LA FRANCE compte 11 à 12 millions de fumeurs et 70 % ont essayé ou prévu d’arrêter de fumer. « L’échec constructif est bien l’apanage du sevrage tabagique et il n’y a aucune raison de se décourager quand les tentatives d’arrêt échouent, prévient le Dr Étienne André, addictologue, médecin de Santé Publique à Grenoble. Pour aider un fumeur à prendre sa décision, il faut l’interroger sur sa motivation et savoir en quoi le fait de fumer devient incompatible avec sa façon de vivre (déclin de sa santé, pollution pour ses proches, coût…). Il faut lui laisser la liberté de décision mais s’assurer que le moment est bien choisi et vérifier son état psychologique. Il faut ensuite lui indique la marche à suivre et le rassurer sur les moyens, et sur le fait qu’on pourra l’accompagner en levant les principaux freins à l’arrêt que sont la prise de poids, les troubles de l’humeur et du sommeil. » Vouloir s’arrêter de fumer n’est pas seulement une question de volonté mais de dépendance, qu’elle soit comportementale, physique ou psychique. La dépendance physique est directement liée à la nicotine et le sevrage pose le problème de la titration en nicotine. « Le sous-dosage est le principal facteur d’échec, alors que les surdosages n’existent pas », dénonce l’addictologue. La dépendance comportementale renvoie à la gestuelle, au rituel, aux habitudes de prises. De simples conseils pratiques peuvent aider le fumeur à modifier sa consommation tout au long de la journée. La dépendance psychologique met en jeu le double renforcement du plaisir de fumer et du déplaisir du manque, et l’arrêt du tabac implique de trouver des compensations ou des récompenses personnelles (il faut se faire plaisir à soi-même).
Les méthodes et les outils d’aide à l’arrêt.
Le rôle du pharmacien au comptoir est de savoir ce que veut le client. Il ne doit pas le forcer à changer de comportement si celui-ci ne le souhaite pas. Son conseil doit être minimal, non intrusif, et proposer un sevrage selon l’arbre décisionnel choisi par le fumeur : simple réduction de la consommation, abstinence temporaire ou arrêt définitif. « Le conseil minimal est un outil qui doit être systématique et qui consiste à donner au fumeur qui a l’intention d’arrêter, une plaquette informative sur les méthodes d’arrêt, en lui proposant d’en reparler quand il le souhaite, explique le Dr Étienne André. Ces dix ou quinze secondes suffisent à générer 200 000 arrêts supplémentaires par an, arrêts validés avec un recul d’un an. »
Pour vérifier si le sujet reçoit le bon dosage, le pharmacien doit prendre en compte trois facteurs : l’arrêt de l’envie de fumer, l’amélioration du confort du patient (stress, humeur) et la possibilité de passer à un dosage inférieur. « Si un fumeur se plaint d’avoir tout essayé sans succès, sa dépendance a pu être sous-évaluée au départ et il convient de refaire avec lui le test de dépendance à la nicotine et de le surdoser si besoin, note l’addictologue. Il ne faut pas hésiter à appliquer le principe de titration supérieure et proposer, dès le début du traitement, un patch plus dosé que le score de dépendance défini par le test de Fagerström, ou recourir en complément à la voie orale quel que soit le dosage du patch ; tous les candidats au sevrage ont des pastilles en permanence dans la poche. » Pour l’arrêt définitif, trois solutions sont possibles : le patch seul, la voie orale seule, ou la combinaison des deux. Cette dernière solution est préférable car elle permet une modulation plus précise. Chez les fumeurs très dépendants, on peut associer plusieurs timbres fortement dosés, même si l’indication est hors AMM, à condition d’un suivi rigoureux dans un centre de tabacologie ou d’addiction.
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