Le Quotidien du pharmacien.- La santé fait partie des centres d'intérêt privilégiés de vos lecteurs. Comment le rapport des seniors à la maladie et aux traitements a-t-il évolué ces dernières années ?
Carole Renucci.- Aujourd'hui le patient est plus actif, sans doute parce qu'il est plus informé. Pas forcément mieux informé, toutefois. Il se positionne en tout cas davantage en acteur de sa santé. Ce qui ne veut pas dire qu'il adopte toujours le positionnement adéquat. Mais quoi qu'il en soit, on observe chez lui une volonté résolue de prendre en mains sa santé. Cette évolution est aussi fondée sur une certaine forme de défiance vis-à-vis des professionnels de santé. Et c'est là un sentiment que l'on ressent clairement. Nos lecteurs ont de plus en plus tendance à demander un deuxième avis, par exemple. Ce qui traduit également ce souhait d'une certaine maîtrise de sa santé. Les seniors ont pris la main, lorsqu'ils le peuvent, sur leur corps et ses aléas. Il faut toutefois noter une certaine inégalité liée à l'endroit où ils habitent, je pense notamment aux déserts médicaux où l'accès aux soins peut être limité…
Pour pouvoir profiter de la vie, les seniors ont compris qu'il fallait être en forme et en bonne santé. Voilà pourquoi nous les sentons très attentifs, voire captifs des messages que nous leur envoyons. Et c'est aussi pourquoi la presse santé marche bien. Après des titres comme « Top Santé » et « Santé Magazine », nous observons désormais l'éclosion de titres qui ont choisi de privilégier des angles un peu différents surfant sur la vague du bien-être et de ce qu'on appelle le « life style ». Il est désormais admis que la santé et la forme font partie de la vie et sont des facteurs à considérer pour vivre mieux et plus longtemps.
Avez-vous le sentiment que les seniors sont mieux informés, plus sceptiques ou au contraire plus observants par rapport aux médicaments ?
Il existe une défiance plus ou moins raisonnée à l'égard des médicaments. On l'a vu récemment avec l'affaire du Lévothyrox. On observe que les réactions à ces sujets sont quasiment épidermiques. L'emballement est très rapide. Un emballement qui peut être lié, comme dans le cas du Lévothyrox, à la qualité de la communication qui accompagne l'information sur le médicament.
Selon vous, les seniors sont-ils plus tentés qu'autrefois par les médecines dites parallèles ou alternatives ?
Oui, car dans le contexte que j'évoquais tout à l'heure, les seniors sont plus tentés qu'auparavant par les médecines dites alternatives. Notamment parce que, par rapport à leurs aînés, ils voient leurs parents vieillir, et constatent les limites de la Pharmacopée classique. Je pense par exemple au traitement de l'arthrose. Les remèdes sont multiples, mais il revient finalement à chacun de trouver ce qui va le soulager. Voilà le type de situation qui ouvre les seniors à d'autres options thérapeutiques que l'allopathie classique. Ces cinq dernières années, nous avons bien senti l'évolution de cette appétence aux alternatives à la médecine classique.
Et il ne faut pas voir dans ce mouvement le résultat d'une défiance absolue vis-à-vis de l'allopathie. Il y a là une nouvelle complémentarité qui est le fruit d'une recherche d'une composition personnalisée des traitements.
Les seniors ont-ils confiance dans leur pharmacien ?
Oui, je crois. C'est d'ailleurs ce qui nous a conduits à créer au sein de la nouvelle formule de « Notre temps » une page entièrement dédié au conseil du pharmacien (notre photo). À chaque fois, un pharmacien intervient pour y délivrer des conseils sur une plainte donnée et informer sur les nouveautés proposées par les officines. Pour notre lectorat, nous en sommes convaincus, le pharmacien est un interlocuteur de choix.
La prévention est-elle désormais une notion mieux comprise par les seniors, plus intégrée à leurs habitudes de soins ?
Absolument ! Les nombreuses campagnes véhiculées par les médias et par les professionnels de santé ont fait leur effet. Le message est bien passé parmi nos lecteurs qui savent désormais qu'ils vont vivre longtemps… pour peu qu'ils s'appliquent les préceptes portés par ces campagnes.
Pensez-vous que les seniors sont « mûrs » pour la santé connectée ?
Notre perception est la suivante : lorsque la santé connectée est ludique, par exemple avec les bracelets de monitoring, cela prend bien parmi les seniors. J'en veux pour preuve le succès de notre dernière campagne d'abonnement qui offrait en cadeau une montre connectée. L'intérêt de ces accessoires est bien intégré et rejoint la légitimité des messages de prévention dont nous parlions à l'instant. Sans compter que le port de ce type d'objet n'est pas trop discriminant puisqu'à 20 ans ou 50 ans on peut porter ces accessoires sans craindre la stigmatisation. En revanche, pour ce qui est des dispositifs un peu plus sophistiqués tels les appareils de mesure de la tension, cela interpellera les seniors dès lors qu'ils ont des parents concernés par ce type de surveillance. Pour les autres, l'intérêt sera moindre.
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