VOILA UNE INCOHÉRENCE bien française. Notre pays compte parmi les plus gros utilisateurs de moyens contraceptifs en Europe (7 femmes sur 10 entre 15 et 54 ans). Et il est aussi celui où le taux d'interruptions volontaires de grossesse (IVG) est le plus élevé (plus de 200 000 pratiquées chaque année). L'une des explications à ce phénomène tient dans une mauvaise acceptation de la contraception. Au fil des décennies, la perception a changé. On est passé de la soif de liberté à une certaine contrainte de prise. Bien sûr, la palette contraceptive s'est étoffée. Les femmes disposent aussi de patchs, anneaux et implants. Et les dispositifs intra-utérins (DIU) sont posés de plus en plus tôt, dès la fin de la première grossesse. La question de la prise en charge serait-elle en cause dans l'échec du taux d'IVG ? Normalement non, répondent les laboratoires, car chacune peut trouver le moyen qui lui convient. Il y a par exemple plus de 60 références de pilules en nom de marque, qui se divisent grosso modo en deux catégories : les plus anciennes, remboursables, et les plus récentes, qui ne le sont pas. Une situation qui tient dans le désaccord historique entre fabricants et pouvoirs publics au sujet du prix à fixer. Les premiers veulent compenser leurs coûts d'investissement. Les seconds considèrent que l'apport des derniers nés n'est pas avéré. On peut espérer qu'ils trouvent un jour un terrain d'entente. Car il semble incongru que tous les moyens de prévention ne soient pas pris en charge, alors que les ultimes solutions, IVG et contraception d'urgence, le sont.
Aujourd'hui, 90 % des contraceptifs vendus en pharmacie sont des pilules, représentant 23 millions d'unités, tous conditionnements confondus (chiffres 2008). Parmi elles, 13 millions d'unités environ sont remboursables et 10 millions ne le sont pas. Ce dernier segment progresse légèrement, au détriment du premier. En 2008, le marché de la contraception renoue avec la croissance du début des années 2000. La progression des achats par les pharmaciens reste tout de même inférieure à 5 %.
Trois leaders.
Les récentes campagnes orchestrées par le ministère de la Santé ont eu leur effet. Et les nouveaux moyens de contraception en profitent. L'anneau vaginal s'est vendu à près de 385 000 unités, tandis que les patchs font moins bien, avec 222 000 unités vendues en 2008. Côté dispositifs à long terme, les DIU se sont écoulés à 357 000 unités et les implants progestatifs à près de 140 000 unités. Les laboratoires qui génèrent ces produits sont de moins en moins nombreux, mais de plus en plus experts. Il y a désormais trois acteurs majeurs : Bayer Schering SA (issu de la fusion de Bayer Santé et de Schering SA), Schering-Plough (qui a repris l'activité d'Organon) et Codepharma (acquéreur de la pilule Minesse de Wyeth et du patch Evra de Janssen-Cilag). Parmi les autres intervenants, plus modestes, : Grünenthal (Belara) et Effik (Cilest, Tricilest, Effiprev et Holgyème). Bayer Schering SA arrive donc en tête de cette demi-douzaine de concurrents. Dans son portefeuille, trois références phares de 3e génération : Mélodia (2,5 millions d'unités*), Jasmine et Jasminelle (respectivement 3,3 et 4,1 millions d'unités). Comme la dernière née, Jasmille Continu, ces deux pilules contiennent de l'éthinylœstradiol (EE) associé à la drospirénone, un progestatif de synthèse sur lequel le laboratoire mise beaucoup depuis le début des années 2000. « Cet analogue de la spironolactone possède des propriétés anti-androgéniques et une légère activité antiminéralocorticoïde », pointe Guillaume Paccoud, responsable marketing de Bayer Schering SA. En janvier dernier, le laboratoire a lancé Yaz, qui reprend la drospirénone, mais avec un schéma d'administration de 24 comprimés actifs et de 4 placebos. Une nouvelle pilule contenant du valérate d'œstradiol doit sortir à la rentrée. Les uns naissent, les autres disparaissent. Déjà ancienne, Miniphase va cesser d'être commercialisée.
Côté DIU, l'accent est mis sur Mirena, premier système intra-utérin délivrant du lévonorgestrel. Comme les autres stérilets au cuivre, Nova T est remboursé, mais de moins en moins posé. La seconde marche du podium est occupée par Schering-Plough, avec plus de 20 % du chiffre d'affaires total des laboratoires. Il commercialise Cycléane 20 (400 000 unités) et 30, ainsi que Cerazette. « Cette pilule est un progestatif pur, prescrit lorsque les œstrogènes sont contre-indiqués », rappelle la responsable marketing Hélène Cottet. Le laboratoire détient encore d'autres pilules de 3e génération, comme Mercilon (550 000 unités) et Varnoline (400 000 unités). Il a aussi dans son portefeuille l'anneau Nuvaring et l'implant remboursé Implanon. À ses débuts, ce dernier a parfois posé problème aux médecins lors du retrait. « S'il est correctement implanté, il ne doit pas y avoir de souci », estime Hélène Cottet. Un implant plus facile à poser et radio-opaque doit de toute façon voir le jour.
Percée des génériques.
Codepharma arrive en troisième position, avec près de 12 % du CA total. Une place acquise grâce à ses best-sellers remboursés et de seconde génération, Trinordiol, Adepal et Minidril, qui totalisent chacune près de 7 millions d'unités vendues. Le laboratoire dispose également du patch Evra. Céline Plisson, directrice médico-marketing, justifie par leur positionnement le maintien de Stéridil (50 microgrammes d'EE) et de Microval (pilule des femmes qui allaitent). Codepharma prend de plein fouet la concurrence des génériques sur le segment du remboursable. Avec 7,8 millions d'unités, Daily de Pierre Fabre Médicament progresse encore et dépasse le princeps Trinordiol. Et Ludéal, du même laboratoire, talonne Minidril. Cécile Plisson souligne que cette coexistence n'a aucun intérêt car son laboratoire a aligné ses prix sur ceux des génériques. La percée se fait aussi sur le non remboursable. Biogaran présente une gamme de 6 références (dont Perléane) non prises en charge, qui devancent les princeps. « Nous réalisons 75 % des ventes totales sur le répertoire », souligne Pascale Poulain, chef de projet marketing. Le générique de Cycléane 20 et Mercilon frôle les 3 millions d'unités, tandis que celui de Méliane et Harmonet atteint la barre du million d'unités. « Les femmes les plus jeunes ont moins d'attachement à leur marque de pilule que leurs aînées. Et elles font le compte. En moyenne, la différence de prix avec le princeps est de 33 % », précise Pascale Poulain. Le levier de développement des génériques reste le pharmacien. « Mais nous avons constaté que pour notre générique le plus vendu, à la fin de l'année dernière, il y a eu autant de prescription en DCI qu'en nom de marque », souligne la responsable de Biogaran.
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Françoise Amouroux
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