COMMENT expliquer le succès croissant des compléments alimentaires, dont le marché avoisine le milliard d’euros ? Peut-être par ces promesses qu’ils avancent et qu’on a envie d’entendre. Car ces fameuses allégations offrent cette simplicité de langage, qui parle à tout le monde tout en répondant à chacun. Oui, les allégations sont faciles à comprendre pour le consommateur. Plus encore, elles n’effraient pas, faisant ainsi un pied de nez au médicament et à ses indications imbuvables. La recette est pourtant simple. La plupart des produits utilisés sont connus depuis longtemps. Il y a avec les compléments alimentaires comme un parfum d’antan, un retour à l’apothicairerie, lorsque le pharmacien savait utiliser la nature pour soulager les maux. Il suffisait d’y penser ! Tandis que le public affiche un intérêt grandissant pour le « naturel » et le « bio », certains industriels se sont souvenus de ces produits vertueux, que le médicament allopathique avait finis par éclipser.
L’offre et la demande.
Il faut dire que le confort est une préoccupation de nos sociétés occidentales, et que les compléments alimentaires sont en mesure de soulager nos bobos. La femme, le sujet âgé et les étudiants constituent des cibles importantes. Contre les grands effets indésirables de la vie, que sont la fatigue, le stress, le vieillissement de la peau et des articulations, la perte de mémoire, il y en a pour tous les goûts. Le soja pour la ménopause et les bouffées de chaleur, les folates et la vitamine B pour la femme enceinte, la cranberry pour le confort urinaire, le cartilage de requin pour les articulations douloureuses… Il faut dire aussi qu’un certain flou persiste quant au rôle exact des nutriments dans le développement ou à l’inverse, la prévention des maladies. Ce qui est sûr, c’est que l’importance de l’alimentation, et plus précisément les bienfaits de certains aliments, a été sous-estimée jusqu’à très récemment. Mais si quelques études en bonne et due forme démontrent l’intérêt de la cranberry, des oméga 3 ou de la lutéine, il y a encore beaucoup à faire pour nombre d’autres produits faisant l’objet d’allégations. Se baser sur les vertus ancestrales et sur l’observation est un premier pas, une orientation pour trouver une utilisation sanitaire à un produit. Mais cela ne suffit plus aujourd’hui. La démonstration de l’efficacité, et plus encore, de la sécurité du produit, est indispensable.
Un peu d’ordre s’il vous plaît !
Les consommateurs sont-ils dupes ou veulent-ils être dupes ? Quoi qu’il en soit, les allégations, jusqu’à très récemment, étaient rédigées à des fins commerciales. Nous dire ce que nous voulons entendre, c’est l’apanage des publicitaires. Les autorités ont donc pris acte des dérives possibles liées aux allégations en terme de sécurité des consommateurs. Un travail collectif sur ce sujet à l’échelle européenne s’est imposé, permettant in fine d’encadrer et d’harmoniser les pratiques dans ce domaine. Le règlement du 20 décembre 2006 pose les principes à respecter si l’on veut alléguer, interdisant notamment toute information pouvant nuire à la santé du consommateur. Dans le cas des allégations de santé, une directive européenne prévoit les normes d’étiquetage, imposant de faire figurer la valeur énergétique et la composition nutritionnelle qualitative et quantitative. Une allégation doit également s’accompagner d’informations complémentaires, telles que les modalités de consommation du produit allégué, les risques de surdosage et les personnes pour lesquels la consommation de ce produit doit être évitée. Enfin, une évaluation des risques relatifs à la sécurité des aliments destinés à l’alimentation humaine est assurée par l’Afssa (Agence française de sécurité sanitaire des aliments) en France et par l’Efsa (Autorité européenne de sécurité des aliments) en Europe.
Sur le marché des compléments alimentaires, le pharmacien doit faire face à la concurrence des autres points de vente, magasin bio notamment. Mais fort de son expérience avec le médicament, lui permettant de réfléchir en terme de bénéfice/risque, et de ses connaissances universitaires sur la pharmacognosie notamment, il reste un conseiller incontournable. Une allégation qui lui convient parfaitement.
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