La contribution du lait et des dérivés laitiers aux apports nutritionnels conseillés ne fait pas de doute. En plus de l'apport calcique, ils sont une source non négligeable de protéines, vitamines, et autres minéraux, oligo-éléments, lactose, acides gras… Supprimer les produits laitiers de l’alimentation des Français déséquilibrerait profondément leur nutrition. Au-delà de cet aspect multinutriments et multifonctions, reste à savoir quels sont les bénéfices potentiels des produits laitiers, et, à l’inverse, ce qu'on leur reproche.
Faut-il exclure le lait dès l'enfance ?
Il n’est pas question d'interdire les produits laitiers aux enfants comme le suggèrent des accusations anti-lait mettant en doute la nécessité et les bienfaits des apports calciques à l’adolescence. Cette mise à l’index incompréhensible peut mettre en jeu le pronostic vital chez le nourrisson. Chez le jeune enfant de moins de 2 ans, l’exclusion du lait et des laitages (souvent remplacés par de pseudo-laits végétaux qui ne sont que des jus de riz, de châtaigne ou de noisette, dont la composition est totalement inadaptée aux nourrissons) est à l’origine de malnutritions sévères à type de kwashiorkor ou de rachitisme. Plus tard cette exclusion altère la minéralisation osseuse avec un risque accru d’ostéoporose.
En fait trois pathologies seulement sont à discuter : l’intolérance au galactose, maladie métabolique héréditaire rarissime, nécessite l’exclusion définitive du lait (y compris du lait maternel) dès la naissance ; l’allergie aux protéines du lait de vache (APLV) touche 1 à 3 % des enfants et nécessite l’exclusion du lait de vache, des laits infantiles qui en dérivent, et des produits laitiers, jusqu’à sa guérison spontanée ; l’intolérance au lactose, enfin, concerne environ 10 % des enfants ; le lait peut alors être remplacé par des fromages affinés, ou des laits appauvris en lactose.
De multiples accusations
Le lait déclencheur de tumeurs ou accélérateur des cancers ? La mise en cause, à l’âge adulte, des laitages dans le développement de cancers, comme celui de la prostate, ne repose sur aucune base scientifique solide. Le lait et les produits laitiers ne contiennent aucune substance cancérigène, même à dose infime. Des études démontrent au contraire que leur consommation diminue le risque du cancer du côlon et confirment l’effet préventif de l’allaitement maternel vis-à-vis du cancer du sein. Il en est de même pour les autres risques que font valoir les détracteurs : syndrome métabolique, obésité, hypertension artérielle, accidents cardiovasculaires.
Certaines idées fausses l'accusent aussi de favoriser les otites et l'acné chez l’enfant. Rien ne permet non plus de le mettre en cause dans des pathologies pour lesquelles il n’y a pas d’étiologie, ni même parfois de traitement curatif comme la sclérose en plaques, la polyarthrite rhumatoïde, la maladie de Parkinson, l'autisme. Ces assertions ne reposent sur aucun fondement scientifique, alors que les bénéfices des produits laitiers sont bien documentés sur la prévention du diabète de type 2, du syndrome métabolique, du cancer du côlon. Grâce au nouveau concept de matrice alimentaire, leur rôle est de plus en plus argumenté en termes de prévention cardiovasculaire, de l’ostéoporose et de la perte musculaire liée à l'âge (sarcopénie).
L'effet matrice du lait
Afin d’avoir une meilleure connaissance des liens entre la consommation de produits laitiers et la santé, la prise en compte du rôle de leurs matrices alimentaires (structures particulières) est primordiale. Cette notion de matrice prend en compte l’aliment dans son ensemble pour ne pas limiter l'effet de chaque aliment à la somme des effets de ses constituants considérés isolément. Ce nouveau concept nutritionnel s'applique tout particulièrement au lait et aux produits laitiers qui contiennent presque tous les nutriments essentiels et plus de 2 000 substances différentes intriquées. Elle permet de considérer les interactions entre les différents constituants au sein de la matrice pour déterminer leurs effets potentiels sur la santé, en particulier ceux des yoghourts et des fromages.
De nombreuses études épidémiologiques* témoignent que, en dépit de la teneur en acides gras saturés, leur consommation n'augmente pas le taux de cholestérol, le risque de diabète type 2 et de maladies cardiovasculaires, voire les diminue grâce à la présence de calcium dans la matrice du fromage. Cet effet matrice du fromage se traduit aussi par un plus grand gain de masse osseuse par rapport à l'apport isolé de calcium. « Ces éléments mettent en évidence que l'effet de la matrice complexe des produits laitiers module leurs propriétés nutritionnelles et fonctionnelles et que le lait n'est pas remplaçable par des suppléments minéraux ou des graisses carnées. La place raisonnable, sans excès, des produits laitiers dans notre alimentation est nutritionnellement justifiée », conclut le Dr Jean-Michel Lecerf (Institut Pasteur de Lille, service de Nutrition). Les experts insistent sur la nécessité d’axer les recherches à venir autour de cet effet matrice pour les futures recommandations nutritionnelles.
* D'après une communication Espen/Cerin. Symposium Madrid septembre 2018.
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