Une situation inédite a marqué les esprits. Lors de la pandémie de grippe saisonnière en 2008-2009, tous les virus A (H1N1) circulant dans le monde entier étaient devenus naturellement résistants à l’oseltamivir. La diversification des alternatives antivirales est apparue plus que jamais nécessaire.
Dans « The New England Journal of Medicine », le baloxavir marboxil, un nouvel antiviral de la classe des inhibiteurs sélectifs d’endonucléase grippale dépendante de la coiffe, coche les cases d’efficacité et de tolérance dans deux essais cliniques publiés conjointement. Il s’agit d’un essai de phase 2 (essai de dose contre placebo) et d’un autre de phase 3 (à 3 bras, baloxavir, oseltamivir, placebo) chez plus de 1 000 sujets âgés de 12 à 64 ans ayant une grippe simple.
Un antiviral très attendu
« C’est très bien, commente le Pr Bruno Lina, virologue au CHU de Lyon et responsable du Centre national de référence de la grippe de Lyon. On l’attendait depuis quelque temps. Cet antiviral s’était déjà révélé intéressant in vitro en inhibant plus fortement la réplication du virus que l’oseltamivir ».
En France, l’utilisation des antiviraux est recommandée dans les grippes sévères et chez les sujets à risque. La classe des inhibiteurs de la neuraminidase est largement prépondérante, l’oseltamivir, par voie orale, étant le plus utilisé devant le laninamivir et le zanamivir par voie inhalée, et le peramivir, par voie injectable.
Côté efficacité, le baloxavir fait aussi bien que l’oseltamivir, en raccourcissant la durée des symptômes d’environ 24 heures. « En prenant le comprimé à J2, le patient guérit à J4 et non à J5 », souligne le Pr Bruno Lina. Côté tolérance, les effets secondaires étaient rapportés dans 20,7 % du groupe baloxavir, 24,6 % du groupe placebo et 24,8 % du groupe oseltamivir.
La grosse différence a été constatée sur la puissance d’inhibition de la réplication. Les titres du virus à 1 jour de la prise étaient réduits de 3,5 log fois plus dans le groupe baloxavir par rapport au placebo, quand la différence était de 1,5 fois entre l’oseltamivir et le placebo.
Limiter la contagiosité
Quel avantage cela confère-t-il en pratique ? « En période épidémique, l’administration d’oseltamivir permet de casser l’épidémie, notamment dans des institutions, par exemple les maisons de retraite, explique Bruno Lina. Comme la contagiosité est corrélée à la charge virale, le baloxavir pourrait faire mieux encore ».
La question de l’émergence des résistances n’épargne pas le baloxavir. Dans les essais, des résistances sont apparues, 2,2 % dans celui de phase 2 et 9,7 % dans celui de phase 3. « À l’échelle d’une population, le virus de la grippe peut échapper et muter, comme lors de la pandémie de 2007, ce n’est pas une pression de sélection, explique Bruno Lina. Chez un individu, l’émergence de résistance n’est pas un souci chez l’immunocompétent. La grippe est une infection aiguë. Le temps que la résistance apparaisse, le patient est quasi guéri et finit d’éliminer le virus. Il n’y a pas de porteur sain de virus muté. Mais cela peut être un problème chez les sujets vulnérables, comme les enfants, les sujets âgés, les sujets immunodéficients, car l’infection dure plus longtemps ».
Bruno Lina et Timothy Uyeki, de la division grippe des CDC américains (Centers for Diseases Control and Prevention), dans son éditorial, se retrouvent : « il sera très intéressant à l’avenir de tester l’efficacité de la combinaison de baloxavir et d’oseltamivir chez les sujets à risque. Avec un effet additif, on peut espérer diminuer à la fois l’émergence de résistance et la durée de la maladie ».
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