LA SANTÉ des femmes est jalonnée de paradoxes. Elles continuent de vivre plus longtemps que les hommes, mais cumulent davantage qu’eux les incapacités. Elles tendent même à les rattraper, sinon à les dépasser dans des pathologies qui leur étaient jusqu’alors réservées. C’est ainsi que les maladies coronaires reculent chez l’homme mais augmentent chez la femme. Celle-ci reste pourtant moins bien traitée, les inégalités dans les prescriptions de statines, bêtabloquants et antiplaquettaires en font foi. De même les cancers de l’adulte attribuables au surpoids touchent trois fois moins les hommes que les femmes.
Enfin, autre paradoxe, alors qu’elles composent 52 % de la population, les femmes ne représentent qu’un tiers des participants aux essais cliniques.
Deux poids, deux mesures.
C’est pour aplanir ces inégalités que sept sociétés savantes* se sont associées pour mieux appréhender les facteurs de risques et les prévenir. Convaincues qu’ils ne pourront être combattus que dans la multidisciplinarité (cardiologie, diabétologie, gynécologie, rhumatologie et oncologie) et de manière transversale avec les médecins généralistes, les spécialistes libéraux et hospitaliers, les paramédicaux, mais aussi avec les pharmaciens, ces sept organisations ont initié un parcours de formation de trois ans avec le soutien du laboratoire MSD et de la société française de nutrition (SFN). Vingt sessions organisées dans les villes de CHU, s’attaqueront tour à tour aux facteurs de risques majeurs pour la santé des femmes : surpoids, tabac, alcool.
Cette année est consacrée au surpoids et à ses multiples conséquences en terme de morbidité. Un véritable « raz de marée », selon le Pr Michel Marty, président de la société française du cancer (SFC), qui ne peut plus être nié en France où une femme sur quatre a un IMC supérieur à 25, soit 6,3 millions de femmes, dont 3,8 millions d’obèses. Leur tour de taille progresse plus rapidement que chez les hommes (+ 4,6 % sur les trois dernières années, contre 0,8 % pour les hommes) et elles les devancent même pour ce qui est des 25-35 ans. Avec des conséquences cliniques lourdes en diabétologie, rhumatologie, gynécologie, cardiologie et oncologie. Dans ce dernier domaine, la femme en surpoids cumule les handicaps. « Alors que sur l’ensemble de la population 3,6 % des cancers de l’adulte sont attribuables au surpoids, ce taux passe à 5,4 % pour la femme, contre 1,9 % chez l’homme », rappelle le Pr. Marty, soulignant que le cancer du sein est majoré chez la femme en surpoids et que le risque de rechute est multiplié.
La ménopause, alibi.
En gynécologie, surpoids et fertilité ne font pas bon ménage. Pas davantage que surpoids et contraception. « Car s’il est faux de dire que la contraception hormonale fait grossir, les femmes en surpoids ont en revanche quatre fois plus de grossesses non désirées », soutient le Dr Christian Jamin, membre du Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF). Il explique ce constat par l’utilisation plus fréquente de la contraception naturelle par ces femmes plus sujettes que les autres aux saignements sous contraceptifs médicalisés, ou sous stérilet pour les femmes en surpoids de type gynoïde. De même, depuis le débat sur les œstroprogestatifs nombreux sont les gynécologues à refuser de les prescrire aux femmes en surpoids et en âge avancé, les kilos superflus étant un facteur majeur de thrombose veineuse. En reproduction spontanée ou en traitement PMA (procréation médicalement assistée), le surpoids poursuit également ses effets néfastes en empêchant l’implantation de l’embryon. Hormis ces aspects, il comporte également des risques importants pour l’enfant en raison des modifications hormonales subies in utero. « Il faut être plus sévère avec les femmes en surpoids », assène le Dr Jamin.
Il poursuit en battant en brèche d’autres idées reçues. Notamment sur l’association prise de poids et ménopause. Il blanchit cette dernière, souvent incriminée, pour souligner que « la prise de poids est linéaire dès l’âge de trente ans ». « La ménopause est un alibi » selon le gynécologue, qui n’en reconnaît pas moins l’inversion des proportions masse grasse et masse musculaire. Le Dr Jamin met cependant en garde contre les traitements de la ménopause chez les femmes en surpoids, un facteur aggravant de thromboses veineuse et de cancers du sein.
En cardiologie, enfin, l’IMC prédit le risque de maladie cardio-vasculaire. Et, à nouveau, les femmes sont victimes d’inégalités. « Les risques d’insuffisance cardiaque sont multipliés par deux chez la femme obèse », déclare le Pr Yves Juillière, de la société française de cardiologie. En outre, si les maladies coronaires, et notamment l’infarctus du myocarde, tendent à diminuer chez les hommes, elles sont en augmentation pour les femmes. La mortalité à 30 jours est de 3 % chez l’homme, de 9,2 % chez la femme.
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