Béatrice Clairaz-Mahiou n'en revient toujours pas. « C'est un ami qui m'a prévenue. Rendez-vous compte que je ne saurais rien si la presse n'en avait pas parlé… », explique au « Quotidien » la titulaire de Châtenay-Malabry.
Ce mardi 4 février, elle reçoit la visite d'un confrère qui l'alerte sur une information diffusée depuis la veille par voie de presse : un praticien de SOS Médecins déclaré par les autorités comme infecté au coronavirus a été contaminé par des touristes asiatiques, elles-mêmes hébergées dans un hôtel tout proche de sa pharmacie. Après s'être renseignée, la titulaire reconstitue la chronologie des faits. Le médecin est venu soigner les deux touristes chinoises accompagnées de leur traductrice taïwanaise dans leur hôtel le 23 janvier. Cinq jours plus tard, de retour dans son pays, l'une des touristes est diagnostiquée comme étant infectée par le coronavirus. Les autorités chinoises préviennent alors la DGS française, qui elle-même alerte le médecin déjà fébrile. Celui-ci se met à l'isolement de son propre chef avant d'être pris en charge. Jusque-là, tout va bien. La situation semble sous contrôle. « Mon associé s'est alors souvenu qu'il avait servi longuement deux clientes asiatiques ce jour-là (le 23 janvier, ndlr). L'une des deux portait un masque, pas l'autre. Leur ordonnance mentionnait des médicaments destinés à la prise en charge d'un état grippal. »
« Le problème, souligne la pharmacienne, c'est que depuis leur passage, et surtout depuis la confirmation de la contamination du médecin par le coronavirus, le 28 janvier, personne ne nous a contactés, personne n'est venu nous voir pour nous alerter, c'est totalement anormal ! » Béatrice Clairaz-Mahiou appelle alors l'ARS d'Ile-de-France, mais le médecin qui lui répond la rassure et lui explique que la situation ne justifie aucune inquiétude. Depuis, plus rien, témoigne-t-elle au « Quotidien ».
« Il ne s'agit pas de psychoter, mais plutôt de rectifier le tir »
Vendredi dernier, la titulaire s'est décidée à écrire au directeur général de la Santé pour lui exposer la situation. « Je voudrais comprendre comment un tel loupé a pu être possible ? Même s'il est difficile d'interroger la malade chinoise retournée dans son pays, on pouvait au moins interroger le médecin français et se demander quelles personnes, et quelle pharmacie, ses patientes avaient fréquenté, suggère Béatrice Clairaz-Mahiou. Pourquoi les professionnels de santé que nous sommes ont-ils été tenus à l'écart ? C'est totalement anormal », s'étonne-t-elle.
Si la titulaire semble déterminée à comprendre d'où vient la défaillance, elle reste cependant sereine et très professionnelle. « Il ne s'agit pas de psychoter, mais plutôt de rectifier le tir, précise-t-elle. Nous sommes des professionnels de santé, c'est en toute responsabilité et en connaissance des risques réels que je souhaite interpeller les autorités sanitaires. » Pour le reste, même si l'une de ses collaboratrices a souhaité se rendre aux urgences pour un contrôle, la panique n'a pas eu cours dans son officine.
En bonne sentinelle de la santé, la pharmacienne regrette surtout de ne pas avoir pu jouer son rôle d'alerte et de prévention d'une éventuelle contamination : « Si nous avions été informés plus tôt, nous aurions essayé de nous rappeler si des patients étaient présents au moment où les clients asiatiques sont venus. J'aurais alerté mes collaborateurs pour qu'ils surveillent d'éventuels symptômes. Faute d'informations, nous n'avons rien fait. Cela aurait pu avoir des conséquences dramatiques. »
La période d'incubation étant désormais largement dépassée depuis le contact, le personnel de l'officine et ses clients peuvent être aujourd'hui totalement rassurés.
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