Si l’or était tenu comme un médicament par les anciens Égyptiens et par la médecine hippocratique, ce ne fut guère qu’au XVe siècle qu’il devint possible de le préparer sous une forme aisément ingérable : l’aurum potabile, l’or buvable, en fait une solution de trichlorure d’or. Paracelse (1493-1541) le prescrivait pour traiter les paralysies et les fièvres. Mais l’or dut surtout sa grande popularité à Johann Rudolf Glauber (1604-1688), un alchimiste hollandais, qui livra en 1651 une somme sur ses usages médicinaux.
En 1728, un diplomate russe, le comte Alexis Bestucheff-Rioumine (1693-1768), inspiré par l’alchimiste allemand Johann Friedrich Böttger (1682-1719), formula avec un certain Lembke, lui-même également alchimiste, une solution aqueuse jaune… d’or qu’il nomma « élixir d’or ». Elle finit par être commercialisée au prix fort sous le nom de « Teinture nervine jaune de Bestucheff ».
Mais, l’année même de sa conception, Lembke en vendit la formule à un Français, le général de La Motte, qui l’introduisit en France. Il formula en fait des gouttes jaunes et des blanches (« élixir d’or et blanc ») : les premières traitaient les « vapeurs », « l’épaississement du sang ou l’âcreté des humeurs », les seconde les rhumatismes, la goutte, le scorbut, les maladies vénériennes, etc. (il était conseillé de les associer !). S’il est probable que de l’or ait fait partie de la formulation imaginée par Bestucheff, il est non moins évident que, rapidement, l’élixir d’« or » n’ait contenu que du perchlorure de fer - évidemment plus rentable ! -.
Du bacille de Koch à la polyarthrite
Mais l’histoire de la chrysothérapie prit une autre tournure lorsque le célèbre Robert Koch (1843-1910), « découvreur » du bacille tuberculeux, suggéra en 1890 que des complexes de cyanure d’or détruisaient le non moins célèbre bacille… En 1913, Adolf Feldt (laboratoire Hoechst) confirma l’action des sels d’or sur les germes.
Ses travaux conduisirent à l’introduction en thérapeutique du Krysolgan, en 1917. Peu après, ce même laboratoire commercialisa un antituberculeux à base d’or : la Sanochrysine dont l’efficacité sur diverses mycobactéries fut prouvée en 1924 par Holger K. M. llgaard (1885-1973). Malgré sa toxicité, elle fut commercialisée jusqu’en 1931, année où un essai en double aveugle conduit par le pneumologue américain James B. Amberson (1890-1979) montra les patients traités par sérum physiologique répondaient plus favorablement que ceux bénéficiant du sel d’or, en fait mal toléré.
Les choses auraient pu en rester là. Mais un pneumologue allemand, K. Lande, testa un complexe d’aurothioglucose en suspension huileuse (Solganal), réputé moins toxique. Ayant remarqué, par hasard, que les injections réduisaient fortement les douleurs articulaires chez des patients arthritiques, il recommanda de l’essayer dans cette indication, inspirant ainsi à un rhumatologue français, Jacques Forestier (1890-1978), l’idée de tester l’aurothiopropanol-sulfonate de sodium (devenue l’Allochrysine) : ce dernier livra dès 1935 des résultats favorables à ce complexe d’or. Toutefois, ce ne fut qu’en 1945 que Thomas N. Fraser, à Glasgow, publia les résultats d’un vaste essai en double aveugle : il constitua le rationnel du développement de la chrysothérapie dans le traitement des rhumatismes inflammatoires chroniques et notamment de la polyarthrite rhumatoïde.
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