qu’il croit être juste et bon pour lui. L’adhésion thérapeutique ne peut être obtenue que si le patient a admis et reconnu sa maladie et s’il a compris l’intérêt de son traitement au long cours. L’ETP est associée à des prises de décisions en rapport avec une pathologie, elle se différencie de l’éducation pour la santé liée à des comportements préventifs. L’ETP contribue à diminuer la morbidité, à ralentir l’évolution de la maladie et à améliorer l’observance. Sa pratique nécessite d’acquérir des compétences nouvelles aussi bien de la part des professionnels de santé que du malade. Celui-ci apprend à mieux gérer sa pathologie et devient, en quelque sorte, son propre médecin, et il gagne en autonomie. Un premier bilan permet de dégager les grands besoins d’information ressentis par les patients : connaître les causes et l’évolution de la maladie, comprendre la justification des traitements et apprendre le « maniement » des médicaments pour pouvoir les maîtriser. L’ETP n’est pas un nouveau métier, mais elle fait partie d’un parcours de soins pluridisciplinaires dans lequel le pharmacien de ville peut occuper une place stratégique. Il est non seulement un informateur et un conseiller, mais aussi un éducateur technique capable d’apprendre à son patient le maniement d’un aérosol ou l’automesure de la glycémie. Proche de son malade, il peut établir avec lui une relation privilégiée permettant la transmission de savoirs et d’un savoir-faire dans un langage simple, et il peut être également un médiateur auprès des autres professionnels de santé. Certains officinaux, bien formés, participent déjà activement à une véritable complémentarité dans l’ETP et on peut espérer dans l’avenir une implication encore plus grande de leur part.
Deux expériences pilotes pleines d’enseignement.
Dans la recherche objective de l’efficacité, deux exemples témoignent des progrès réalisés : ils soulignent les lacunes et les attentes des patients vis-à-vis de leur maladie et de leur traitement ; en même temps, ils confirment un début d’intégration et de positionnement des pharmaciens au sein des équipes soignantes. Les résultats de l’expérience « pharmaceutique » pilote menée dans les services hospitaliers du CHU de Nantes sur des transplantés thoraciques cœur-poumon sont encourageants, même si des évolutions sont nécessaires, explique le Dr David Feldman, pharmacien du CHU. « Nous essayons surtout de faire la promotion du bon usage des médicaments avec un focus sur leurs effets indésirables pour bien les maîtriser. Dans le cas qui nous occupe, l’observance des médicaments immunosuppresseurs est primordiale sinon c’est le rejet de la greffe et l’échec de la transplantation, et les malades doivent être conscients de l’enjeu. » Les sollicitations formulées par les patients portent sur l’apprentissage pratique des formes pharmaceutiques, en particulier les aérosols, les conduites à tenir en cas d’oubli de prise, les règles d’automédication, et les mesures hygiénodiététiques. Le malade exprime très librement ses problèmes d’inobservance avec le pharmacien.
La seconde expérience a été menée sur des insuffisants rénaux par les équipes de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (Paris). Les essais pilotes montrent que les diabétiques ignorent souvent le risque d’insuffisance rénale qui les menace. « Le défi est de leur en faire prendre conscience pour donner du sens à la prévention et changer leurs comportements », prévient le Dr Christine Fernandez, pharmacienne à l’hôpital. Les équipes de la Pitié-Salpêtrière ont établi un programme multidisciplinaire incluant des pharmaciens et des néphrologues de ville au sein d’un réseau de professionnels de santé hospitaliers. « Les principaux problèmes rencontrés auprès des patients sont une méconnaissance des examens de laboratoire et des bilans, une incapacité d’interprétation des résultats biologiques et cliniques, un manque de maîtrise des effets secondaires, et des facteurs de non-observance surtout si on leur laisse le choix de l’horaire de prise », détaille le Dr Fernandez. Les différentes interventions réalisées mettent l’accent sur les informations concernant la pathologie et ses conséquences, et les traitements. Elles concernent aussi le rituel de prise en l’intégrant dans la routine quotidienne pour améliorer l’observance ; le savoir-faire en cas d’oubli ou de changements imprévus ; les facteurs émotionnels en évitant un vécu alimentaire trop contraignant et qui peut avoir un impact négatif sur la qualité de vie.
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