Depuis le début de l'année, les deux premiers CAR-T cells ont obtenu leur autorisation de mise sur le marché (AMM) en France : Yescarta (axicabtagene ciloleucel), indiqué dans le lymphome diffus à grandes cellules B et le lymphome médiastinal primitif à grandes cellules B réfractaire, et Kymriah (tisagenlecleucel) indiqué dans le lymphome diffus à grandes cellules B réfractaire ou en rechute. De nouvelles indications sont déjà envisagées, à commencer par le myélome multiple, pathologie pour laquelle les recherches sont les plus avancées.
Myélome et tumeurs solides, des résultats encourageants
Les récepteurs antigéniques chimériques de Yeskarta et Kymriah se fixent sur l’antigène leucocytaire CD 19. Une utilisation dans une autre pathologie implique une modification de la cible « Pour le myélome, la molécule ciblée est le BCMA (un récepteur cellulaire de la superfamille des TNF) », explique le Dr Salomon Manier, hématologue au CHU de Lille. Lors d’un essai clinique (2) avec escalade de doses, mené sur 33 patients, les auteurs ont constaté qu’une injection de BB2121, un CAR-T cells anti-BCMA, permettait une survie médiane de 11,8 mois à partir de 150 millions de cellules injectées, contre 2,6 mois avec des doses plus faibles. Une étude de phase 2 sur le BB2121 est en cours de préparation. Baptisée KARMA, elle portera sur 140 patients. En France, des patients pourront être inclus au CHU de Nantes.
Lors du dernier congrès de l’American Society of Clinical Oncology (ASCO), deux traitements par CAR-T cells ont montré des données encourageantes (3), quoique plus préliminaires, dans le traitement du mésothéliome pleural. Dans cette indication, les nouveaux CAR-T cells ciblent la mesothéline. En association avec un anti PD-1, une réponse tumorale objective a été observée chez 10 des 16 patients considérés en échec thérapeutique des lignes précédentes.
Dans une autre étude, réalisée par les chercheurs de l’hôpital de Shanghai et de l’université militaire de Chine, des cellules CAR-T ciblant la claudine (une molécule structurale présente à la surface des cellules épithéliales) ont également donné des résultats prometteurs dans le cancer gastrique avec une réponse tumorale obtenue chez 4 des 12 patients traités.
Efficacité augmentée
Plusieurs pistes d’amélioration de l’efficacité du concept même de CAR-T cells sont évoquées. L’une d’entre elles, citée precédemment, consiste à potentialiser l’efficacité des CAR-T cells en les combinant à une immunothérapie ou une thérapie ciblée. Des essais sont en cours avec le pembrolizumab, le durvalumab, l’ibrutinib et CC-122 (principe actif de l’Avadomide visant le Cereblon).
Les CAR-T cells actuellement disponibles en clinique sont des cellules autogéniques. Le développement de CAR-T allogéniques « permettrait de disposer de davantage de temps pour modifier plus spécifiquement les lymphocytes T, explique le Pr Jérôme Larghero, responsable de l’unité fonctionnelle de thérapie cellulaire de l’hôpital Saint-Louis (AP-HP). Par exemple, on pourrait améliorer leur capacité à se fixer dans un tissu, ce qui améliorerait leur activité antitumorale contre les tumeurs
solides ».
Le risque de réaction du greffon contre l’hôte induit par les CAR-T allogéniques amène ainsi les chercheurs à réfléchir sur la manière de contourner cet évènement, notamment en utilisant des cellules non alpha bêta. Le principe étant de modifier les CAR-T cells pour les rendre invisibles aux lymphocytes T et aux cellules NK, ou en inactivant le gène codant pour les récepteurs des cellules (TCR). « Même si l’on coupe le TCR, les CAR-T cells s’activent et conservent une activité antitumorale », poursuit le Pr Larghero.
Par ailleurs, leur utilisation en adjuvant de la greffe de moelle est envisagée. Au centre de recherche en cancérologie et immunologie Nantes-Angers, on développe des clones de lymphocytes T allogéniques NAT-DP4 modifiés. Ces clones ciblant les marqueurs HLA de classe 2 seront évalués chez des patients dans les mois à venir.
(1) Le Focus « Les CAR-T cells en ordre de marche » a été organisé par le Groupe Profession Santé (dont fait partie le « Quotidien ») avec le soutien des laboratoires Gilead et Novartis.
(2) Noopur Raje et al, N Engl J Med 2019; 380:1726-1737 DOI: 10.1056/NEJMoa1817226.
(3) S.Prasad DOI: 10.1200/JCO.2019.37.15_suppl.2511, ASCO 2019.
Pharmaco pratique
Accompagner la patiente souffrant d’endométriose
3 questions à…
Françoise Amouroux
Cas de comptoir
Les allergies aux pollens
Pharmaco pratique
Les traitements de la sclérose en plaques