EN JANVIER 2003, on apprenait l’apparition d’une maladie apparentée à la leucémie chez deux des neuf premiers patients atteints d’un déficit immunitaire combiné sévère lié à l’X (SCID-X) traités par la thérapie génique.
À la naissance, ces enfants présentaient tous la mutation du gène codant pour l’interleukine 2 (IL2RG) - identifiée comme la cause du SCID-X - qui les privait d’une version fonctionnelle des récepteurs à l’interleukine 2. Leur déficit immunitaire avait été corrigé grâce l’implantation de cellules CD38+ préalablement transfectées par un virus modifié de la leucémie murine porteur d’un gène codant une version normale de la chaîne Y du récepteur à l’IL2. Hélas, cette insertion a également surexprimé plusieurs proto-oncogènes(gènes LMO2 et CCND2). Au total, cette stratégie a été tentée chez 20 enfants atteints de SCID-X, dont 5 ont développé une leucémie à ce jour, soit un taux de complication grave de 25 %.
« Ces premiers essais avaient montré une efficacité mais la toxicité n’était pas acceptable », se souvient le Pr Alain Fischer, de l’institut Imagine de recherche sur les maladies génétiques, de l’Hôpital Necker-enfants malades. Avec les Pr Marina Cavazzana-Calvo et Salima Hacein-Bey Abina, ils ont travaillé à concevoir un nouveau vecteur. Ils partent de la même base, un rétrovirus modifié de la leucémie murine, mais procèdent à des délétions dans la séquence LTR, dont le rôle est non seulement d’intégrer le gène codant pour la chaîne Y du récepteur à l’interleukine 2 dans le génome, mais aussi d’amplifier son expression. « Il y a deux éléments dans cette séquence LTR : la première permet l’intégration et la seconde est un enhancer, c’est-à-dire un activateur très puissant de l’expression du gène qui agit à distance. Il pouvait donc suractiver des oncogènes proches du site d’insertion. Nous l’avons remplacé par un promoteur qui agit plus localement. »
Neuf nouveaux patients ont reçu leurs propres cellules CD34+ (celllules précurseurs des lignées lymphocytaires)modifiées par ce nouveau vecteur. Ils étaient répartis entre l’école médicale de Harvard (deux enfants), l’hôpital pour enfant de Cincinnati (un enfant), l’école de médecine David Geffen de Los Angeles (un enfant) et l’hôpital Necker-Enfants malades (cinq enfants). Dans leurs résultats publiés dans le « New England Journal of Medicine », les auteurs expliquent qu’au bout d’un à trois ans de suivi, huit enfants sont toujours vivants, dont sept ont des lymphocytes T périphériques suffisamment fonctionnels pour parvenir à combattre des infections. La vitesse à laquelle les patients augmentent leurs taux de lymphocyte T n’est pas significativement différente celle relevée dans leurs essais précédents.
Pas d’activation des oncogènes.
En revanche, ils ont observé que les insertions du gène exprimant la chaîne Y du récepteur à l’interleukine 2 étaient moins fréquemment retrouvées au voisinage immédiat de proto-oncogènes que dans leurs précédentes tentatives. « Cela ne signifie pas qu’il y a moins d’insertions dans ces régions-là, explique Alain Fischer, mais simplement qu’il n’y a pas eu d’événement de sélection des cellules. » Ce résultat suggère que, parmi les cellules CD34+ transfectées, celles chez qui l’insertion était proche d’un oncogène ne se sont pas multipliées plus que les autres. L’activateur de l’expression du gène codant pour la chaîne Y du récepteur à l’interleukine 2 n’agissait donc, a priori, que sur ce dernier. « C’est une démonstration de la sécurité du procédé, mais pas une démonstration totale, prévient le Pr Alain Fischer, nous avons un recul de deux ans sur les enfants les plus jeunes, et ils ne présentent toujours pas de pathologie, c’est rassurant », note-t-il.
Un traitement par immunoglobulines toujours nécessaire.
En 2001, un autre essai de thérapie génique avait été initié en Italie chez dix enfants souffrant de déficits immunitaires combinés sévères dus au déficit en adénosine désaminase. Huit à treize ans plus tard, tous sont encore en vie et huit semblent guéris. Les sept enfants décris dans l’article du « New England Journal of Medicine » qui ont quitté l’hôpital mènent désormais une vie normale, bien qu’ils nécessitent toujours un traitement par immunoglobuline. En effet, si la thérapie génique a restauré leurs lymphocytes T, ce n’est pas le cas de leurs lymphocytes B dont les taux restent très faibles.
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