DU MYOLASTAN à l’Isoméride, en passant par le Vioxx, le Mediator ou le Di-Antalvic, des médicaments bien connus du grand public et des professionnels de santé, ont quitté la Pharmacopée en général pour des raisons évidentes de santé publique. Parfois à pas feutrés, le plus souvent à grand renfort médiatique, ces molécules montrées du doigt n’ont pas toujours été décriées. Le plus difficile reste encore, pour
les prescripteurs et les pharmaciens, de trouver des alternatives. Selon le Vidal, environ 140 spécialités (et leurs génériques éventuels) ont été supprimées pour des raisons de pharmacovigilance en vingt ans, entre 1993 et 2013.
Le cas du Di-Antalvic (dextropropoxyphène-paracétamol), et donc du Propofan et de leurs génériques, est certainement l’un des plus emblématiques. Produit phare largement utilisé dans les algies rebelles, modérées à intenses, il comptait environ 8 millions de consommateurs dans l’Hexagone quand l’Agence européenne du médicament (EMA) a décidé son retrait du marché au vu des risques de surdosages mortels observés principalement au Royaume-Uni et en Suède. Une entreprise pas forcément comprise par les professionnels. « On peut s’interroger sur la pertinence de la décision européenne, car les alternatives antalgiques de classe 2 - le tramadol et les dérivés de la codéine - font apparaître beaucoup d’effets secondaires et des problèmes de tolérance », indique le Pr Pierre-Louis Druais, président du Collège de médecine générale.
Des alternatives.
Autre exemple de retrait : l’antiacnéique Diane 35. Autorisé en France depuis 1987 et prescrit à plus de 300 000 femmes, il a été retiré du marché français en mai 2013. En plein débat sur les risques thromboemboliques des pilules de 3e et 4e générations, Diane 35 a rapidement été montrée du doigt. Mais deux mois après son retrait par les autorités françaises, l’Europe exigeait son retour dans les officines avec un renforcement des contraintes. La France a fini par s’y plier en janvier dernier, imposant une prescription en deuxième intention exclusivement dans le traitement de l’acné.
Quoi qu’il en soit, les retraits de médicaments ne sont pas toujours problématiques. Même sans alternative thérapeutique. C’est le cas des mucolytiques chez les enfants de moins de 2 ans. « Au départ nous avons été très gênés, car nous n’avions que peu de choses à proposer aux parents. Mais en fait, on ne se débrouille pas si mal sans ces spécialités, avec si besoin de la kinésithérapie respiratoire, ou des produits d’inhalation », constate le Dr Claude Leicher, président de MG France.
Néanmoins, les patients sont toujours demandeurs d’explications en cas de retrait du marché d’un médicament. « Nous avons le réflexe de dire qu’il s’agit d’un principe de précaution, mais notre position est assez inconfortable », avoue le Dr Charles-Henry Guez, généraliste à Sainte-Foy-Lès-Lyon. Outre les suppressions pures et simples, les généralistes déplorent les restrictions d’indications, qui amputent leur liberté de prescription et obligent le patient à passer par la case spécialiste.
L’atout DP.
Autre souci relevé : les lacunes dans la communication de la pharmacovigilance. Car aujourd’hui, les médecins sont essentiellement avertis des suppressions ou des ruptures de médicaments par le pharmacien, c’est-à-dire après avoir prescrit le médicament. Ou, pire, ils sont mis au courant par les médias. Charles-Henry Guez en vient à regretter l’Afssaps devenue l’ANSM* : « il existait auparavant un groupe de contact qui nous tenait au courant des modifications de prescription. » Et cela manque aux médecins.
Les pharmaciens, eux, disposent d’un outil très performant : le dossier pharmaceutique (DP) et ses déclinaisons, notamment le DP Rappel. « La procédure de retrait d’un médicament ou d’un retrait de lots est bien intégrée, nous avons l’information quasiment en temps réel et nous réalisons immédiatement le renvoi des boîtes vers le grossiste. Nous avons d’ailleurs une obligation de conservation de l’ordre de retrait à des fins de traçabilité. Bientôt, avec le code Datamatrix, la traçabilité se fera pour chaque boîte de médicament, ce qui permettra de remonter jusqu’au patient », explique Abraham Abisror, conseiller qualité à l’UTIP Association et titulaire en Seine-et-Marne. Aux yeux de Raphaël Moreau, membre de l’Académie de pharmacie, le rôle du pharmacien est essentiel, non seulement par ses explications pédagogiques dirigées vers ses patients, mais aussi dans sa participation aux signalements d’effets indésirables. « Ces déclarations sont primordiales dans la surveillance des nouvelles molécules », affirme-t-il. Au final, les procédures de pharmacovigilance semblent efficaces sans pour autant priver les Français « d’un arsenal thérapeutique important qui permet de bien les soigner », ajoute l’Académicien.
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