PARCE QUE des travaux récents avaient suggéré un lien entre un cancer de la prostate et la cicatrice sérologique d’une infection à Trichomonas vaginalis, une équipe internationale a voulu en savoir plus. Des chercheurs américains, suédois et français (INSERM U 708, Paris) ont donc analysé prospectivement les données de patients enrôlés dans la cohorte « Physician’s Health Study ». Leurs conclusions apparaissent un peu déroutantes. En effet, s’il existe un lien entre la présence d’anticorps dirigés contre T. vaginalis et la présence de la tumeur, il n’atteint pas le seuil de la significativité, statistique. En revanche, il devient significatif lorsqu’il s’agit des cancers extraprostatiques, de ceux métastasant aux os et des décès par cancer de la prostate.
Les anticorps anti-T. vaginalis.
Cette étude a pu être réalisée car les participants de la cohorte avaient bénéficié de prélèvements sanguins à l’enrôlement en 1982 et que le suivi a duré jusqu’aux années 2000. C’est ainsi que 673 cas de cancer prostatique ont été identifiés. À titre de témoins, autant de sujets indemnes ont été recrutés. La recherche d’anticorps anti-T. vaginalis a été réalisée par une technique enzymatique en 2008.
Les données statistiques concernent, en premier lieu, la relation entre l’infection et le cancer. Bien que positive, elle n’est pas jugée significative quant au risque global. L’odds ratio (OR) est de 1,23 (IC 95 % = 0,94-1,61), du même ordre que fournissent des travaux antérieurs. En revanche, les chiffres se montrent bien plus éloquents quand il s’agit du risque de cancer extraprostatique, puisque la présence des anticorps amène à un OR de 2,17 (IC 95 % = 1,08-4,37), il en va de même pour des tumeurs à pouvoir métastatique osseux ou pour les décès par cancer prostatique, l’OR est de 2,69 (IC 95 % = 1,37-5,28).
L’arrivée du dosage du PSA.
Ces données quelque peu discordantes sont justifiées, pour les auteurs et un éditorialiste, Peter C. Albertsen (université du Connecticut), par l’arrivée du dosage du PSA en 1986. Depuis la réalisation de ce dépistage, les cas de cancer prostatique sont bien moins parlants cliniquement. Ce qui expliquerait la relation nette chez les patients qui n’avaient pas bénéficié du dépistage et donc à risque majoré de tumeur grave. D’ailleurs, la relation la plus forte est relevée parmi les premiers patients enrôlés, c’est-à-dire avant 1987. Selon l’éditorial, l’enthousiasme des médecins à doser le PSA « a ajouté une autre variable confondante à un problème déjà complexe ».
Le mécanisme suggéré par Jennifer R. Stark et coll. est celui de l’inflammation locale qui conduit à une cascade d’événements favorisant la cancérisation. Cependant, ils admettent que des études devront préciser si T. vaginalis est effectivement l’agent responsable. Il faut sur ce point se souvenir que l’infection guérit spontanément chez un tiers des hommes infectés. Une faible proportion d’individus connaît une infection chronique asymptomatique. C’est dans cette circonstance que le parasite peut, en remontant l’urètre, atteindre et infecter l’épithélium prostatique causant l’inflammation chronique.
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