Comment mieux maîtriser les frais de personnel

Publié le 15/10/2009
Article réservé aux abonnés

COMPTABILITÉ

LE QUOTIDIEN DU PHARMACIEN.- Selon votre dernière étude statistique sur l’économie des officines en 2008, il apparaît que les pharmaciens ont du mal à maîtriser le poste des frais de personnel. Qu’en est-il exactement ?

PHILIPPE BECKER. - Disons plutôt que la stagnation de l’activité sur les deux dernières années a mécaniquement renforcé le poids de ce poste dans le compte de résultat des officines. Depuis de nombreuses années, la masse salariale évoluait traditionnellement en fonction de la variation du chiffre d’affaires. Or, cette évolution a continué dans un contexte de fort ralentissement de l’activité. Désormais, une bonne gestion de ce poste va devenir capitale si les officinaux veulent préserver leur niveau de trésorerie et, par conséquent, leur marge de manœuvre !

Comment un pharmacien peut-il vérifier s’il est dans la norme concernant les frais de personnel ?

CHRISTIAN NOUVEL. - Déjà, il n’y a pas une seule norme pour toutes les officines. Le taux de frais de personnel par rapport au chiffre d’affaires hors TVA varie suivant la typologie et le mode d’exercice. Donner un seul chiffre serait une erreur. Ensuite, cet indicateur n’est pas suffisant en soi car il prend en compte une situation historique qui peut fausser l’analyse.

Par exemple ?

CHRISTIAN NOUVEL. - Par exemple, un niveau de salaire par personne supérieur au minimum de la convention collective pour des raisons d’ancienneté ou encore parce qu’il est difficile de recruter dans certaines régions, ou encore d’autres éléments qui altèrent l’observation directe de ce ratio. C’est la raison pour laquelle il est utile de regarder la productivité du personnel salarié.

Comment se calcule cette productivité du salarié ?

PHILIPPE BECKER. - Tout simplement en divisant le chiffre d’affaires hors TVA par le nombre de poste équivalent temps plein (ETP). Ce ratio n’est pas parfait car il n’intègre pas l’activité « comptoir » du ou des titulaires. Malgré ce défaut, la comparabilité est très pertinente puisque la base de calcul est malgré tout la même. Mais, là aussi, le pharmacien doit se repérer dans sa typologie et en fonction de son mode d’exercice.

Y a-t-il des progrès à faire dans la productivité au travail et comment y parvenir compte tenu des textes sociaux en vigueur ?

PHILIPPE BECKER. - La productivité du personnel sera, à mon avis, le grand chantier de l’officine libérale dans les prochaines années. Il faut reconnaître que personne ne s’est vraiment penché sur la question jusqu’à présent. Qui peut dire, à titre d’exemple, combien un préparateur peut servir d’ordonnances par jour dans des conditions de sécurité totale pour le client ? À ma connaissance, il n’y a pas d’études sérieuses sur le sujet, et, en tout cas, pas d’étude globale. C’est là où le bât blesse car les mesures de réduction d’effectifs qui devront être prises dans certaines officines ne seront efficaces qu’à la condition d’une analyse sérieuse de la productivité. Sinon, ce peut être catastrophique et contraire à l’effet recherché.

CHRISTIAN NOUVEL. - Lorsque la seule alternative est un licenciement pour des raisons liées à la mauvaise situation financière de l’officine, le dossier doit être monté avec beaucoup de sérieux et parfaitement documenté pour que le pharmacien puisse se protéger d’une contestation du salarié visé par la mesure.

D’après vous, combien de pharmacies sont concernées par des difficultés de trésorerie liées à une mauvaise gestion de l’effectif salarié au sens large ?

PHILIPPE BECKER. - Dans une récente enquête que nous avons réalisée pour un syndicat, 42 % des pharmacies en difficulté financière révélaient une mauvaise gestion du poste frais de personnel. Autant dire que le problème doit être pris au sérieux dans le contexte actuel.

› PROPOS RECUEILLIS PAR FRANÇOIS SABARLY

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 2694