Après deux années moroses, les ventes de laits infantiles semblent à nouveau impactées en pharmacie. Leur évolution reflète en partie la baisse du nombre de naissances qui, de 2016 à 2017, régressent de 17 000 (Insee). Les déboires de Lactalis, conduisant au retrait des références de sa gamme Picot en fin d'année dernière, ont peut-être aussi influencé défavorablement le marché. Celui-ci, dans tous les cas, affiche une baisse de 3 % en volume et 1,5 % en valeur sur les douze derniers mois (IQVIA Pharmastat). Cette tendance ne touche cependant pas que le circuit officinal puisque le marché régresse aussi en GMS, une involution qui s'accentue sur les trois premiers mois de l'année pour les deux circuits. Rien d'inquiétant cependant dans un contexte transitoire où l'officine – qui assure 26 % des ventes totales de laits infantiles et 37 % en valeur – dispose d'une dynamique indéniable selon les fabricants.
Innovation
« L'actualité a peut être conduit certaines mères à retarder le sevrage de leur bébé, mais c'est une réaction éphémère », commente Matthew Stalder, directeur des marques Guigoz et Nidal chez Nestlé. Des circonstances qui n'ont pas empêché Guigoz de réviser la formule de son lait 1er âge classique pour y intégrer des oligosaccharides (HMO). « C'est la première fois qu'un industriel arrive à répliquer cette substance présente dans le lait maternel et qui renforce l'immunité tout en combattant les bactéries pathogènes. » La reformulation devrait s'étendre à toute la gamme d'ici peu.
Si l'innovation dynamise le circuit officinal, celui-ci dispose d'autres atouts. À commencer par le monopole qui lui permet de soustraire toute une partie de son offre à la concurrence, protégeant ainsi certaines des formules thérapeutiques pour nourrissons et enfants du premier âge : laits anti-régurgitation (AR), laits hypoallergéniques (HA), laits pour prématurés, préparations vouées aux enfants allergiques au lait de vache (hydrolysats de protéines de lait de vache – HPLV – ou de protéines de riz, substituts à base d'acides aminés), préparations destinées aux diarrhées aiguës (solutés de réhydratation orale), laits sans lactose. Certains fabricants se sont spécialisés sur ces segments comme Mead Johnson Nutrition et ses marques Nutramigen et Pregestimil centrées sur l'allergie aux protéines de lait de vache. Novalac (Menarini), pour sa part, a lancé l'an passé la référence Novalac AminA, une formule d’acides aminés élémentaires en cas d’allergie sévère aux protéines de lait de vache. La marque revendique par ailleurs le leadership sur les segments de la satiété, de l'anti-colique et de l'anti-constipation.
En hausse
Certaines catégories des laits infantiles affichent, par ailleurs, des progressions non négligeables. Ainsi, le segment des laits 3e âge témoigne d'une croissance de 6,1 % en valeur sur un an (source fabricants). « Arrivées plus récemment dans les rayons, les formules dites de croissance sont soutenues par les professionnels de santé qui leur reconnaissent un intérêt jusqu'à l'âge de 3 ans, explique Amélie Marcel, directrice marketing chez Sodilac. Bien mieux adaptées aux besoins du jeune enfant, elles sont moins riches en protéines et assurent les apports en fer et acides gras essentiels. D'année en année, ce segment capte une partie croissante de la clientèle et n'est pas près d'atteindre la maturité. »
Plus forte encore est la progression des hydrolysats (préparations aux protéines de lait de vache ou protéines de riz) qui gagnent 6,7 % en valeur sur un an. Cet important segment, qui représente plus d'un quart du versant des laits thérapeutiques en valeur, suit une tendance de fond qui valorise les ressources du monde végétal. Les hydrolysats de protéines de riz séduisent les consommateurs des mouvements végétariens ou vegan et dynamisent tout un segment qui répond, par ailleurs, aux besoins en termes de prévention de l'APLV (allergie aux protéines du lait de vache). « Avec plus de 30 % des parts, Modilac est leader sur ce segment des APLV, grâce à des solutions diversifiées pour bébé à risque allergique et plus spécialement à nos références Modilac Expert Riz et Expert Riz AR qui ont vu leurs ventes augmenter de 16 % en un an. »
Avec des parts de marché équivalentes en valeur à celles des hydrolysats, les laits AR maintiennent leurs ventes et affichent une progression de plus de 1 %. Ce segment pilier de l'officine est investi par tous les fabricants et soumis à une forte concurrence. « La baisse des formules épaissies nourrit la demande en laits AR qui font aujourd'hui l'objet d'une prescription sur quatre, poursuit Amélie Marcel. La régurgitation constitue, avec la colique, le trouble le plus évoqué par les mamans lors des consultations avec le pédiatre. »
La dynamique Bio
Les laits standards, pour leur part, occupent une confortable part de 45 % en valeur sur le total marché en pharmacie. Soutenus pas le dynamisme des laits de croissance, ils sont consacrés pour plus de la moitié à l'alimentation du premier âge.
Au moins une tendance caractérise ce segment qui voit l'émergence d'une filière Bio se confirmer. Cette offre, qui a gagné 3,2 % en valeur (source fabricants) sur un an, répond à une attente forte des mamans. Très porteur en GMS, l'argument Bio est toutefois complexe à mettre en œuvre, mais de plus en plus de fabricants franchissent cette étape en pharmacie. Vitagermine, avec sa marque Babybio, est l'un des principaux acteurs de ce segment. Formulée à base de lait de vache français, la gamme abrite trois lignes (classique, au bifidus, épaissie à l'amidon de maïs bio) disponibles en 1er et 2e âges. Une référence croissance proposée en poudre et sous forme liquide vient compléter l'offre Babybio et verra prochainement sa bouteille de 25 cl équipée d'un goulot capable de s'adapter aux tétines. La marque référence aussi une gamme au lait de chèvre (1, 2, 3) élaborée dans le souci de proposer une alternative parmi les laits d'origine animale.
Autre acteur du segment, Modilac propose une ligne Bio (1, 2, 3) mais c'est sa gamme standard Doucéa (1, 2, 3), vouée au bien être digestif, qui fait l'actualité en annonçant pour le printemps une révision de sa formule désormais sans huile de palme. Les laits 1er et 2e âges seront enrichis en lactoferrine, protéine du lait maternel capable de renforcer le système immunitaire. Physiolac (Laboratoires Gilbert), pour sa part, met l'accent sur ses deux gammes phare, Physiolac Bio et Physiolac Précision. La première (2,3, AR) a accueilli l'an dernier une préparation à base de céréales instantanées bio, Physiolac Bio Céréales, à donner dès 4 mois. La seconde met l'accent sur l'immunité, la solidité osseuse et la régulation du transit. Gallia, enfin, lance un nouveau format prêt à l'emploi pour sa formule infantile phare, Calisma 2. Nomade et facile à utiliser, cette bouteille de 200 ml, disponible à partir de mai, permet aux parents de pouvoir nourrir leur bébé, dès 6 mois, n'importe où sans avoir de biberon à préparer.
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