Les probiotiques ont-ils encore une place dans la gastro-entérite aiguë (GEA) de l’enfant ? Deux grands essais contrôlés et randomisés, l’un canadien, l’autre américain, ayant inclus 1 857 enfants au total, répondent sans ambiguïté que non.
Publiés dans « The New England Journal of Medicine », ces deux essais indépendants et quasi superposables tirent des conclusions claires et identiques. L’administration pendant 5 jours (2 fois/jour) du probiotique Lactobacillus rhamnosus - seul dans l’essai américain ou associé à du Lactobacillus helveticus R0052 dans l’essai canadien - ne fait pas mieux que le placebo quel que soit le critère examiné.
À contre-courant mais robustes
Ces deux essais se posent à contre-courant de centaines d’études publiées sur les probiotiques, la plupart ayant montré leur efficacité contre la diarrhée. C’est ainsi que de nombreuses sociétés savantes, et notamment la Société Française de Pédiatrie, recommandent leur utilisation. Néanmoins, comme le Dr Thomas LaMont, gastro-entérologue au Beth Israel Deaconess Medical Center à Boston, le souligne dans un éditorial, ces études manquent de puissance ou présentent des problèmes méthodologiques.
L’essai canadien coordonné par le gastropédiatre Stephen Freedman de l’université de Calgary a inclus 886 enfants âgés de 3 à 48 mois dans 6 services d’urgences pédiatriques. Côté américain, l’équipe du Dr David Schnadower, pédiatre urgentiste au Cincinnati Children’s Hospital Medical Center, en a inclus 971 de la même tranche d’âge dans 10 centres.
La sévérité de l’épisode dans les 14 jours, qui a été choisie comme critère principal de jugement dans les deux études, est inchangée. Pour la mesurer, les deux équipes ont utilisé le score de Vesikari modifié, un score ≥ 9 correspondant à une GEA modérée à sévère. La survenue d’un tel épisode était de 26,1 % (n = 108/414) dans le groupe probiotique versus 24,7 % (n = 102/413) dans le groupe placebo côté canadien. Côté américain, étaient concernés 11,8 % (n = 55/468) dans le groupe L. rhamnosus et 12,6 % (n = 60/475) dans le groupe placebo.
D'autres probiotiques à tester
Même pour les critères secondaires, la prise de probiotiques ne s’est pas traduite par une durée plus courte de la diarrhée et des vomissements dans les deux essais. Les Américains montrent que le taux d’absentéisme à la garderie ou en crèche était le même dans les deux groupes, de même que le taux de transmission de la GEA à la maison ; les Canadiens que le nombre de consultations non programmées et celui d’événements secondaires n’étaient pas statistiquement différents.
Si le constat est sans appel pour Lactobacillus rhamnosus, l’éditorialiste ne veut pas jeter aux oubliettes les probiotiques pour autant. Il est possible que « des probiotiques autres que L. rhamnosus soient efficaces dans la diarrhée de l’enfant », écrit-il citant en exemple une large étude en Inde rurale sur l’effet bénéfique en prophylaxie de L. plantarum dans les 5 premiers jours de vie (moins de sepsis, moins d’infections respiratoires basses dans les 2 premiers mois de vie). Compte tenu de leur faible coût et de leur bonne tolérance, il ne faudrait pas se priver de tester leur efficacité dans « des essais rigoureux comme ceux décrits dans le "Journal" », estime-t-il.
S.Freedman et al., NEJM, DOI:10.1056/NEJMoa1802597, 2018 ;
D.Schnadower et al., NEJM, DOI:10.1056/NEJMoa1802598, 2018.
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