L’HISTOIRE commence en plein cœur du Moyen âge lorsque les épidémies et l’extrême pauvreté troublent l’ordre social. Plusieurs hôpitaux voient alors le jour dans les comtés de Flandre et de Hainaut, dont le plus ancien connu est l’hôpital Saint-Jean de Bruges. À Lessines, la Française Alix de Rosoit, veuve d’Arnould d’Audenarde, grand bailli de Flandre (mort à la bataille de Taillebourg en 1242), respecte la volonté de son défunt mari en construisant un hospice pour recueillir et soigner les plus défavorisés. L’hôpital Notre-Dame à la Rose devient un site complètement autarcique, et en est aujourd’hui un des rares exemples en Europe, doté d’une ferme, d’un jardin des simples, d’un potager, d’un verger, d’un cimetière, et même d’une brasserie et d’une distillerie (une glacière, toujours visible, sera ajoutée au XIXe siècle). L’institution est confiée aux sœurs Augustines et les prieures sont souvent issues de la noblesse locale, comme en témoignent encore plusieurs portraits peints.
Au fil des époques, l’hôpital a été agrandi et modernisé, en particulier au XIXe siècle. Il fonctionnera jusqu’en 1980 avant d’être transformé en musée grâce à la persévérance d’un petit groupe de bénévoles qui se constitue en association en 1991. Cette reconversion ne fut pas simple. Pendant 15 ans, seules quelques visites étaient proposées le dimanche dans ce grand bâtiment à l’allure désaffectée. Les travaux (à hauteur d’environ 24 millions d’euros) dureront 12 ans pour redonner au lieu tout son éclat. En 1993, il est reconnu patrimoine exceptionnel par la région Wallonne et se voit bien aujourd’hui gagner les faveurs de l’UNESCO dans le cadre d’une inscription au patrimoine mondial d’un réseau patrimonial hospitalier et pharmaceutique européen comprenant plusieurs sites remarquables (Bruges, Gand, Anvers, Geel, Beaune, Tournus, Baugé, Tonnerre, Hautefort…). La démarche est en cours.
Impressionnantes collections pharmaceutiques.
Aujourd’hui, près de 35 000 visiteurs passent la porte de l’hôpital Notre-Dame à la Rose chaque année pour en découvrir les beautés artistiques (les tableaux du XVIIe siècle de la salle du réfectoire, la chapelle baroque, ou encore une œuvre énigmatique du XVIe siècle représentant La Lamentation autour du Christ, où le Christ est peint avec une poitrine féminine et un geste d’allaitement), ainsi que les impressionnantes collections médicales et pharmaceutiques. Celles-ci sont composées de nombreux instruments médicaux et pharmacologiques. Dans les vitrines, se succèdent clystères, bocaux à sangsues, objets de trépanation, bouteilles et boîtes de médicaments, irrigateurs du Dr Eguisier et autres seringues ou bains d’yeux. L’univers pharmaceutique est particulièrement bien représenté, en premier lieu par le grand jardin des simples où les sœurs cultivaient toutes sortes de plantes médicinales (angélique, camomille, menthe, valériane, chélidoine, consoude, bourrache, pavot, belladone…), puis par la pharmacie du XIXe siècle où se bousculent des contenants de toutes formes et des ouvrages scientifiques spécialisés, telles que la fameuse Pharmacopée de Nicolas Lémery ou la Pharmacopée royale galénique et chimique de Moyse Charas. La présence de nombreux pots à pharmacie, de bouteilles d’eaux distillées et de mortiers dans cette pharmacie s’explique en partie par l’importance de la culture des plantes médicinales dans la région de Lessines au XIXe siècle et jusqu’en 1950. On peut également y voir un appareil à décoction, un alambic, ainsi qu’un drôle d’appareil constitué d’une boule qui permettait de mélanger plusieurs ingrédients afin d’obtenir une pâte ou un sirop homogène.
L’histoire des pratiques pharmaceutiques se décline ainsi à travers des objets classiques ou plus insolites présentés sur les étagères de l’ancienne pharmacie. Au vu de cet ensemble si complet, on imagine une activité assez intense au XIXe siècle. En témoigne d’ailleurs le remède phare de la pharmacie, mis en point en 1898 par la religieuse Marie-Rose Carouy, qui affirmait que la recette de l’Helkiase lui était apparue dans une vision du Sacré-Cœur de Jésus. Ce remède fera la renommée et la fortune de l’hôpital pendant plusieurs années. Il s’agissait d’un antiseptique cicatrisant à base de bichlorure de mercure, à usage externe, préconisé contre les ulcères, les varices, les eczémas, les brûlures et les blessures gangrenées. Cet onguent réputé pour ses guérisons miraculeuses acquit une renommée internationale, jusqu’aux Indes et aux Philippines, assortie d’une campagne publicitaire rondement menée par la prieure. Elle diffusa son invention, accompagnée du symbole de la rose, dans plusieurs encarts publicitaires et même aux expositions universelles ! L’Helkiase devint la mascotte de l’hôpital Notre-Dame à la Rose de Lessines jusqu’au début des années 1930 lorsqu’on se rendit compte que sa composition provoquait des effets secondaires indésirables. Il fut alors retiré du marché.
L’hôpital-musée est aujourd’hui un site touristique de premier plan dans la région Wallonne et fait partie du réseau des Hôtels-Dieu et Apothicaireries ainsi que du réseau belge Hospitium. À la frontière de la France et de la Belgique, l’hôpital Notre-Dame à la Rose de Lessines est un beau témoignage de la tradition hospitalière de ces régions de l’Est et du Nord de la France, jusqu’en Flandre.
Contact : 00 32 68 33 24 03 / info@notredamealarose.com. www.notredamealarose.com.
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