PLUS QUE LES AUTRES malades chroniques, les diabétiques échangent beaucoup de trucs et d’astuces sur le web et se réunissent souvent. Sans doute parce qu’ils doivent « gérer » quotidiennement leur maladie, le plus précisément possible, et que cela n’est pas toujours facile. Mais, au final, tous ces échanges sont-ils bénéfiques ?
Forums : attention danger !
« Les « chats » et les réseaux sociaux sont intéressants dans le sens où il ne faut surtout pas rester seul avec son diabète. Les discussions et le partage d’expériences sont a priori productifs, mais chaque cas est différent et ce qui convient à l’un n’est pas automatiquement adapté à l’autre, or certains conseils sont des vrais diktats », répond Gérard Raymond, président de l’Association française des diabétiques (AFD). « Sans parler des erreurs, sources de catastrophes. Je suis marathonien et me souviens avoir eu droit, avant une course, aux conseils « avisés » d’un autre marathonien diabétique, qui m’ont fait froid dans le dos… Faute d’être validées, les informations échangées de patient à patient sur les forums ou en réunions peuvent être dangereuses ou, quand ce n’est pas le cas, pour le moins anxiogènes ». Un exemple parmi d’autres, relevé sur un forum : « quand j’enlève l’aiguille, de l’insuline ressort et coule », s’inquiète un internaute. Aussitôt, les conseils abondent. Pour les uns c’est une question de longueur d’aiguille ou de stylo autopiqueur, pour les autres c’est le site d’injection qu’il faut changer, certains recommandent de tourner l’aiguille d’un demi-tour pour la retirer ou encore d’injecter plus lentement et d’enlever doucement… Certaines réponses sont pertinentes, mais on imagine la perplexité de celui ou de celle qui les reçoit.
Contrôler les échanges ?
L’AFD reste donc très prudente. Oui aux échanges d’expériences, mais contrôlées. « Les nouvelles technologies informatiques sont un formidable outil d’informations pour les diabétiques, notre site* relaie d’ailleurs des témoignages, mais toujours médicalement validés », souligne le président de l’AFD. « Nous réfléchissons à la mise en place de « chats » en direct, mais c’est compliqué. Il faudrait assurer une veille 24 heures sur 24, et pouvoir filtrer, ce qui nécessite beaucoup de temps, de compétences et, derrière tout cela, des gros investissements ».
Autre crainte : l’exploitation des données confidentielles diffusées sur des forums dans une optique marketing. Certains sites communautaires n’affichent pas clairement leur lien avec un laboratoire et la loi HPST, qui interdit les contacts directs avec les patients, favorise ces pratiques. Gérard Raymond demande donc au ministère de la Santé une législation adaptée, pour éviter les dérives.
Des « patients experts ».
Pour sa part, l’AFD préfère, depuis 6 ans, aider les diabétiques à mieux vivre en créant des « patients experts ». Ces bénévoles, qui connaissent la réalité de leur maladie, reçoivent une formation initiale de 5 jours (puis continue), portant essentiellement sur l’écoute et l’empathie. Ils peuvent accompagner les diabétiques, de manière individuelle ou collective, dans des réunions ou des salons, mais sans interférer sur les traitements. « Accompagner n’est pas éduquer, ce n’est même pas témoigner de son propre parcours, mais tout simplement tenir la main de l’autre et parfois lui suggérer des conseils », résume Gérard Raymond. « Ces actions d’accompagnement complètent l’éducation thérapeutique. Nous y tenons car la passivité est le plus grand ennemi du diabétique. Il faut qu’il soit acteur de sa santé, mais pas n’importe comment ».
Le pharmacien a ici un rôle à jouer, que souligne d’ailleurs la loi HPST. En particulier pour la surveillance glycémique, même si le patient a déjà été informé par son médecin. « Les échanges entre malades, même contrôlés, ont leurs limites. Le pharmacien, lui, connaît le contexte familial, social, économique de son patient et peut donc personnaliser ses conseils ». Pour expliciter une ordonnance, recommander plutôt tel autopiqueur ou lecteur de glycémie, parler diététique, etc. et l’amener ainsi petit à petit à se prendre en main. « Les échanges d’expériences sur le net ou ailleurs ne peuvent pas remplacer ce dialogue singulier… ».
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