La prise en charge d’une anémie repose sur l’administration d’érythropoïétine (EPO) à titre préventif ou curatif, pour réduire les besoins transfusionnels et/ou corriger les symptômes cliniques. Toutefois, avant tout traitement par EPO, il sera impératif de rechercher une carence éventuelle en fer ou en vitamine B12 pour la corriger. Une anémie sévère peut imposer le recours à une transfusion de culots globulaires.
Administration d’EPO. En stimulant l’érythropoïèse, le traitement par EPO induit une augmentation importante des besoins en fer. Le fer fixé sur la transferrine étant alors vite épuisé, le fer de réserve (ferritine) est dès lors mobilisé. Cette mobilisation est toutefois bien plus lente et, de ce fait, même lorsque les réserves de l’organisme sont quantitativement suffisantes, elles ne sont pas accessibles suffisamment rapidement pour satisfaire aux besoins d’une érythropoïèse accélérée. Il en résulte une carence fonctionnelle entraînant une diminution de la réponse érythrocytaire. L’observation d’une anémie persistante chez un patient traité par chimiothérapie et EPO peut donc être la conséquence d’un déficit en fer, fonctionnel ou absolu, résultant de l’accélération de l’érythropoïèse. L’utilisation d’EPO doit donc s’accompagner d’une supplémentation en fer si le coefficient de saturation de la transferrine est inférieur à 20 %.
Plusieurs EPO sont disponibles pour traiter l’anémie du patient sous chimiothérapie : EPO humaine recombinante = r-HuEPO (époétine a = Binocrit, Eprex ; époétine b = Néorecormon ; époétine thêta = Eporatio ; époétine zêta = Retacrit) ou analogue de l’EPO (darbepoétine a = Aranesp) qu’une demi-vie d’élimination prolongée permet d’injecter une seule fois par semaine (voire une toutes les trois semaines).
Supplémentation martiale. L’apport nutritionnel recommandé en fer est compris entre 10 mg et 20 mg par jour de fer élément, dont quelque 10 % sont absorbés : cet apport est suffisant pour compenser les pertes journalières physiologiques (1,5 à 3 mg chez la femme préménopausée au cycle menstruel normal, 1 mg chez l’homme). Plusieurs sels de fer peuvent être administrés pour restaurer les réserves par voie orale (le recours à la voie injectable reste exceptionnel) (ascorbate = Ascofer ; fumarate = Fumafer ; gluconate = Tot’Hema ; sodium férédétate = Ferrostrane ; succinate = Inofer ; sulfate = Tardyferon, Fero-Grad, Timoférol). La posologie journalière de fer élémentaire recommandée est de 150 à 200 mg par jour en 2 ou 3 prises, afin d’optimiser la tolérance. Le patient est prévenu que ses selles auront une coloration noire, et que des troubles digestifs peuvent survenir. L’absorption du fer au niveau du duodénum et du jéjunum proximal est facilitée et sa biodisponibilité est augmentée par une administration en dehors des repas ; la présence de certains acides organiques (lactates, pyruvates) susceptibles de chélater le fer. Une mauvaise tolérance de la supplémentation martiale doit faire fragmenter ou réduire les doses quotidiennes et faire administrer le traitement juste avant les repas, même si cela diminue la biodisponibilité.
L’efficacité du traitement, contrôlée par le suivi de l’augmentation du taux des réticulocytes, s’observe entre 7 jours et 10 jours après son initiation et/ou par l’augmentation du taux d’hémoglobine après environ un mois (elle varie de 2 g/dL à peu près). Une réponse insuffisante invite à s’assurer de la correcte observance du traitement ; il faut ensuite envisager la possibilité d’une déplétion en fer supérieure aux apports prescrits, évoquer un syndrome de malabsorption et enfin reconsidérer le diagnostic.
Apport en vitamine B12. L’administration de vitamine B12 par voie orale est réalisée par administration de doses allant jusqu’à 1 000 µg/j ; la voie parentérale est privilégiée en cas de malabsorption.
Apport en acide folique. L’administration d’acide folique (Speciafoldine, etc.) restaure si besoin les réserves nécessaires à une hématopoïèse normale. La dose journalière est de 1 mg. Le traitement est prolongé quatre mois pour normaliser les signes biologiques ; un traitement à long terme est recommandé en présence d’une hémolyse chronique, d’un syndrome de malabsorption réfractaire ou d’une myélofibrose.
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Quelques définitions
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Les mots du client
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Françoise Amouroux
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