DANS LA FAMILLE des UV, les UVB sont les plus énergétiques et les plus nocifs pour la santé. Les UVA sont moins puissants mais parviennent en plus grande quantité jusqu’au sol, puisqu’ils constituent 95 % des rayonnements qui pénètrent dans l’atmosphère.
Le potentiel carcinogène des UVB via la dimérisation des nucléotides, est connu depuis très longtemps, celui des UVA l’est beaucoup moins. Les travaux publiés dans « Science » montrent non seulement que les dommages provoqués à l’ADN par les UVA sont plus importants qu’on ne le croyait mais qu’ils se poursuivent plusieurs heures après l’arrêt de l’exposition aux rayonnements UV.
« Nous n’avons découvert que récemment que les UVA étaient aussi capables de provoquer des dimérisations de nucléotides », explique Thierry Douki, chef du service de chimie inorganique et biologique du Laboratoire lésions des acides nucléiques du CEA. C’est son équipe qui a mis au point les outils d’analyse chimique utilisés dans l’étude de « Science » : l’association de la spectrométrie de masse et de la chromatographie liquide.
« Chercher des dimères dans un noyau de cellule revient à rechercher une aiguille dans une botte de foin, explique le biochimiste, on sépare donc les bases normales et les dimères grâce à la chromatographie liquide, puis nous quantifions le nombre de dimères, et donc la quantité de dommages subis par l’ADN, avec la spectrométrie de masse. »
Le rôle paradoxal de la mélanine.
Grâce à ces nouveaux outils, c’est un tout nouveau mécanisme d’altération de l’ADN par les UVA que sont parvenus à décrire les chercheurs américains, français, brésiliens et japonais. Les UVA se sont en effet révélés capables d’oxyder les précurseurs de la mélanine. Ces formes oxydées se décomposent ensuite, libérant de l’énergie qui peut être transmise à l’ADN, produisant des altérations analogues à celles directement générées par les UV.
Trois heures après la fin de l’exposition, les chercheurs observaient toujours l’apparition de nouvelles altérations de l’ADN dans des mélanocytes de souris. Chez des souris transgéniques dont les mélanocytes imitent le comportement de leurs homologues humains, le niveau de dimérisation cytosine-tyrosine était même trois fois plus élevé deux heures après la fin de l’exposition aux rayonnements UV qu’immédiatement après. En revanche, ce phénomène n’était pas observé chez les souris albinos, dénuées de mélanine.
Les observations faites chez la souris ont ensuite été confirmées in vitro sur des mélanocytes humains. Le mécanisme d’altération de l’ADN décrit dans l’étude est propre aux mélanocytes qui sont les seules cellules à contenir des précurseurs de la mélanine. Ce qui suggère qu’une exposition aux UVA augmente le risque de mélanome. « On considère généralement qu’environ 90 % des dommages causés à la peau sont dus aux UVB, mais ce nouveau mode d’action de UVA montre que la nocivité de ces derniers n’est pas à négliger, analyse Thierry Douki, la quantité d’altérations provoquées par ce mécanisme "retard" est équivalente à celle directement provoquée par les UVA sur l’ADN. À dose équivalente, le risque de mélanome induit par les UVA est donc deux fois supérieur à ce que l’on croyait. »
Les résultats pourraient amener à renforcer les messages de protection contre les UVA, et pourraient influencer les règlements européens qui imposent aux fabricants un rapport de photoprotection entre UVA et UVB dans les crèmes solaires.
"Science" 20 février 2015 : vol. 347 n°. 6 224 pp. 842-847.
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