Si le nom vaccin tire son origine latine de « vacca », c’est grâce aux premières préparations vaccinales tirées de pus de vaches infectées par la vaccine, dont le virus responsable est proche de celui de la variole, en moins dangereux.
Mais avant la vaccination se pratiquait la variolisation, un des premiers moyens de lutte contre la variole à l’origine de milliers de décès. Décrit dans les textes médicaux chinois du Ve siècle, le principe est simple : utiliser le pus ou les squames broyées d’un malade et les placer dans les narines d’un sujet sain pour lui procurer une protection durable. En Inde au XVIe siècle, dans l’Empire Ottoman, en Europe occidentale, la variolisation se répand, des plus hautes sphères sociales aux populations défavorisées, servant le plus souvent de cobayes. Il faut attendre la variolisation de Louis XVI et de la famille royale en 1774 pour que cette pratique soit enfin reconnue par l’Académie des Sciences.
Une époque, un concept
Qui de Jetsy ou de Jenner doit être considéré comme le père de la vaccination, telle est encore la question. En 1774, Jetsy est le premier à tenter une immunité artificielle contre la variole en inoculant chez sa femme et ses enfants le virus de la vaccine. 20 ans plus tard, Edward Jenner se fait connaître en mettant en pratique la théorie de l’atténuation des germes par passage d’une espèce animale à une autre. Par scarification, il inocule le virus de la vaccine dans la peau de James Philipps, âgé de 8 ans, puis procède à une variolisation, sans déclencher de maladie. De nombreuses campagnes de vaccination contre la variole sont déployées pour éradiquer finalement la maladie en 1976.
Au XVIIIe siècle, Louis Pasteur met en évidence la protection des poules contre le choléra par l’injection de germes atténués. Le premier vaccin atténué artificiel est ainsi créé. Mais c’est le 4 juillet 1885 que Pasteur devient célèbre : Joseph Meister, mordu par un chien enragé, est sauvé grâce à l’administration du premier vaccin humain à virulence atténuée contre la rage, préparé à partir de la moelle de lapin malade. Devant ce succès, de nombreux candidats recevront le vaccin, dont le jeune berger Jean-Baptiste Jupille. Dans la lignée de Pasteur, les chercheurs Wright, Kolle et Haffkine produisent les premiers vaccins tués contre la typhoïde, le choléra et la peste.
Succès et scandales
En 1908, Albert Calmette et Camille Guérin préparent leur bacille tuberculeux (BCG), aux propriétés antigéniques conservées, mais dont la virulence est atténuée par les passages successifs sur milieu de culture. Le BCG est proposé pour la première fois en 1921, par voie orale, à 30 nouveau-nés ainsi immunisés contre la tuberculose. Les campagnes de vaccination se développent progressivement jusqu’en 1931, année du drame de Lübeck en Allemagne. 72 enfants décèdent d'une tuberculose généralisée et 131 autres développent une tuberculose clinique en raison d’un vaccin contaminé localement par un bacille tuberculeux humain virulent. Aujourd’hui, le BCG est le vaccin le plus utilisé au monde et reste recommandé en France chez les enfants à risque élevé de tuberculose.
La découverte fortuite d’Alexander Glenny et de Barbara Hopkins en 1923 de l’inactivation de la toxine diphtérique par le formol permet la fabrication des anatoxines diphtériques et tétaniques, retrouvées dans les préparations vaccinales actuelles.
Quant à la vaccination contre la poliomyélite, son succès est lié à l’importante épidémie sur le continent américain après la Seconde Guerre Mondiale, touchant même le Président Roosevelt. En 1954, un vaccin injectable et inactivé est proposé par Jonas Salk, suivi, 3 ans plus tard par un vaccin atténué oral par Albert Sabin. Des centaines de milliers d’enfants américains sont alors vaccinés sans hésitation, jusqu’en 1955. L’utilisation de lots de vaccins incomplètement inactivés conduit à la contamination de 204 enfants et la contestation de l’efficacité de la vaccination… Grâce à l’Initiative Mondiale de l’Éradication de la Poliomyélite créée en 1988, le nombre de cas de poliomyélite a baissé de plus de 99 %. Quelques cas sont encore retrouvés au Pakistan et en Afghanistan où les campagnes de vaccination sont difficilement applicables dans un contexte de guerre et de suspicion religieuse.
Mais l’hésitation vaccinale ne sévit pas qu’au Moyen-Orient. Les affaires sur les effets secondaires des vaccins ont fortement ébranlé la confiance de la population et même du corps médical. Tel est l’exemple du vaccin coquelucheux : d’abord préparé à partir de germes entiers, son acceptation était limitée due aux effets indésirables graves (fièvre et convulsions). Actuellement, le vaccin coquelucheux acellulaire, élaboré avec des toxines pertussiques, mieux toléré, est utilisé en France.
Malgré le développement de vaccins plus sécuritaires et plus performants, la vaccination reste un sujet à débats : sclérose en plaques et vaccin contre l’hépatite B, autisme et vaccin ROR, toxicité des adjuvants… Ces liens, bien que réfutés par de nombreuses études, persistent dans la mémoire populaire. L’avenir de la vaccination n’est pas sombre pour autant : les recherches continuent pour mettre au point les vaccins du XXIe siècle qui permettront, un jour prochain, d’éradiquer les fléaux actuels du paludisme et du VIH.
Le pharmacien et la vaccination
Si le pharmacien d’officine répond à de nombreuses interrogations sur l’efficacité et les effets secondaires des vaccins, son rôle d’information sur l’intérêt individuel et collectif de la vaccination reste primordial. Depuis septembre 2015, il a l’opportunité de suivre le calendrier vaccinal de ses patients grâce au DP-vaccination, outil informatique enregistrant la délivrance des vaccins pendant 21 ans.
Autre pas dans l’amélioration de la couverture vaccinale : la vaccination en officine. Une formation sur l’immunologie, la pratique de l’injection et les gestes à connaître en cas de réaction anaphylactique est requise pour assurer la sécurité des patients. La phase d’expérimentation est prévue à l’automne prochain, avec le vaccin antigrippal, dans les régions Nouvelle Aquitaine et Auvergne Rhône-Alpes.
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