TRÈS UTILISÉ dans l’industrie agro-alimentaire, le lait concentré pourrait déclencher la survenue d’une maladie inflammatoire chronique de l’intestin (MICI) chez des sujets prédisposés. Des chercheurs de l’université de Chicago viennent de montrer comment les graisses saturées du lait altèrent la flore intestinale bactérienne et comment le microbiote ainsi modifié perturbe l’équilibre du système immunitaire. « C’est le premier mécanisme plausible montrant étape après étape comment un régime de type occidental contribue à l’augmentation rapide et croissante de l’incidence des MICI, explique le Pr Eugene Chang. On sait que certaines différences génétiques peuvent en augmenter le risque, mais le passage du stade “risque élevé” à celui de maladie déclarée semble nécessiter un second événement qui pourrait venir d’un changement de mode de vie. »
Les chercheurs ont mené leurs travaux sur un modèle murin proche des MICI humaines. Tandis que l’IL10 permet de freiner la réponse immunitaire vis-à-vis des bactéries intestinales, une délétion génétique intéressant cette molécule augmente de 20 % la survenue de colite chez des souris nourries par un régime hypolipidique ou riche en lipides polyinsaturés. En cas de régime riche en graisses saturées, le risque de colite est triplé en l’espace de six mois, ce qui correspond à une augmentation de plus de 60 %. Sans compter que la survenue, la gravité et l’étendue de la colite sont bien plus élevées que ce qui est observé en cas de régime hypolipidique.
Une odeur de soufre.
L’équipe de Chicago a constaté également que les lipides du lait favorisent la croissance bactérienne d’une espèce rare, la Bilophila wadswothia, connue pour être présente à taux élevés en cas d’appendicite ou de MICI. Alors qu’elle est indétectable en cas de régime hypolipidique, elle représente environ 6 % de l’ensemble des bactéries intestinales en cas de régime gras. Comment ce type d’alimentation peut-il entraîner la pullulation bactérienne ? Tout simplement parce que Bilophila wadswothia se multiplie en présence de soufre, dont la bile produite en réponse à une alimentation peu digeste est riche. « Ces bactéries sont délétères, poursuit le Pr?Chang. (...) Elles sont capables d’activer le système immunitaire de sujets génétiquement prédisposés. » De plus, il semble que les produits de l’interaction bactério-biliaire amplifient l’effet délétère en altérant la barrière muqueuse. Celle-ci devient alors plus perméable, ce qui facilite l’infiltration immunitaire à l’origine de lésions tissulaires.
Cette étude suggère que des facteurs environnementaux peuvent déclencher la maladie chez des patients à risque élevé. « Nous ne pouvons pas actuellement faire grand-chose pour corriger les gènes de prédisposition, explique le Pr Chang. Et tandis que nous pourrions encourager les gens à modifier leur alimentation, c’est rarement efficace et toujours difficile. » L’équipe n’est pas en reste pour autant. « En revanche, le microbiote intestinal peut être “restructuré” de façon prolongée et prévisible, de sorte d’arriver à restaurer une relation saine entre l’hôte et les microbes, sans avoir à toucher au mode de vie des sujets prédisposés. C’est ce que nous sommes d’ores et déjà en train de tester. »
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