Excellent démarrage en Nouvelle-Aquitaine
La campagne de vaccination antigrippale en Nouvelle-Aquitaine semble recueillir l’adhésion de tous ; des patients qui viennent en nombre et des pharmaciens qui apprécient la valorisation de leur image de professionnels de santé.
Lundi 9 octobre, dans la pharmacie de Lolya de Marmande (Lot-et-Garonne) tous les comptoirs parlent vaccination. Bons en main, plusieurs retraités découvrent que leur pharmacien peut désormais les « piquer contre la grippe ». D’autres, sont déjà là pour une vaccination : « Depuis vendredi, nous avons délivré 70 vaccins et vacciné une dizaine de personnes », indique Christophe Koperski, l’un des deux titulaires.
« Notre premier candidat à la vaccination attendait devant le rideau de la pharmacie vendredi matin à 8 h 30 », précise Patrick Saint-Yrieix, de la pharmacie de la Benauge à Bordeaux, qui réalise 5 à 6 vaccinations par jour. Même rythme à la pharmacie des Salines de La Rochelle.
Les officines rurales ne sont pas en reste. Au cœur de la Creuse, à Saint-Sulpice-les-Champs, Geneviève Siri a vacciné 8 personnes en trois jours. « Cela démarre bien, confirme Corinne Tremon, de la pharmacie agenaise Jayan-Palissy (10 vaccinations). Certains patients avaient réservé depuis plusieurs semaines. »
« Sauver des vies »
« Cette expérimentation est importante, poursuit Christophe Koperski, car elle instaure une nouvelle relation avec le patient et permet au pharmacien d’être reconnu comme un véritable professionnel de santé. »
« Je suis enthousiaste, explique Olivier Pauvert, de la pharmacie du Centre à Marmande. En rendant la vaccination plus simple, plus rapide, j’ai conscience de sauver des vies. Face à la défiance vaccinale, nous assumons notre responsabilité de soignant et de scientifique. » Un enthousiasme qui génère parfois quelques frustrations quant aux restrictions imposées par l’expérimentation : « J’ai rencontré quatre patients à la suite, avec des contre-indications, regrette Francis Camblats à Saint-Jean-Pied-de-Port (Pyrénées Atlantiques). C’est frustrant. »
Quelques frustrations
Pour Arnaud Dufraisse, de la pharmacie du Pays d’Excideuil (Dordogne) : « si on ne vaccine pas les primo vaccinant, on ne pourra guère augmenter la couverture vaccinale, car on ne ramènera pas les personnes qui échappent au système de soins. La notion de primo vaccinant est purement déclarative, suggère ce téméraire titulaire Lot-et-Garonnais. Je n’ai pas peur de prendre le risque… »
« Si nous parvenons à dépasser les 48 % de vaccinés parmi les personnes (à risque) venant avec un bon, ce sera déjà très bien », tempère un confrère poitevin.
Mais toutes les officines n’adhèrent pas à l’expérimentation, car « ce n’est pas notre métier », ou par crainte de gêner médecins et infirmières du secteur. D’autres traînent les pieds : « Je n’ai vacciné personne ; vous avez vu l’honoraire proposé, c’est dérisoire ! s’insurge ce pharmacien de Limoges, souhaitant garder l’anonymat. Combien est payé le médecin pour le même travail ? Et l’infirmière ? Et quand serons-nous payés ? Dans un an ? Ces nouvelles missions sont des os à ronger, alors que se profile la disparition de milliers d’officines ! »
La majorité des pharmacies vaccinent sans attendre (et sans rendez-vous) dans un lieu dédié, le plus souvent le local d’orthopédie réaménagé, consacrant de 15 à 20 minutes par patient.
Au total, la meilleure mesure de l’adhésion des pharmaciens de Nouvelle-Aquitaine demeure leur nombre : 753 officines* (sur 2 200) ont démarré l’expérimentation. Et un nouveau contingent devrait les rejoindre dans les jours à venir.
Patrice Jayat
Les pharmaciens du Rhône, seringue en main
Le 6 octobre, les pharmaciens d'Auvergne-Rhône-Alpes ont commencé à vacciner. Si l'organisation du nouveau service dans les l'officines nécessite de la disponibilité et des compétences, l'adhésion des clients semble déjà acquise. Reportage dans le Rhône.
Au comptoir de cette pharmacie de Pont de Cheruy, dans le Rhône, Michel, 60 ans, vient de récupérer ses médicaments. Il en profite pour demander à l'adjointe qui le sert de le vacciner contre la grippe saisonnière. Cécile Coulardeau commence par lui poser une série de questions pour vérifier qu'il correspond bien à la cible de l'expérimentation : a-t-il déjà été vacciné, est-il sous anticoagulants, est-il immunodéprimé, etc. Michel est en affection de longue durée (ALD) et a reçu un bon de la part de la Sécurité sociale.
Au vu de ses réponses, il est bien dans la cible de l'expérimentation. Cécile l'invite à la suivre dans un espace de confidentialité et lui fait signer un formulaire de recueil de consentement, obligatoire pour participer à l'expérimentation. Michel signe sans difficulté, puis relève sa manche. Après s'être lavé les mains, Cécile enfile une paire de gants, désinfecte la zone de l'injection et demande au patient s'il souhaite être prévenu quand elle va piquer. Il refuse et elle déballe donc la seringue puis effectue l'injection dans son bras gauche. Le geste n'aura pris que quelques secondes et Michel n'a rien senti. « Le geste est impeccable, c'est une pro ! » s'exclame-t-il. « D'habitude je vais chez le médecin, mais cette année j'ai lu dans le journal qu'on pouvait le faire à la pharmacie. On vient, on prend ses médicaments et on se fait vacciner ! C'est plus rapide et ça évite de prendre rendez-vous chez le médecin », apprécie-t-il.
En une semaine, cette pharmacie, qui compte 7 pharmaciens formés, a réalisé plus de 80 vaccinations. « Nous avons en moyenne une dizaine de patients qui viennent se faire vacciner chaque jour », estime Vincent Duménil, co-titulaire de la pharmacie. Les patients n'ont pas besoin de prendre rendez-vous. « Nous sommes suffisamment nombreux pour qu'il y ait toujours du personnel au comptoir pendant que l'un de nous vaccine. »
Créneaux horaires pour vacciner
Dans d'autres pharmacies en revanche, une organisation particulière est nécessaire. C'est le cas dans la pharmacie Croix-Paquet, dans le premier arrondissement de Lyon, une officine de petite taille, où des créneaux horaires sont réservés pour permettre aux pharmaciens de vacciner. « Nous ne sommes que trois pharmaciens, dont deux formés à la vaccination, explique Marie-Pierre Gazzano, titulaire de la pharmacie. Pour pouvoir prendre le temps de vacciner, il faut que nous soyons tous présents, afin qu'il y ait toujours quelqu'un au comptoir. Les patients peuvent donc prendre rendez-vous et se faire vacciner entre 9 heures et 12 heures et entre 15 heures et 19 heures », détaille-t-elle. « C'est assez long, il faut compter au mois un quart d'heure pour remplir le questionnaire, faire signer le consentement. Le geste en lui-même est rapide, mais le plus long c'est toute la paperasse autour ! »
Une dizaine de patients ont déjà été vaccinés, à raison d'un à deux par jour. « Les patients ont souvent entendu dans les médias qu'on pouvait vacciner en pharmacie, mais beaucoup s'imaginent pouvoir être vaccinés alors qu'ils ne sont pas éligibles », relève Marie-Pierre Gazzano. Au début, elle avoue qu'elle était réticente à pratiquer ce geste en officine. « Mais finalement je trouve ça très bien et je pense même qu'on devrait nous permettre de vacciner aussi la clientèle jeune et valide », déclare-t-elle.
Anne-Gaëlle Moulun
* Soit 1 150 pharmaciens autorisés à vacciner le 6 octobre, sur 5 380 (2 900 titulaires, 2 480 adjoints) en Nouvelle Aquitaine
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