C’EST UN SALE COUP pour la Haute Autorité de Santé (HAS), notamment dans le contexte actuel de défiance vis-à-vis des instances de santé. Le Conseil d’État vient en effet d’annuler sa recommandation de 2006 relative au traitement médicamenteux des patients atteints de diabète de type 2. C’est l’association FORMINDEP (Association pour une formation médicale indépendante) qui avait déposé en 2009 un recours devant le Conseil d’État, jugeant que cette recommandation ne respectait pas les règles de gestion des liens d’intérêts des experts consultés. L’association avait initié cette démarche après que la HAS avait refusé de retirer ces recommandations dont l’analyse, précise le FORMINDEP sur son site, « avait démontré qu’elles avaient été rédigées en dépit du respect de la législation et des règles internes de la HAS sur la gestion des conflits d’intérêts ». Dans ses attendus, le Conseil d’État ne dit pas autre chose et constate que « la HAS n’a pas été en mesure de verser au dossier l’intégralité des déclarations d’intérêt dont l’accomplissement était pourtant obligatoire de la part des membres de ce groupe de travail ».
Résultat, ce sont plus de 40 pages de cette recommandation, destinée à servir de bible aux médecins dans le traitement médicamenteux des diabétiques de type 2, qui sont désormais réputées n’avoir jamais existé. La HAS indique avoir supprimé dès lundi dernier, 2 mai, le texte de son site Internet, et qu’une nouvelle recommandation est d’ores et déjà en préparation, pour publication au début de 2012. « Le groupe de travail constitué pour l’occasion répond en tout point aux nouvelles règles », ajoute l’institution. En attendant la prochaine parution, les médecins sont invités par la HAS à se référer au guide des ALD ainsi qu’aux recommandations internationales.
Transparence.
Dans le contexte de l’affaire du Mediator, et après le rapport de l’IGAS et celui des Prs Debré et Even, qui tous mettent l’accent sur la nécessité de faire la plus grande transparence sur les liens d’intérêts des experts des agences de santé, cette décision met le doigt là où cela fait le plus mal. D’autant que le FORMINDEP a déjà déposé un autre recours contre une recommandation de la HAS relative au traitement de la maladie d’Alzheimer. « Tant que la HAS n’aura pas saisi à bras-le-corps cette question majeure des conflits d’intérêts, poursuit le FORMINDEP, elle ne sera pas crédible, et continuera à faire prendre un risque sanitaire à la population en produisant des recommandations médicales susceptibles d’être influencées par des intérêts autres que ceux des patients. » Pour le Dr Dominique Dupagne, membre du FORMINDEP, « si nous n’avons attaqué que ces deux recommandations devant le Conseil d’État, c’est uniquement parce que cela nous coûte très cher en frais d’avocats. Mais la grande majorité d’entre elles seraient susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation ».
Reste une question, et non des moindres. L’annonce récente de la limitation à 200 bandelettes par an et par diabétique de type 2 a créé une réelle émotion chez les patients. Or le décret s’y rapportant précise que pour les diabétiques visés, « la stratégie de mesure et de contrôle du taux de glycémie est basée sur une prise de sang tous les trois mois. (...) L’autosurveillance glycémique (bandelettes) ne vient qu’en appui de cette stratégie (...) comme le préconisent les recommandations de la HAS ». L’annulation de cette recommandation risque à tout le moins de priver les auteurs de la mesure d’un argumentaire opposable.
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