C’est parti. Dans deux ans, les patients volontaires auront leur dossier médical partagé (DMP). Après treize années d’atermoiements, le DMP s’impose dans le parcours patient, via la loi de Santé. Ce dispositif qui a fait couler beaucoup d’encre - et plusieurs millions d’euros -, verra enfin le jour fin 2017. L’article 25 de la loi Santé prévoit en effet que, à cette date, les patients pourront disposer de ce carnet de santé numérique qui contiendra toutes les données cliniques (imageries, analyses biologiques, compte rendu d’interventions chirurgicales), ainsi que des actes de prévention (vaccinations, dates de dépistage…).
Vecteur de sécurité du parcours patient et d’une meilleure coordination ville-hôpital, il permettra de transmettre des données en cas d’hospitalisation. Le DMP sera renseigné sur la carte Vitale. « Il évitera les actes inutiles et redondants », promet l’Assurance-maladie qui aura la responsabilité de son déploiement. Cependant le DMP ne contiendra que les soins remboursés, et encore uniquement sur les douze derniers mois glissants. C’est dire si cette version est édulcorée par rapport aux premières ébauches. Quoi qu’il en soit, ce DMP a le mérite d’impliquer les patients dans leur prise en charge. Ce sont eux, en effet, qui créeront eux-mêmes leur DMP sur leur compte ameli.fr et qui indiqueront les soignants avec lesquels ils souhaitent partager leurs données.
Un DP précurseur
Le DMP déployé en région pilote dès le printemps 2016, puis étendu un an plus tard à l’ensemble du territoire, restera en tout état de cause un acte revendiqué par le patient. Ce qui devrait être également le cas des 32 millions de dossiers pharmaceutiques (DP) ouverts à ce jour par les pharmaciens. C’est en tout cas la position du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens qui a rappelé que l’ouverture d’un DP ne pouvait se faire sans le consentement exprès du patient. Cette mise au point a été nécessaire au cœur d’une polémique suscitée début novembre par la plainte d’une patiente. Elle reprochait à son pharmacien d’avoir ouvert un DP à son nom et à son insu. Cette révélation a fait apparaître que la pratique était courante. Accusés d’ouvertures « abusives » de DP, les pharmaciens incriminés s’en défendent. Et s’interrogent. Pourquoi le DP, qui a été conçu dans l’intérêt du patient et pour sa sécurité, n’est-il pas rendu obligatoire ?
Sans aller jusque-là, Isabelle Adenot, présidente de l’Ordre des pharmaciens, plaide pour un consentement écrit obligatoire qui lèverait tous les doutes.
Décalé, incomplet
Cette expérience des pharmaciens, qui reste par ailleurs un beau succès, démontre à quel point le partage des données reste un sujet hautement sensible. Dans ces conditions, convaincre les 19 millions d’assurés français disposant d’un compte ameli.fr d’ouvrir un DMP reste une gageure.
Si une connexion est prévue entre le DMP et les logiciels métiers des autres professions de santé et des établissements (hôpitaux, cliniques, ehpad), aucune interface ne pourra s’établir avec DP. Celui-ci restera résolument indépendant. Un constat amer pour la profession qui s’attendait à ce que le DP alimente le DMP. « Ce choix n’a pas été retenu et je ne le comprends pas. Pour ma part, j’ai toujours été convaincue que le DMP devait exister à partir de la consolidation de plusieurs dossiers professionnels, à commencer par les professions les plus informatisées, comme les pharmaciens, les biologistes et les radiologistes. Ceci afin de donner du contenu et de l’appétence au DMP », expose Isabelle Adenot.
Le DMP fera donc cavalier seul. Non sans risque puisqu’il faudra calculer un délai de latence entre la délivrance du médicament, la télétransmission par le pharmacien et l’historique établi par le remboursement. Sans compter que les médicaments non remboursés passeront au travers des mailles du filet. Or, aujourd’hui, un tiers des 37 millions de dossiers pharmaceutiques (DP) contiennent au moins un médicament non remboursé.
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