1922 : il y a presque un siècle que le physiologiste autrichien Ludwig Haberlandt (1885-1932) montra que des extraits ovariens bloquaient la conception et lui suggérèrent l’existence d’hormones ovariennes actives sur la fécondité. Il eut l’idée de tester sur le lapin un extrait ovarien injectable dont il pensait faire un anticonceptionnel : l’Infecundin. Mais son projet lui valut la haine des milieux catholiques, le poussa au suicide, et son rôle dans l’histoire de la contraception pharmacologique resta dès lors voué à l’oubli pour longtemps… Cependant, l’intuition d’Haberlandt était exacte, comme le prouva dans les années 1930 la mise en évidence du rôle de deux hormones sexuelles féminines, l’estradiol et la progestérone, alors très difficiles à produire en quantité industrielle.
Ayant découvert des modalités inédites de production de la progestérone à partir de stéroïdes végétaux, Russel E. Marker (1902-1995), un chimiste américain, s’installa en 1944 au Mexique. Il y créa un laboratoire, Syntex, destiné à la production de stéroïdes à bas coût. C’est là qu’en 1951 Luis Miramontes (1925-2004), alors étudiant, synthétisa la noréthindrone ou noréthistérone. Le brevet de ce produit largement utilisé dans nos « pilules » actuelles fut partagé avec deux chimistes, Carl Djerassi (né en 1923) et Györgyi Rosenkranz (né en 1916) qui, à l’époque n’y virent en aucun cas un possible contraceptif.
L’intuition de Pincus. L’histoire de la contraception orale doit donc surtout à l’intuition d’un endocrinologue américain, Gregory G. Pincus (1903-1967). Une rencontre en 1950 avec Margaret H. Sanger (1879-1966), une militante du contrôle des naissances, le décida à mettre au point un contraceptif financé grâce au soutien d’une richissime philanthrope, Katharine D. McCormick (1875-1967). C’est avec le biologiste Min-Chueh Chang (1908-1991) que Pincus, inspiré par les observations d’Haberlandt, eut l’idée d’utiliser un progestatif de synthèse. Après de nombreux tests sur animal, il décida d’expérimenter chez la femme un progestatif sous licence Searle : le noréthynodrel, synthétisé en 1953 par Frank B. Colton (1923-2003).
Une victoire du hasard.
Le hasard fut pour beaucoup dans l’histoire qui suivit… Alors qu’il testait en 1956, avec deux gynécologues américains, Celso-Ramon Garcia (1924-2004) et John Rock (1890-1984), le contraceptif à Porto-Rico (le gouvernement américain ayant refusé l’expérimentation sur place), Pincus constata qu’une insuffisante purification du noréthynodrel ayant entraîné sa contamination par un estrogène, le mestranol, améliorait l’efficacité et la tolérance du médicament : cette association estroprogestative, dite aussi « combinée », reste à la base des contraceptifs actuels.
La FDA délivra en 1957 une AMM pour le médicament (Enovid), alors juste indiqué dans les troubles menstruels. Son utilisation comme contraceptif ne fut, elle, agréée que le 23 juin 1960 : notre « pilule » était née. Ironie de l’histoire : la noréthistérone des laboratoires Syntex ne fut commercialisée comme contraceptif que deux années plus tard, associée à l’éthinylestradiol (Ortho-Novum)…
En 1970, un sénateur démocrate Gaylord Nelson (1916-2005) organisa des auditions (Nelson Pill Hearings) pour enquêter sur les accidents iatrogènes que décrivait dans un livre (The Doctor’s Case Against the Pill) la journaliste Barbara Seaman (1935-2008). La FDA obligea alors pour la première fois les laboratoires à insérer une information dans chaque boîte de médicament…
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