LES SENIORS vont-ils imposer la tablette dans le domaine du médicament ? Les différents prestataires sur ce marché naissant de la mobilité en pharmacie scrutent tous les indicateurs qui iraient dans ce sens. « Chaque année, les plus de soixante ans sont 10 % plus nombreux à utiliser des tablettes », affirme Philippe Feat, dirigeant de la société Appliphones, spécialisée dans les applications sur plateformes mobiles et sur Internet. Une croissance qui élargit de fait les applications possibles et qui va au-delà désormais du respect de l’observance des traitements, premier domaine où l’on utilise les applications mobiles en pharmacie. Pour l’instant, les déjà nombreuses applications destinées à des plates formes mobiles sont utilisables aussi bien sur des smartphones que sur des tablettes, histoire de ratisser le plus large possible. Mais peut-être le marché de la tablette commence-t-il à avoir certaines spécificités, notamment celle liée à l’âge de ses clients.
Des applications moins immédiates que pour les smartphones.
Le groupement Forum Santé a déjà quelques éléments de réponse. Il a en effet lancé au début de l’année différents services par le biais des plates formes mobiles, comme la géolocalisation, le renouvellement de l’ordonnance par transmission mobile ou encore le scan des boîtes de médicaments pour en connaître les éléments clés (date de péremption et des informations type notice). Diane Schakowskoy, responsable communication et marketing de Forum Santé estime que l’usage de ces services diffère selon le profil du patient et de la plate-forme utilisée. « La géolocalisation, par exemple, est plus volontiers utilisée sur les smartphones tandis que les tablettes sont destinées à des applications moins immédiates », explique-t-elle. Les seniors ont du temps, peuvent faire des recherches et viennent même en parler en officine. « Ils utilisent notamment la possibilité de poser des questions à des professionnels de santé et peuvent avoir une réponse immédiate par le biais de leurs tablettes », ajoute Diane Schakowskoy. Ici, la tablette est utilisée comme un remplaçant du PC.
Les seniors ne sont et ne seront pas les seuls à donner autonomie et dynamisme à la mobilité par le biais des tablettes. D’une manière générale, les applications développées sur ces plates formes mobiles sont destinées « à créer du lien, à fournir des services », selon Philippe Feat. Appliphones, qui cible des marchés très différents, s’intéresse désormais à celui de l’officine, certes très réglementé et de ce fait un peu plus difficile, mais néanmoins porteur. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si, pour l’instant, les réalisations sont le plus souvent le fait de groupements comme Forum Santé, mieux à même de penser les services pour un ensemble d’affiliés ou d’adhérents. D’autres proposent également des applications, d’éducation ludique pour les enfants autour des aliments pour Giropharm par exemple, ou encore le suivi des traitements chez Univers Pharmacie. Ce sont en général des prestations gratuites, ni les pharmaciens, ni les clients ne paient quoique ce soit de spécifique pour l’usage de ces applications.
Signature électronique.
Les tablettes ne sont cependant pas limitées à être des supports pour des services à destination des patients. Des usages plus directement liés à la délivrance existent également, comme par exemple la possibilité de signer une ordonnance en cas de non-possession de carte Vitale. Avec la numérisation des ordonnances rendue obligatoire, il est nécessaire de pouvoir transmettre la signature des patients sur les feuilles CERFA numérisées. CEPI Pharmavitale a ainsi lancé l’année dernière une application permettant au patient de signer directement sur IPad. « Le choix a été de se limiter à la plate-forme d’Apple, explique Franck Laugère, directeur général de l’éditeur, d’abord parce qu’au moment où nous avons lancé l’application, elle était la seule à pouvoir numériser les signatures. Et surtout parce que l’Ipad a une forte image, ce qui est un atout vendeur. » D’autres éditeurs proposent et vont proposer cette fonctionnalité. Des applications plus complètes existent sur d’autres marchés de la santé, telle le Pocket Vital 2 de la société Nogema Ingéniérie, destinée aux auxiliaires médicaux. Cette application permet, outre le suivi patient et la gestion de l’activité libérale, de réaliser et transmettre les feuilles de soins. Ni clavier, ni souris ne sont nécessaires, la saisie se fait sur écran avec un stylet. Nogema n’imagine pas pour l’instant porter cette application dans l’univers de la pharmacie, estimant les besoins des officines différents des auxiliaires de santé. De plus, cette application a nécessité l’homologation du GIE Sesame Vitale où l’on fait observer la nécessité de veiller aux questions de sécurité liées à l’usage des OS de plates formes mobiles.
Tablette et tableaux de bord.
CEPI Pharmavitale, permet aussi à ses clients pharmaciens d’avoir accès à leurs tableaux de bord de gestion officinale à partir des tablettes, une application simple qui apporte du confort. Vindilis propose aussi cette fonctionnalité, mais ce jeune éditeur a décidé d’aller plus loin et d’utiliser les tablettes dans le cadre d’une application plus sophistiquée, la gestion d’inventaires, en le couplant avec une douchette qui envoie des informations à la tablette, sous Androïd, laquelle assure une remise à jour du stock. Autre usage possible, à laquelle le groupement Univers Pharmacie réfléchit, l’usage des tablettes pour améliorer les relations entre les affiliés du groupement, « qui ont besoin de se connaître et de partager », selon Yann Derrien, chargé de communication. Pour Philippe Feat, la tablette sera sans doute plus utilisée pour des liens entre professionnels, tandis que le smartphone resterait le support privilégié dans les relations avec les patients.
Un support pérenne ?
Il y a donc des perspectives de développement ailleurs que dans le service proposé aux patients, mais il est difficile d’en estimer l’importance. Le problème n’est pas technique, selon Yann Derrien, « la technologie permet de faire un très grand nombre de choses, seulement, les gens doivent suivre. » Il faut également compter avec la concurrence que se livre l’Ipad et sa plate-forme rivale Androïd. On constate que parfois, les éditeurs privilégient l’un ou l’autre des deux OS. Surtout, l’avenir des tablettes n’est pas aussi stabilisé qu’on pourrait le penser, si l’on en croit Yann Derrien. « Les technologies vont tellement vite qu’on peut déjà imaginer la disparition des tablettes dans un avenir proche. » Les plates formes mobiles peuvent en effet encore évoluer de manière drastique. Pour les acteurs qui travaillent sur des applications, il est donc nécessaire d’avoir « un coup d’avance » sur un marché où ils sont très dépendants des supports et de leurs gabarits.
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