Ce fut une formation foudroyante et sauvage.
Mis au pied du mur par l’épidémie de Covid-19, médecins et patients n’ont eu d’autre choix que de recourir à la téléconsultation, qui pourtant suscitait inquiétudes et méfiance. « Avant, nous étions encore en phase d’évangélisation, il fallait convaincre, après, nous sommes passés sur de la pratique quotidienne », témoigne Alexandre Maisonneuve, cofondateur de Qare. « Tout le monde a compris désormais l’intérêt de la téléconsultation. » Les chiffres sont tout simplement stupéfiants, à la mesure qu’a été le choc de cette crise sanitaire : « en février, nous avions comme clients 4 000 médecins et 400 pharmaciens, deux mois plus tard nous en avions respectivement 18 000 et 1 500 », révèle Arnault Billy, directeur général de Maiia (ex Docavenue). Pour Médecin Direct, une des plus anciennes plateformes de téléconsultation en France, le flux de questions a été multiplié par 5, voire par 10, selon son président François Lescure, « dont 30 à 40 % étaient liées au Covid-19. » Cela ne s’est certes pas fait sans mal. Pour les prestataires d’abord, « il y a eu de l’émotion » affirme Arnault Billy avec un certain sens de la litote. Sur la période du confinement et pour absorber la demande en téléconsultation, les 150 collaborateurs de Maiia ont pu compter sur l’aide de 1000 collaborateurs issus de toutes les filiales de leur maison mère Cegedim. Pour les patients ensuite, dans certains cas, il y a eu des soucis d’interconnexion, notamment dans les régions où la couverture numérique est plus faible. Mais le résultat est là : « les gens nous ont dit, vous avez raison, c’est simple », affirme Arnaud Billy.
Mieux que pas de consultation du tout
Les médecins ont su très vite s’ajuster et facilement identifier quand il était possible de traiter un problème en téléconsultation et quand il fallait rediriger le patient vers les urgences. « Les médecins ont affirmé, après enquête, que 80 % des cas ont été résolus, un taux que nous avons retrouvé après la même enquête auprès des patients, cela signifie que seulement 20 % des cas n’ont pas été résolus », révèle François Lescure. Si un certain nombre de ces téléconsultations, 10 % pour Maiia, portait sur le Covid-19, la majeure partie concernait des pathologies chroniques, le diabète, les affections dermatologiques, l’endocrinologie… Les patients de leur côté ont réalisé que la téléconsultation, c’est mieux que pas de consultation du tout. Pour Alexandre Maisonneuve, on se dirige tout droit vers un monde où les modes de consultation vont alterner entre le présentiel et la téléconsultation. « Ce n’était pas clair dans l’esprit des gens, ça l’est désormais. » Ajoutons à cela un coup de pouce réglementaire, avec la levée de certaines restrictions, comme celles liées à la distance – puisqu’auparavant, on ne pouvait faire de téléconsultation qu’avec une exigence de territorialité. Sans doute faudra-t-il attendre la fin de la période Covid-19 pour savoir lesquelles de ces restrictions vont revenir ou pas, mais les prestataires semblent confiants.
Contradictions européennes, contraintes américaines
Est-ce que cet incroyable essor de la téléconsultation peut bénéficier aux Français qui voyagent à l’étranger ? En principe, oui, puisque la définition même du numérique est de s’affranchir des distances. Pas de souci technique donc, mais en revanche, des barrières réglementaires difficiles à lever empêchent son développement. Dans l’Union Européenne tout d’abord. « Il y a dans l’espace Schengen une directive qui impose la recevabilité de toute ordonnance », explique Alexandre Maisonneuve. Il faut dire que depuis l’étranger, toute téléconsultation se termine dans 60 % des cas par une ordonnance selon François Lescure. Mais parallèlement, chaque État reste souverain dans la gestion de la santé, d’où des contradictions. « Et notamment dans l’authentification des médecins, pour laquelle chaque État a sa propre réglementation, il faudrait un système d’authentification à l’échelle européenne », ajoute Alexandre Maisonneuve. Et dans certains pays, c’est particulièrement compliqué, notamment aux États-Unis où les pharmaciens ne peuvent recevoir d’ordonnance émanant d’autres États que le leur, sous peine de sanctions. « C’est plus simple en Asie et en Afrique », note cependant Alexandre Maisonneuve. Avec l’anglais et le français, il est possible de s’adapter à de nombreuses situations.
Un soutien avant, pendant et après le voyage
Difficile, ne signifie pas impossible pour autant. Outre les solutions qu’il y a à lever les barrières liées aux médicaments (voir encadré), on peut aussi s’informer et traiter auprès de plateformes qui ont travaillé sur le sujet de l’international, à l’image de Médecin Direct. Racheté l’année dernière par l’Américain Teladoc Health, implanté dans 135 pays, le spécialiste français a les moyens d’établir des relais avec les différentes filiales du groupe auquel il appartient désormais. Cela peut faciliter bien des contacts, même si en utilisant Google de façon adaptée, il est possible de trouver un médecin local parlant français. Mais pour François Lescure, le voyage à l’étranger, ce n’est pas seulement la capacité de contacter par téléconsultation ou non un médecin, c’est aussi préparer le voyage. « Nous constatons que de nombreux jeunes retraités partent facilement deux ou trois mois, or ils ont fréquemment des pathologies chroniques, d’où l’intérêt de préparer de façon personnalisée leur voyage, ce que notre plateforme est en mesure de faire, de même, nous pouvons aider pendant le voyage, mais aussi après le retour, qu’on a tendance à oublier, afin de réagir très vite en cas de symptômes d’une maladie contractée à l’étranger. »
Il reste pour les voyageurs à tenir compte de l’aspect assurance, une plateforme comme Médecin Direct travaille avec les complémentaires santé, les assureurs, les entreprises mais pas avec l’assurance-maladie. Maiia et Qare travaillent avec des médecins libéraux. Et donc peuvent permettre aux patients de bénéficier du remboursement de l’assurance-maladie.
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