« Nous allons débuter dans six mois une étude randomisée afin d’évaluer l’efficacité d’un régime mimant le jeûne chez 150 patients affectés de la maladie de Crohn ou de la rectocolite hémorragique. Nous devrions avoir les résultats dans 2 ans », précise au « Quotidien » le Dr Valter Longo, professeur de sciences biologiques et directeur du Longevity Institute à l’université de South California (USC), à Los Angeles.
Ce dernier vient de diriger une étude publiée dans « Cell report » qui « combine, pour la première fois, deux domaines de recherche, explique-t-il dans un communiqué (1). Le premier concerne ce que l’on devrait manger chaque jour, et de nombreuses études suggèrent une alimentation riche en légumes, en noix et en huile d’olive. Le second domaine concerne le jeûne et ses effets sur l’inflammation, la régénération et le vieillissement ».
Le régime simulant le jeûne (Fast Mimicking Diet ou FMD) a été développé par le Dr Longo et son équipe afin de placer le corps dans un état de restriction calorique (750 à 1 100 calories par jour) pendant 4 à 5 jours, tout en apportant en bonnes proportions des carbohydrates, des protéines et des acides gras, ainsi que des vitamines et des minéraux. De précédentes études ont montré, chez la souris, que ce régime réduit le risque de cancer, atténue l’immunosuppression et l’immunosénescence liées au vieillissement, et améliore voire inverse la progression de la sclérose en plaque et du diabète (types 1 et 2) dans des modèles murins de ces maladies.
« Il est difficile de jeûner et cela peut être dangereux. Nous savons que le régime simulant le jeûne est plus facile à suivre et plus sûr que le jeûne à l’eau, mais la grande surprise de cette étude est que si nous remplaçons le régime mimant le jeûne
(incluant des ingrédients prébiotiques) par le jeûne à l’eau, nous observons moins de bénéfices », note le professeur.
L’étude a évalué le régime FMD dans un modèle murin (colite induite par le DSS) de maladie inflammatoire chronique de l’intestin (MICI). Un groupe de souris a suivi le régime FMD qui consiste, pendant 4 jours, à consommer 50 % de l’apport calorique normal le premier jour puis du 2e au 4e jour seulement 10 % de l’apport calorique normal. Un autre groupe de souris a jeûné pendant 48 heures, ne buvant que de l’eau.
Les résultats montrent que 2 cycles de régime FMD, espacés par 4 semaines d’alimentation normale, semblent suffisants pour atténuer certaines pathologies et inverser d’autres pathologies ou symptômes associés aux MICI. Ces 2 cycles réduisent l’inflammation intestinale, augmentent le nombre de cellules souches, stimulent un microbiote intestinal protecteur (riche notamment en Lactobacillus) et inversent la pathologie intestinale. En revanche, le jeûne à l’eau est moins efficace : il favorise la régénération et réduit l’inflammation, mais n’inverse pas la pathologie intestinale.
Ceci indique que certains nutriments du régime FMD contribuent aux modifications microbiennes et anti-inflammatoires nécessaires pour maximiser les bénéfices du jeûne contre les MICI. Les résultats montrent aussi que la croissance et le remplacement des tissus intestinaux endommagés surviennent surtout durant la période de réalimentation après le régime FMD. « Il est vraiment remarquable de constater qu’au cours des 100 dernières années de recherche sur la restriction calorique, personne n’a reconnu l’importance de la réalimentation, note le Dr Longo. La restriction est comparable à une démolition. Mais il faut reconstruire. Sans cela, il n’y a pas de bénéfice ». Les chercheurs ont aussi montré, dans un précédent essai clinique chez des sujets ayant un taux élevé de protéine C-réactive (CRP), que 3 cycles de régime FMD peuvent normaliser la CRP, un marqueur d’inflammation systémique.
L’équipe finalise à présent le protocole d’un essai clinique randomisé qui évaluera un régime FMD modifié chez des patients atteints de MICI.
(1) P. Rangan et al., Cell Reports, 10.1016/j.celrep.2019.02.019, 2019.
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