Avec l’explosion de l’obésité et du diabète à l’échelle mondiale, l’immunométabolisme est un domaine de recherche prometteur. L’obésité est aujourd’hui considérée comme une maladie systémique avec une inflammation chronique où dialoguent des organes tels que l’intestin, le foie, le tissu adipeux, les muscles et le cerveau.
Dans « Cell », des chercheurs de l’université Radboud en collaboration avec l’université de Bonn apportent des éléments nouveaux sur le sujet de l’immunométabolisme en montrant comment une alimentation occidentale riche en graisses modifie le système immunitaire (SI) via une reprogrammation durable épigénétique au niveau médullaire.
Dans des expériences chez des souris suralimentées avec un régime riche en sucres, en graisses et pauvre en fibres, les chercheurs montrent que la réponse inflammatoire est plus agressive dans l’organisme sur le long terme, exposant à un risque accru de diabète et de maladies cardiovasculaires.
La mémoire dite entraînée de l'immunité innée
De façon surprenante, c’est l’immunité innée qui entre en jeu. « Un régime non équilibré augmente le nombre de certaines cellules immunitaires dans le sang des souris, essentiellement des granulocytes et des monocytes », explique Anette Christ de l’université de Bonn et premier auteur de l’étude.
Les chercheurs ont montré qu’il existe une reprogrammation des cellules myéloïdes, avec une activation d’un grand nombre de gènes des progéniteurs myéloïdes. Quand les souris ont repris leur alimentation riche en céréales pendant quatre semaines, l’inflammation aiguë a disparu mais pas la reprogrammation des cellules myéloïdes, qui donneront les futurs neutrophiles, monocytes et macrophages.
C’est une notion assez récente que le système immunitaire (SI) adaptatif n’est pas le seul à être doté de mémoire : il existe une mémoire dite entraînée dans l’immunité innée. Elle est « réveillée » par différents stimuli, en particulier des produits microbiens comme le bêta-glucane. Comme l’a montré pour la première fois, il y a seulement quelques années l’équipe de Mihai Netea, cette mémoire se met en place via une reprogrammation épigénétique des progéniteurs myéloïdes, l’ADN de certains gènes étant ainsi déroulé et plus facile à activer.
Dans l’étude, les chercheurs ont montré qu’un régime hypercalorique est un autre stimulus possible de cette immunité entraînée et ont réussi à mettre en évidence l’existence d’un « capteur fastfood » sur les cellules immunitaires via l’inflammasome NLRP3. « L’inflammasome entraîne de tels changements épigénétiques, explique le Dr Eicke Latz, de l’université de Bonn et auteur sénior. Le SI réagit par conséquent même à de petits stimuli avec de fortes réponses inflammatoires. »
La place centrale de la voie de l'HMGCoA réductase
Dans une seconde étude, l’équipe néerlandaise de Mihai Netea montre que la voie du cholestérol, la voie de l’HMGCoA réductase, occupe une place centrale dans l’immunité entraînée. Stimulées par un composé bactérien, le bêta-glucane, les cellules immunitaires puisent de l’énergie à partir du cholestérol et produisent des taux élevés de mévalonate, un dérivé du cholestérol.
Or, en étudiant des cellules immunitaires de sujets produisant des taux élevés de mévalonate par anomalie génétique, les chercheurs ont observé qu’elles étaient plus facilement activées et produisaient davantage de médiateurs de l’inflammation. De là, leur est venue l’idée de tester les statines, ces inhibiteurs du cholestérol bon marché.
« Ces statines ont effectivement inhibé l’entraînement de l’immunité avec l’arrêt de production de mévalonate, explique Siroon Bekkering, chercheur à l’université Radboud et premier auteur. Suite à ça, les cellules réagissent de nouveau normalement. À l’avenir, on pourra peut-être utiliser les statines dans différentes maladies inflammatoires ».
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