Très médiatisés au milieu des années 2010, puis quelque peu laissés de côté faute d’avoir trouvé leur marché, les objets connectés de santé reviennent par la petite porte. L’essor soudain de la téléconsultation depuis l’année dernière a en effet ravivé l’intérêt que ces outils suscitent pour aider les médecins dans leur diagnostic à distance. On parle ici d’objets connectés de santé, et non de bien-être qui eux semblent avoir trouvé leur public. Les prestataires préfèrent d’ailleurs souvent les nommer dispositifs médicaux connectés pour les distinguer du « wellness ». Un retour discret néanmoins, la percée de la téléconsultation étant relative puisqu’elle est surtout perceptible du côté des patients à domicile, moins par le biais des pharmaciens. Or c’est par l’intermédiaire de ces derniers que les dispositifs médicaux connectés peuvent trouver leur meilleur usage, dans le cadre de la téléconsultation bien sûr, et bientôt dans celui des télésoins et de la télésurveillance. Et c’est un retour d’autant plus discret que les pharmaciens ont d’autres chats à fouetter actuellement, avec les tests antigéniques et la vaccination. Mais une dynamique a été enclenchée. Médecins, patients et pharmaciens ont désormais conscience de l’intérêt de la téléconsultation, et avec elle, celui des dispositifs médicaux connectés.
Défricher le marché
Pour les pharmaciens, en tout cas pour ceux que cette activité intéresse, cette dynamique apporte de nombreux avantages : une offre complète intégrant logiciels et matériels et le pouvoir prescripteur des acteurs de la téléconsultation. C’est en effet à eux que revient le délicat travail de « défrichage » du marché des objets de santé et dispositifs médicaux connectés. « Il y a de grandes disparités d’un fabricant à l’autre », affirme ainsi Jean Tafazzoli, président de la société Maquestionmédicale, un spécialiste de la téléconsultation fondée par des professionnels de santé. Et aussi celui de donner un sens et un objectif à l’usage de tels dispositifs. « Qu’ils soient connectés, oui, mais pour transmettre les données à qui et pour en faire quoi ? » rappelle Alexis Leprince, responsable offre et produits de Visiomed. « Un tensiomètre non connecté suffit le plus souvent à de nombreux patients. » Le cadre dans lequel ces outils peuvent être utilisés suscite donc toute l’attention de ces prestataires, et c’est pour cette raison qu’ils fondent autant d’espoirs dans la future « légalisation » de la télésurveillance, qui devrait apporter un nouvel élan dès le début de 2022, comme a pu le faire la possibilité donnée aux pharmaciens d’assurer des téléconsultations en septembre 2019.
Accélération de l’innovation
Alors que les usages des dispositifs médicaux commencent seulement à se dessiner chez les professionnels de santé et leurs patients, la technologie, elle, poursuit son rythme de développement, beaucoup plus rapide. « Il y a une véritable accélération de l’innovation dans l’électronique médicale », assure Laurent Goldstein, directeur médical de Tessan. « Nous avons du mal à suivre tellement ça va vite. » L’innovation concerne d’abord les outils déjà existants et utilisables en téléconsultation, l’un des exemples les plus mis en avant est celui des dermatoscopes. « Nous avions au début une image qu’on peut qualifier de standard, poursuit Laurent Goldstein, et très vite, nous avons eu de la haute résolution. Nous travaillons désormais avec de très hautes résolutions, qui dépassent les qualités de l’œil humain et révèlent des détails microscopiques. »
Parallèlement, les dispositifs médicaux utilisés tendent à améliorer leur ergonomie. Cela s’illustre par une miniaturisation croissante et, petit à petit, par l’apparition d’appareils « tout-en-un », des dispositifs connectés qui sont et seront capables d'être à la fois thermomètre, tensiomètre, etc. Cela existe déjà d’une certaine manière chez Qare, qui propose un petit boîtier avec 5 applications en un : un thermomètre connecté, une caméra (pour la peau, la gorge), et autres modules secondaires qui se clipsent sur le dispositif principal. Ce spécialiste de la téléconsultation devrait bientôt ajouter un oxymètre à son boîtier, il attend l’obtention du marquage CE qui devrait arriver d’ici la fin de l’année. « Tout est centralisé, compact et prend très peu de place, ce qui est important en pharmacie », déclare Donatien Le Liepvre directeur projets stratégiques.
D’autres prestataires travaillent également sur ce concept de tout-en-un. Ils étendent aussi leurs gammes de produits, notamment avec des oxymètres et des spiromètres (ces derniers mesurent l’élasticité pulmonaire), mais aussi avec des électrocardiographes numériques pour réaliser des ECG, si un jour on attribue ce rôle aux pharmaciens français comme cela se fait en Italie par exemple. Et ce n’est qu’un début. « Nous allons voir apparaître des capteurs en tout genre, prédit Laurent Goldstein, comme par exemple, dépister certaines maladies, telle le diabète, à travers l’haleine. » Ces capteurs peuvent prendre des formes inimaginables, le champ des possibles n’arrête pas de s’élargir, ajoute Jean Tafazzoli. « On aura ainsi des pansements avec des puces NFC capables d’envoyer des données sur la cicatrisation de la peau par exemple. » L’électronique médicale, ce sera justement des capteurs placés un peu partout. « Tout ce qui est émis par le corps peut être traduit en signal électronique », insiste Laurent Goldstein. Un jour, tous les capteurs seront dans un smartphone, prédit encore Jean Tafazzoli, et ce à l’horizon de cinq ans. Seule la palpation abdominale semble représenter pour l’instant un obstacle insurmontable pour l’usage de dispositifs médicaux connectés.
Qualité des connexions
Autre aspect à ne pas négliger, les technologies utilisées pour transmettre les données. Un aspect important, de là découle la qualité des connexions et donc des transmissions de données. Pour certains prestataires, il n’y a pourtant pas vraiment de débat, « le Bluetooth et le WiFi sont fiables », estime ainsi Alexis Leprince. Mais force est de constater que chacun a ses préférences, Qare avec son prestataire Tytocare est sur du WiFi, « il a une plus grande portée que le Bluetooth, et s’il ne marche pas bien parce que se trouvant dans une zone où on capte moins, il est possible de se rabattre sur la 4G », explique Donatien Le Liepvre, tandis que pour sa part, Maquestionmédicale préfère nettement le Bluetooth, « il n’y a pas de perte de qualité quand on envoie une image », plaide Jean Tafazzoli. Tout dépend aussi du matériel utilisé, estime encore Alexis Leprince, « il arrive même que le filaire apporte plus de garanties, comme dans le domaine des stéthoscopes numériques, avec lesquels quand on envoie un signal à distance, on perd 30 % de la qualité si on passe par un appareil sans fil ».
Au-delà de ce débat, le spécialiste Withings développe une gamme de produits à connexion cellulaire. Ce fabricant qui s’est longtemps consacré aux produits grand public s’intéresse désormais aux relations entre professionnels de santé et patients, et compte sur des produits équipés d’une carte SIM de telle sorte qu’ils puissent directement s’interconnecter avec les logiciels métiers des professionnels de santé, explique en substance Vincent Vercamer, responsable de l’innovation et de la stratégie Europe de Withings.
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