C’EST UN RÉSULTAT pour le moins étonnant : selon une méta analyse présentée au congrès de l’American thoracic society par le Dr Ena Gupta, de l’école de médecine de l’université de Floride, un traitement de la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) par corticothérapie inhalée augmenterait bien le risque de pneumonie, mais réduirait dans un même temps la mortalité, y compris la mortalité associée à la pneumonie.
Les auteurs ont inclus 38 études, dont 29 essais randomisés et 9 études observationnelles. La corticothérapie inhalée était associée à une augmentation significative du risque de pneumonie dans les études randomisées (+ 61 %) comme dans les études observationnelles (+ 89 %), sans ajustement des résultats pour les facteurs confondants. Dans 6 études randomisées, le traitement n’était pas associé à une augmentation de la mortalité par pneumonie, et dans 7 études observationnelles, elle était même associée à une diminution moyenne de 28 % de cette mortalité. De même, il n’y avait pas d’augmentation de la mortalité toute cause dans l’ensemble des études randomisées, et une diminution dans 6 études observationnelles.
Du grain à moudre pour le PRAC.
Selon le Dr Gupta, l’explication résiderait dans la double action anti inflammatoire et immunosuppressive des corticoïdes inhalés. D’un côté, l’immunosuppression augmente le risque de survenue d’une pneumonie, et de l’autre, la régulation du système immunitaire réduit les symptômes et le risque de mortalité une fois la maladie déclarée. Le traitement agirait ainsi comme une sorte de Dr Jekyll et M. Hide de la BPCO. « L’augmentation de l’incidence de la pneumonie chez les patients traités par corticothérapie inhalée semble contrebalancée par une diminution de la mortalité, indique le Dr Gupta, ces données pourraient être utilisées dans l’évaluation du bénéfice risque de ce traitement dans la BPCO. »
Cette méta analyse tombe dans une actualité brûlante : l’Agence européenne du médicament (EMA) a en effet entamé une réévaluation du rapport bénéfice-risque des corticoïdes inhalés prescrits pour traiter la BPCO suite à une demande de la Commission européenne. Cette réévaluation est motivée par plusieurs études qui, et notamment les études TORCH (2007) et INSPIRE (2008) qui ont montré une augmentation de la fréquence des pneumonies des patients sous corticothérapie inhalée. L’étude INSPIRE montrait en outre une absence de différence d’efficacité entre l’association salmétérol/propionate de fluticasone et le trotiopium (un anticholinergique). Interrogé par « le Quotidien » lors de l’annonce de l’EMA, le Pr Bruno Housset, chef du service de pneumologie du CHU de Créteil, avait estimé qu’il « faudrait au minimum respecter les restrictions des AMM, ce qui n’est pas toujours le cas ».
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