LE QUOTIDIEN DU PHARMACIEN.- Quels sont, selon vous, les principaux critères de qualité qui doivent guider le choix d’un produit cosmétique ?
LAURENCE WITTNER.- La seule porte d’entrée efficace et fiable pour juger des qualités d’un cosmétique, c’est la liste des ingrédients. Elle est souvent dans un langage difficile à appréhender pour le grand public - la nomenclature officielle internationale -, mais pour un pharmacien elle ne doit pas poser de problème. Même si elle fait appel à l’anglais, à des noms latins ou brevetés, il est possible de retrouver, notamment sur internet, l’ensemble des correspondances. J’insiste là-dessus, c’est la seule porte d’entrée pour connaître un cosmétique, car tout le reste des informations portées sur l’étiquette est en langage commercial. Ce qui veut dire que ces données ne sont souvent ni exhaustives, ni très objectives. Tandis que la liste des ingrédients, se doit, elle, d’être exhaustive, avec une énumération des composants, des plus importants (en pourcentage) au début, au moins importants à la fin.
Quelles clés de lecture utilisez-vous pour interpréter les formules portées par les conditionnements ? Y a-t-il des ingrédients à éviter, d’autres qui sont garants de qualité ?
Pour des produits pour bébé, par exemple, il vaut mieux éviter les allergènes, les ingrédients très irritants, les libérateurs de formol, les perturbateurs endocriniens. Il y a toute une série d’ingrédients dont il faut se méfier. Les pharmaciens doivent apprendre à décrypter cette liste d’ingrédients qui éveillent la vigilance pour mieux les éviter dans certains cas. Parmi les ingrédients à éviter il existe plusieurs catégories : les allergisants connus tels les molécules aromatiques, certains conservateurs tels le caton CG, des allergènes émergents comme les hydrolysats de protéines de blé. Pour des raisons cette fois-ci toxicologiques il convient d’éviter les perturbateurs endocriniens ou les libérateurs de formol.
Quant au prix du produit, il ne garantit rien. Certains cosmétiques à 500 euros le pot ont certes une formule correcte, mais la matière première ne justifie pas le tarif. La justification du prix est plutôt à rechercher dans l’emballage de luxe, le marketing et le positionnement de la marque. En revanche, un produit très bon marché, ne contient probablement pas de matière première très noble. On y trouvera plutôt une base grasse dérivée du pétrole qu’une huile végétale.
La qualité d’un produit cosmétique n’est-elle pas, selon vous, aussi liée aux conditions de sa mise en vente ? Autrement dit, le conseil éventuellement apporté en pharmacie - plutôt qu’en GMS ou en VPC - n’est-il pas porteur d’une plus-value pour le produit ?
Selon moi, et pour tous les experts qui travaillent avec nous, un produit peut être de qualité, quel que soit le réseau dans lequel on le trouve. Pharmacie, parapharmacie, GMS, on peut trouver de bons cosmétiques partout. L’inverse est également vrai : on peut rencontrer des produits peu recommandables partout. Y compris en pharmacie… Il y a une seule chose que je ne recommande vraiment pas, ce serait d’acheter des produits sur internet fabriqués dans un pays hors CEE, USA et Canada. Car si la réglementation européenne sur les cosmétiques n’est certes pas parfaite, son haut niveau d’exigence est tout de même une garantie de qualité. Acheter sur le net un produit fabriqué en Inde ou en Chine qui n’a pas subi les contrôles d’importation sur la communauté européenne est vraiment à déconseiller.
Quant aux autres réseaux de distribution, il est clair que la GMS n’apporte aucun conseil lors de la vente, ni le réseau, ni les produits ne sont adaptés à une délivrance de qualité. En VPC, il peut parfois y avoir, sur les notices ou sur certains sites internet, des détails absents des étiquettes et quelques conseils et informations utiles. Il est évident qu’en ce domaine, un bon conseil apporté par un pharmacien est irremplaçable, sous réserve que celui-ci connaisse bien la cosmétique. Malheureusement, et cela ne va sans doute pas plaire à vos lecteurs, trop rares sont les officinaux soucieux de se former en dermocosmétique. La preuve ? Je vois trop souvent en pharmacie des produits qui ne devraient pas, selon moi, s’y trouver. C’est dommage, car le public a confiance en les pharmaciens. Et il a raison. J’incite vraiment les officinaux à s’investir dans une démarche de formation. D’abord parce qu’elle est intéressante en terme de culture professionnelle, mais également pour leur clientèle. Orienter les clients vers les bons produits, sélectionner des offres ciblées et sûres, voilà un rôle que les pharmaciens pourraient légitimement et utilement s’approprier.
Vous avez lancé il y a quelques mois un « Observatoire des cosmétiques » sur Internet. Ce site s’adresse-t-il aussi aux professionnels ?
Bien sûr ! Je veux leur dire d’ailleurs que s’ils ont des questions à poser, ils peuvent les poser à des experts, car sur le site existe un espace interactif dédié aux échanges. L’Observatoire des cosmétiques a d’abord été conçu pour s’adresser au grand public exclusivement, et puis on s’est rapidement rendu compte que parmi les abonnés, près de la moitié était des professionnels. Aujourd’hui, c’est une source d’information qui est ouverte à tous à la fois accessibles au plus grand nombre mais aussi suffisamment technique et argumenté et scientifiquement validé pour qu’un pharmacien y trouve son compte.
Quel crédit faut-il accorder aux labels revendiqués par les produits ?
On peut tout à fait avoir confiance dans un label à condition de savoir exactement ce qu’il garantit. Or là il y a une vraie confusion dans l’esprit du public sur ce que garantissent les labels. Un label bio, par exemple, garantit quoi ? Dans l’esprit du consommateur il garantit un produit sain pour la santé. Ce qui est faux. Le label bio garantit un certain pourcentage d’ingrédients d’origine biologique, un certain respect de l’environnement avec des process de fabrication qui relève de la chimie douce, et une liste d’ingrédients à éviter sur des critères environnementaux. Quand on sait cela et qu’on accorde de l’importance à ces critères-là, très bien. Mais si l’on cherche un produit ni allergisant, ni irritant, ni toxique pour la santé, le label bio ne sera pas une garantie. Il faut donc connaître les chartes des labels pour bien comprendre leur intérêt.
Comment les pharmaciens pourraient-ils, selon vous, améliorer leur rôle de conseil en dermocosmétique ?
Je pense que leur rôle pourrait être primordial, car le conseil en cosmétique, c’est chez eux qu’on va le chercher. En parfumerie on va chercher le maquillage qui tient bien et la dernière crème antirides prometteuse… Quand on a un vrai problème de peau, un bébé ou des besoins très particuliers de dermocosmétique, on s’oriente vers la pharmacie et nulle part ailleurs. Ils ont donc là un rôle à jouer, et à bien jouer. Le salut du pharmacien est, selon moi, dans la spécialisation. Dans ce contexte, les officines ont intérêt à développer un rayon cosmétique réellement pertinent orienté par la connaissance des produits.
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À paraître (septembre 2010) :
Les Meilleurs Cosmétiques 2011-2012.
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