On a tous déjà vu cette charmante petite boîte ovale renfermant des petites perles blanches qui fondent sous la langue. Le packaging très reconnaissable, qui a fait le succès des Anis de Flavigny, représente un jeune berger et une jeune bergère en pleine conversation amoureuse sur fond de décor champêtre. À l’origine de cette image, une photographie, celle des enfants de Jacques-Edmond Galimard qui les a fait poser à quelques pas de la fabrique pour créer le visuel de sa marque commerciale.
On est au milieu du XIXe siècle. Jacques-Edmond est pharmacien dans la vallée de Flavigny et a déjà tenté de mettre sur le marché un comprimé à base de menthe poivrée, la pipéridine, qui n’a pas marché. À Flavigny, voyant qu’il existe huit petites fabriques de bonbons à l’anis, il a l’idée de les racheter et de les fusionner en une seule qu’il installe dans l’ancienne abbaye de Flavigny, à l’endroit même où, pendant des siècles, les moines bénédictins ont confectionné l’enrobage sucré de la graine d’anis, dont le succès était déjà grand au Moyen âge et jusqu’à la Révolution.
On sait, par exemple, que Blanche de Castille, la mère de Saint-Louis, aurait fortement apprécié ces petites dragées, à tel point qu’aujourd’hui les habitants de Flavigny surnomment leurs bonbons les « anis à la reine ». Elle était si friande d’anis qu’elle fonda même l’Ordre des Anysetiers du Roy, composés de médecins et d’apothicaires, tous spécialistes de l’anis (toujours existant sous forme d’association et portant le nom d’Ordre International des Anysetiers). Louis XIV également aurait goûté et aimé les Anis de Flavigny. Mme de Sévigné ou encore les princes de Condé en auraient raffolé.
Il faut dire qu’une de leurs principales vertus est de donner bonne haleine, ce qui, à l’époque, était fortement recherché. Déjà, dès l’Antiquité, le Romain Pline reconnaissait cette vertu à l’anis rapporté d’Orient : « Il rend l’haleine plus douce et ôte la mauvaise odeur de la bouche… Il donne de l’appétit, l’appétit que la mollesse de nos jours demande à une plante depuis que le travail a cessé de le procurer. Bouilli, flairé ou pris en boisson, il arrête le hoquet. Les feuilles en tisane font passer l’indigestion. Sosiméne [un médecin] assure aux voyageurs qu’en buvant la graine de l’anis, ils se préserveront de la fatigue. L’anis est diurétique, il calme la soif et est aphrodisiaque. »
Recettes vertueuses
À la suite de Pline, les médecins de l’École de Salernes à l’époque médiévale, puis Ambroise Paré à la Renaissance, préconisèrent l’anis pour calmer les douleurs d’estomacs. De nos jours, la pharmacie fait appel à l’anis qui entre dans la composition des espèces purgatives du Codex, dans la teinture d’anis, dans l’élixir parégorique contre les diarrhées, dans la liqueur ammoniacale anisée contre la toux, ainsi que dans la composition de certains dentifrices et de nombreux autres médicaments. Évidemment, on ne peut attribuer aux Anis de Flavigny autant de vertus thérapeutiques mais ils font bien partie de cette longue liste de recettes vertueuses qui font du bien.
C’est le voyageur romain Flavien qui aurait apporté la graine d’anis vert de Syrie jusque sur la colline qui porte désormais son nom, où il avait fait construire sa villa. L’histoire est belle et se poursuit jusqu’à nos jours. À Flavigny, dans la plus pure tradition, les graines d’anis se transforment en confiseries selon le savoir-faire ancestral, dans de grandes bassines de cuivre de dragéification. Confectionnées en 15 jours, délicatement enrobées de sirop de sucre aromatisé, dans la fabrique familiale et artisanale qui perpétue la recette originale datant de 1591. Catherine Troubat, à la tête de l’entreprise des Anis de Flavigny, est la digne héritière de plusieurs générations de fabricants de ces délices anisés qui sont une des plus vieilles marques de France.
À la veille de l’ouverture du petit musée attenant aux ateliers de fabrication, elle évoque leur histoire : « On ne sait pas exactement quand furent inventés les Anis de Flavigny mais les moines de l’abbaye en fabriquaient déjà. Dans le grenier de la fabrique, j’ai retrouvé l’écriteau « Pharmacie Galimard ». Jacques-Edmond a apporté beaucoup aux Anis de Flavigny. C’est lui qui a lancé une marque claire. Il a eu l’idée de la photographie avec ses enfants, et a réalisé des étuis de différents formats. C’était très pertinent à l’époque. »
Ses fils reprirent le flambeau de l’affaire familiale en encourageant l’exportation des Anis. Paul Galimard entreprit ainsi d’installer des kiosques en bois au pied de la Tour Eiffel lors de l’Exposition universelle de 1900 pour faire déguster ses bonbons aux touristes. « Cette initiative a vraiment aidé la commercialisation des Anis de Flavigny, poursuit Catherine Troubat. Puis, c’est mon grand-père, Jean Troubat, qui a acheté la fabrique aux Galimard en 1923. Nous avons une histoire plusieurs fois centenaire. »
Aujourd’hui, les Anis de Flavigny sont exportés dans plus de 35 pays et se déclinent en sept arômes naturels (anis, fleur d’oranger, menthe, rose, réglisse, citron, violette). Ils conquièrent également le marché du bio avec d’autres saveurs comme mandarine ou gingembre. On peut donc les trouver dans les magasins biologiques, dans les stations-service, les grandes épiceries, les bureaux de tabacs, les jardineries, les boutiques Relay et les Monoprix.
Mais surtout, ils entrent enfin en pharmacie ! Après des siècles de confection par des moines apothicaires, les Anis de Flavigny retrouvent le chemin du monde médicinal. Catherine Troubat a eu ses premières commandes d’officines il y a quelques mois et est actuellement en négociation avec des groupements pharmaceutiques pour placer ses Anis dans un grand nombre de pharmacies. Pourquoi se priver d’un petit plaisir, sans aspartame, ni colorant, ni arôme artificiel, qui aura toutes les chances de rendre la digestion plus agréable ?
Informations pratiques :
Les Anis de Flavigny,
rue de l’Abbaye,
21150 Flavigny-sur-Ozerain
16 octobre : ouverture du musée des Anis de Flavigny
La fabrique : entrée gratuite du lundi au vendredi de 9 heures à 11 heures sur réservation au 03 80 96 20 88.
La crypte : entrée gratuite de 9 heures à 18 heures en semaine et de 10 heures à 18 heures le week-end.
La boutique : tous les jours de février à mi-novembre
Site web : www.anisdeflavigny.com.
Dans votre bibliothèque
« Deux par deux »
« Notre Santé est en jeu »
Quelles solutions face au déclin du système de santé ?
Dans votre bibliothèque
« Le Bureau des affaires occultes », ou les débuts de la police scientifique
USA : frites, bière, donuts gratuits… contre vaccin