« LAISSEZ, mon robot s’occupe de tout ». Certains pharmaciens pensent que l’automatisation de leur officine va résoudre tous leurs problèmes de délivrance, de rangement et de gestion de stock. « Il faut être transparent et bien faire la différence entre la théorie et la pratique, prévient Olivier Resano, directeur commercial d’Apotéka. L’automate est un moyen et non une fin en soi, ce n’est pas un fourre-tout qui fait tout, tout seul. Il faut définir ses limites techniques et ne pas laisser le client acheter du rêve. Trop souvent celui-ci cherche à se rassurer en terme de fiabilité de la machine, mais il oublie son efficacité réelle et la notion de service rendu. »
Une délivrance à grande vitesse.
Il n’y a pas de système idéal, alors robot ou automate ? Il est vrai que le robot, par rapport à l’automate, est plus complexe, il demande plus de réglage et de suivi car les pièces sont en mouvement permanent. Il est également plus lent à la délivrance. « Il est important de matérialiser les conséquences de la vitesse en fonction des flux de clientèle : un automate peut délivrer 10 à 15 produits en 2 à 3 secondes alors qu’il faudra deux minutes à un robot », remarque Olivier Resano. Chez Pharmax, la priorité est donnée à l’optimisation de la délivrance avec des automates équipés de canaux amovibles « intelligents ». Chaque canal est équipé d’un éjecteur, ce qui assure une vitesse de délivrance optimale quel que soit le nombre de postes de vente travaillant simultanément. Ce gain de productivité (de l’ordre de 30 %) se répercute directement sur la clientèle. « Les flux de clientèle n’étant pas linéaires, seul un automate peut répondre instantanément et rapidement à une augmentation de la demande » précise Stéphane Nizard, directeur du groupe. La société Arx riposte avec sa grande nouveauté : le robot Vmax multi picking qui, en un seul mouvement, permet de prendre plusieurs boîtes (jusqu’à neuf) de la même référence ou non. « Il est plus rapide et plus compact, tout en respectant la logique du robot qui fait que chaque boîte a son identifiant, ce qui représente un gros avantage pour les codes Datamatrix » explique Didier Dubois, directeur commercial. Vmax apporte également une solution à un autre reproche fait aux robots, en acceptant les boîtes rondes et les petites boîtes car il est muni, non plus de ventouses, mais de pinces. Arx et Rowa vont encore plus loin dans l’automatisation avec Visavia, un guichet de délivrance et de conseil piloté à distance par le pharmacien et télécommandé via une connexion interne sécurisée. Une demande d’autorisation d’exploitation est en cours en France.
Chargement manuel ou automatique ?
Sur cette question encore, les avis des fabricants divergent. « Chez nous, le rangement tout automatique n’est pas une priorité, c’est un confort supplémentaire qui peut permettre de gagner du temps mais ce n’est pas une solution économique pour la pharmacie. Actuellement 70 % des appareils vendus, toutes marques confondues, sont des automates à chargement manuel. Le temps gagné sur le temps de rangement n’est pas rentable sur le plan comptable » affirme Olivier Resano. Toutefois, pour répondre à la demande de certaines pharmacies, Apotéka a développé le robot semi-automatique Oméga, couplé à un automate, qui permet un rangement manuel rapide. Le Pharmatrack de Tecny Farma mise aussi sur le mixte avec un automate et l’adjonction possible d’un robot à chargeur automatique. Le chargeur autonome et automatique, Prolog de Arx, alimente le(s) robot(s) Rowa ou Max, le rangement est aléatoire mais le pharmacien a accès à son stock à tout moment avec une représentation graphique. Pour Didier Dubois, « le rangement semi ou tout automatique a indéniablement un avantage sur le manuel car il n’y a pas de logique économique à utiliser du personnel, même non qualifié, pour accomplir cette tâche ». Chez Pharmax, la fonction chargement et rangement n’est prise en compte qu’après avoir bien optimisé la délivrance. Le robot fonctionne de façon autonome par rapport à l’automate, ainsi le fonctionnement du chargeur ne ralentit pas la délivrance des produits.
La génération Unidose.
La société Mach4 Pharma implante toujours son robomate Speedbox et Medimat qui intègre de plus en plus de chargeurs automatiques, mais elle se lance sur le marché des machines unidoses dans les pas d’Euraf et de Robotik-dose. Issues de la pharmacie hospitalière, ces machines visent à séduire les structures type EHPAD, SAD, HAD ainsi que les maisons de retraite, pour un investissement allant de 100 000 à 180 000 euros. Elles délivrent automatiquement le médicament (uniquement les formes sèches comprimés ou gélules) à la dose unitaire ensachée, y compris les demi-comprimés. Depuis janvier 2009, Mach4 a implanté son Unidose dans quatre pharmacies en France. Bertrand Juchs, directeur général France de la société, pense que ce marché connaîtra une forte expansion dans les années à venir en Europe. « Déjà la législation est plus claire, les fonctionnalités logicielles intègrent de plus en plus d’applications pour les piloter, et ce concept explosera quand les industriels accepteront de nous livrer en vrac. ». l’Unidose de Mach4 dispose d’un contrôle automatique par caméra des doses en sortie machine, elle peut intégrer jusqu’à 400 canisters de produits différents et gérer jusqu’à 1 000 lits.
L’exemple d’une officine assistée par ordinateur.
La pharmacie du titulaire Pierre Olivier Masson à Bayeux, a été la première pharmacie d’Europe à être équipée d’un système complet permettant la prise en charge automatique de l’ensemble du processus de livraison-rangement-délivrance.
« Mon objectif et celui de mon équipe étaient d’améliorer la qualité de l’accueil et de la délivrance, d’optimiser notre disponibilité face à un flux important de clientèle, explique le titulaire. Le grand point à résoudre était d’installer un système entièrement automatisé et fiable, de la réception de commande jusqu’à la délivrance, en privilégiant une gestion de stock approfondie, la vitesse de délivrance n’était pas notre priorité. L’automate assure la vitesse mais pas toujours la qualité du stock, et après une étude poussée de faisabilité, j’ai opté pour un double robot Rowa-Arx équipé d’un système de délivrance rapide et d’une machine de rangement autonome (Prolog). Nous débitons 2 000 à 2 500 boîtes par jour, le stock est réparti aléatoirement dans les deux robots, et en cas de panne de l’un des deux robots, l’autre continue à fonctionner. » Ainsi les livraisons quotidiennes sont passées de six à deux et, en moyenne, le rangement et la validation de la commande du matin, la plus importante avec environ 1 000 à 1 500 boîtes (20 à 30 caisses), dure de 1 heure à 1 heure 30.
› CHRISTINE NICOLET
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