Les facteurs de risques modifiables de la maladie d’Alzheimer (MA) sont, pour certains, bien connus : niveau socio-éducatif, hypertension artérielle (HTA), obésité, dépression, diabète, inactivité physique, isolement social, tabagisme, perte auditive… « Ce qui est nouveau, c’est d’essayer de préciser les perspectives réelles qui existeraient pour les individus si l’on arrivait à mettre en place une prévention fondée sur ces facteurs de risques modifiables. Une étude publiée récemment dans le Lancet (1) indique, justement, que l’on pourrait réduire de 35 % le risque de développer la MA en appliquant la prévention sur ces facteurs de risques », indique le Pr Marc Verny (chef du service gériatrie, hôpital La Pitié-Salpêtrière, Paris). Des actions devraient, ainsi, être entreprises pour prévenir la MA à des âges différents en fonction des facteurs de risque tout au long de l’existence.
Un objectif curatif
Les essais de traitements actuels cherchent à influencer l’évolution de la MA et les chercheurs travaillent sur des traitements curatifs. « C’est un objectif très ambitieux puisque l’on cherche à apporter une réponse curative à une maladie chronique neurodégénérative, alors même que son diagnostic reste complexe », confie le Pr Verny. De fait, en France, un patient sur deux atteint de pathologies démentielles n’est pas diagnostiqué. Par ailleurs, la majorité des essais thérapeutiques menés aujourd’hui prennent, comme hypothèse, le fait que les dépôts de substances amyloïdes sont en cause dans la survenue de la MA. « Ce qui n’est pas formellement démontré, précise le Pr Verny. Même si, poursuit-il, dans les années 2000, un essai effectué sur des souris a montré que l’injection de protéines amyloïdes permettait de « nettoyer » leurs lésions amyloïdes. Malheureusement, le même type d’essais effectués chez l’humain a dû être interrompu du fait d’encéphalites allergiques graves ». D’ailleurs, d’autres chercheurs travaillent sur l’hypothèse de la responsabilité de la protéine Tau dans la MA.
Des essais avec des anticorps anti-amyloïdes
Depuis, d’autres essais ont testé une vaccination passive par l’injection d’anticorps anti-amyloïdes. Ces essais se sont soldés par des échecs en demi-teinte. « En effet, s’ils n’ont pas réussi à arrêter la progression de la MA, ni à améliorer les patients sur le plan cognitif, ils ont bien modifié les taux de protéines amyloïdes. Or ces essais étaient menés sur des patients ayant des pathologies démentielles avérées, avec une mort neuronale certaine. Pas étonnant alors que l’injection d’anti-amyloïdes ne permette pas de restaurer leurs capacités cognitives », relate le Pr Verny. Actuellement, de nouveaux essais comportant des injections d’anticorps anti-amyloïdes sont en cours chez des personnes asymptomatiques (sans manifestation de trouble cognitif) mais considérés comme à risque de développer une MA ; ainsi que sur des patients ayant des troubles cognitifs légers (sans retentissement sur leurs activités quotidiennes) et ayant un risque important de développer la MA.
L'importance du diagnostic précoce
Grâce au développement de biomarqueurs, des progrès considérables ont été effectués en matière de diagnostic précoce de la MA. « Cela permet de mieux sélectionner les patients dans les essais qui sont en cours de réalisation (sur les effets des anti-amyloïdes, et de la protéine Tau). Néanmoins, la majorité des essais comprennent des patients jeunes alors que la MA survient, en général, chez les plus de 75 ans. À l’avenir, il faudra donc mettre en place des essais incluant ces patients pour tester l’efficacité et la tolérance des traitements dans cette population multimorbide », note le Pr Verny.
D’après un entretien avec le Pr Marc Verny, chef du service gériatrie, hôpital de la Pitié-Salpêtrière (Paris).
(1) Dementia prevention, intervention, and care. Livinston GI et al. Lancet Published online July 20, 2017.
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