1- Histoire et principe
C’est en 2005, sous l’impulsion d’Isabelle Adenot, aujourd’hui présidente du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens (CNOP) et à l’époque présidente du Conseil central A (titulaires) de l’Ordre, que le dossier pharmaceutique (DP) a vu le jour. C’est d’ailleurs le sujet de sa thèse d’exercice qu’elle a soutenue en 2005.
La naissance officielle du DP date de la loi du 30 janvier 2007 qui confie sa mise en œuvre au CNOP. Une longue expérimentation dans quelques départements aboutira au bout de 20 mois à l’autorisation de la généralisation du DP par la CNIL, par un décret du 2 décembre 2008. Le principe du DP est de recenser, pour tous les bénéficiaires de l’assurance-maladie qui le souhaitent, tous les médicaments délivrés au cours des quatre derniers mois.
Un nouveau décret datant du 26 février 2015 autorise la conservation longue de certaines données : 21 ans pour les vaccins et 3 ans pour les médicaments biologiques. Le but ? Sécuriser la dispensation de médicaments en évitant les traitements redondants, les risques d’interactions entre médicaments et en donnant les moyens de lutter contre l’iatrogénie médicamenteuse. D’abord ouvert aux pharmacies d’officine, il se déploie peu à peu à l’hôpital, grâce à l’expérimentation concluante menée dans les pharmacies à usage intérieur et auprès de certains médecins hospitaliers.
2- Ouvrir un DP
Les officinaux sont désormais bien rodés à l’ouverture d’un DP puisque 99,8 % des pharmacies françaises sont désormais connectées au DP et les étudiants bénéficient d’un accès spécifique au DP dans les pharmacies pédagogiques de 21 des 24 facultés de pharmacie. Le CNOP rappelle néanmoins que l’ouverture d’un DP nécessite « le recueil du consentement express du patient, ce qui signifie son consentement oral. Sans cet accord, en cas de plainte du patient, le pharmacien s’expose à des sanctions et à une peine d’emprisonnement qui peut atteindre 3 ans ».
Le patient doit présenter sa carte vitale, sans laquelle le pharmacien ne peut accéder à son DP, et il doit lui être remis une brochure et une attestation papier confirmant la création du DP. Le bénéficiaire peut demander que certaines dispensations ne figurent pas sur son DP, le pharmacien doit alors lui donner une attestation de refus.
Il peut également refuser l’accès de son DP à un pharmacien, qui doit lui délivrer une attestation de refus de consultation. Il peut demander à tout moment la fermeture de son DP à tout pharmacien et consulter les informations qui y figurent. Le DP est automatiquement clos au bout de trois ans sans aucun accès.
3- Les autres applications du DP
Depuis son déploiement lancé fin 2008, le DP s’est étoffé de nombreux services réunis dans le « portail DP ». Le tout premier à se développer est le DP-Alertes en juillet 2010, qui permet à l’Ordre de diffuser en quelques minutes une alerte sanitaire à toutes les pharmacies raccordées : un message apparaît sur tous les postes de la pharmacie, qu’il faut valider pour faire disparaître. Vient ensuite le DP-Rappels en novembre 2011, pour les rappels et les retraits de lots de médicaments.
Ce dispositif est réalisé en partenariat avec l’ANSM et les exploitants. En 2013, le DP-Ruptures permet aux officines de signaler une rupture d’approvisionnement au laboratoire concerné, à l’ANSM et à l’ARS dont il dépend. La même année, le DP-Suivi sanitaire donne accès, à la demande, au ministre de la Santé, à l’ANSM et à l’InVS (aujourd’hui l’Agence Santé publique France) aux données anonymes du DP.
Le but est d’offrir une visibilité de la situation sanitaire de la population et d’être un outil d’aide à la décision pour des problématiques de santé publique. Enfin, un DP-Contrefaçons est en préparation et vise à signaler au pharmacien que le produit qu’il s’apprête à délivrer pourrait être une contrefaçon.
4- Une efficacité prouvée
L’Ordre a constitué un Comité scientifique d’évaluation du DP autonome en septembre 2010, sous la direction du Pr Jean Calop. Deux projets universitaires d’évaluation ont été retenus, elles ont livré les résultats de leurs enquêtes fin 2015. L’étude DOPI-OFFI a analysé les interventions pharmaceutiques lors de la dispensation d’ordonnances et démontre la forte utilité du DP pour les patients de passage.
L’étude IPADAM a évalué la qualité des interventions pharmaceutiques pour la délivrance sans ordonnance de pseudo-éphédrine et d’ibuprofène. L’intervention du pharmacien détecte un problème dans 75 % des cas, dont 10 % grâce à l’utilisation du DP.
Hors étude, le DP a prouvé son efficacité lors de la fausse alerte au furosémide Teva. L’alerte est lancée le vendredi 7 juin 2013, dès le samedi, plus aucune spécialité n’est disponible en pharmacie, le rappel de l’ensemble des lots est effectué le lundi 10 juin.
5- Un Hackingpharma pour innover
Le CNOP a lancé un hackaton, le HackingPharma, pour favoriser la création de services et de solutions digitales utilisant tout le potentiel du DP. Les inscriptions, ouvertes le 16 février dernier, ont réuni 249 participants répartis en 116 équipes. Après une sélection drastique, seules dix équipes sont parvenues en finale le 7 juin, récompensant cinq lauréats.
Le grand prix Jean Brudon est attribué à l’équipe DPadhésion pour son application Mon pharmacien 3.0, qui utilise les données du DP pour améliorer le suivi thérapeutique, la gestion de l'activité pharmaceutique et l’observance du patient. L’équipe Aviato remporte le prix du meilleur service pour les pharmaciens d’officine pour son projet DP-Analyses qui permet d’accéder aux résultats d’analyse biologique du patient.
L’équipe Team AppiNest gagne le prix du meilleur service pour les pharmaciens en établissement de santé grâce à leur projet de permettre et motiver les patients à enrichir leur DP, notamment à travers l’application Pistache Pharma qui accompagne les enfants en traitement chronique. L’équipe C2S (Carte Santé & Sécurité) reçoit le prix du meilleur service lié à la sécurité de la chaîne du médicament grâce à une application mobile répondant aux problématiques de retraits et ruptures de médicament qui permet d’anticiper.
Enfin, le prix du meilleur service à destination du grand public est octroyé à l’Equipe Inversée pour son dispositif Vital qui encourage la communication entre praticiens et accompagne la gestion de crise, afin d’améliorer l’observance des patients et le bon usage du médicament.
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